Expert – Vins d’Asie
Drôles de vins de champagne
C’était au printemps 1984. Les troupes vietnamiennes venaient de déclencher leur offensive de printemps contre les bases de la résistance anti communiste cambodgiennes. Avec Nick Cumming Bruce, correspondant du journal britannique The Guardian en Asie du Sud-Est, nous avions passé une journée au son du canon, abrités derrière le fossé anti-tank qui marquait en principe la frontière entre la Thaïlande et le Cambodge. Nous avions même tenté de rejoindre les premières lignes de la résistance lorsqu’une volée d’obus tomba près de nous. Sagement, nous sommes revenus nous mettre à l’abri en territoire Thaïlandais.
Le soir, rentrés à Aranyaprateth, la ville frontière après une bonne douche, nous avions découvert dans une épicerie du coin une bouteille de style champenoise. L’étiquette, très simple, ne donnait qu’un nom : Tiffany. D’ou venait ce flacon, et comment était-il arrivé dans ce village gonflé par les ONG, le CICR, les Gardes frontières et les soldats de l’Armée Royale Thaïlandaise basés tout près ? Impossible de le dire.
Installés dans notre petit restaurant favori, dont la spécialité était le poisson grillé du Tonle Sap (que des fraudeurs amenaient chaque jour, de l’intérieur du Cambodge) nous ouvrimes avec précaution la bouteille. C’était pétillant, et imbuvable. Adieu Tiffany.
Installés dans notre petit restaurant favori, dont la spécialité était le poisson grillé du Tonle Sap (que des fraudeurs amenaient chaque jour, de l’intérieur du Cambodge) nous ouvrimes avec précaution la bouteille. C’était pétillant, et imbuvable. Adieu Tiffany.
En 1988 cette fois, un ami vint me voir au Majestic de Hô-Chi-Minh-Ville, où j’occupais comme à l’habitude la chambre 504, celle avec le piano, la vue sur la rivière et un lit a baldaquin. « Je sais que tu aimes le vin, regarde ce que j’ai trouvé » me dit-il. C’était une bouteille qui avait toutes les apparences extérieures d’un champagne. Quelques différences cependant : le bouchon était en plastique, et l’étiquette indiquait « vin de champagne d’Asie ». Le soir, avec un confrère, je fis sauter le bouchon : un bien grand mot pour à peine un petit pffff…
Le liquide ne pétillait pas gaiement dans nos verres. Le nez ne revelait rien, sinon une arrière pensée très acide. La bouteille entière finit dans le lavabo de ma salle de bain.
Le liquide ne pétillait pas gaiement dans nos verres. Le nez ne revelait rien, sinon une arrière pensée très acide. La bouteille entière finit dans le lavabo de ma salle de bain.
Quelques années plus tard, au Cambodge où j’exerçais comme diplomate, mon excellent chauffeur, Sompong, fit de moi l’invité d’honneur de la réception organisée pour le mariage de sa fille avec un garcon à l’avenir d’autant plus prometteur qu’il était américain. Quelqu’un à la main sure avait édifié une pyramide de verres. L’heureux époux y versa un champagne qui avait une inquiétante ressemblance avec celui de Hô-Chi-Minh-Ville.
Décidément le champagne d’Asie n’avait rien gagné avec le temps. Par contre, je fus à peu près le seul à faire semblant de boire : la plupart des invités masculins liquidèrent avec un plaisir évident la demi-douzaine de bouteilles.
C’est à Samantha – qui était à l’époque la correspondante de l’AFP au Cambodge – que je dois la découverte d’un vin authentiquement cambodgien, « made in Cambodia ». Deux rouges, un « type bordeaux » et un “type bourgogne” qu’elle avait déniché à Battambang, chez le producteur.
Le bouchon en toute simplicité, était une capsule genre Coca-Cola. Nostalgique des grands Cortons de mon enfance, je commencais par le « type bourgogne ».
Le liquide était rouge, d’un beau rouge écarlate, trés transparent. Nez très bref, fugitif même. En bouche, de l’eau sucrée avec en plus un arrière gout d’aquarelle (ayant sans doute servi à donner à l’eau sa couleur).
Le « type bordeaux » était en tout point semblable. Le produit était-il nocif ? Je ne le saurai jamais. Les deux bouteilles finirent une fois de plus dans l’évier de la cuisine.
Le bouchon en toute simplicité, était une capsule genre Coca-Cola. Nostalgique des grands Cortons de mon enfance, je commencais par le « type bourgogne ».
Le liquide était rouge, d’un beau rouge écarlate, trés transparent. Nez très bref, fugitif même. En bouche, de l’eau sucrée avec en plus un arrière gout d’aquarelle (ayant sans doute servi à donner à l’eau sa couleur).
Le « type bordeaux » était en tout point semblable. Le produit était-il nocif ? Je ne le saurai jamais. Les deux bouteilles finirent une fois de plus dans l’évier de la cuisine.
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