A l'assaut des concessions privées
Cuivre, cobalt, zinc, nickel, or : le Katanga regorge de gisements prospères, parmi les plus riches du monde. Pourtant 8 Congolais sur 10 vivent toujours sous le seuil de pauvreté absolue. Souvent mécontents des parcelles sans rendement concédée par l’État, les creuseurs prennent aussi d’assaut les concessions privées. Nous prenons la route du site minier de Kasumbalesa à l'extrême sud de la RDC, près de la frontière avec la Zambie. Depuis le mois d'août dernier, 30 000 creuseurs y auraient fait irruption à la manière d'un commando.
Nous nous présentons sur place mais impossible d'entrer. La mine, nous dit-on, n'est pas ouverte aux journalistes. Nous décidons alors de rencontrer le bourgmestre de la localité. Embarrassé, l’homme va multiplier les appels pour savoir comment se comporter? Mais l'accès de la restera impossible. On comprendra simplement que le propriétaire -privé- a choisi d’exploiter les creuseurs à bon compte. "Tout ce que sortent les creuseurs est récupéré par le propriétaire de la mine", confie Zacharie Kilonge M'Pundu, le bourgmestre de Kasumbalesa. "Les creuseurs sont en quelques sorte devenus les machines de la société", lâche-t-il dans un sourire embarrassé.
Ainsi donc, à Kasumbalesa, le privé se servirait des creuseurs clandestins pour éviter de perdre la main. Au grand salon annuel des entreprises minières, organisé à Lubumbashi, nous interpellons le ministre des Mines du Katanga sur ces pratiques surprenantes. "C'est impensable", tranchera Audax Sompwe Kaunda. "Aucune entreprise sérieuse ne peut travailler avec des creuseurs clandestins. L'autorité provinciale ne pourrait pas l’accepter".
Alors au final pourquoi autant de mystère autour de ce site minier de Kasumbalesa? Les observateurs des droits humains avancent une hypothèse : la famille du président Kabila tenterait de mettre la main sur une partie de la concession. "Il y a la mère biologique du Président qui est impliquée, ainsi que son frère", affirme Jean-Claude Baka d'Asadho, l'Association africaine des Droits de l'Homme. "Ils font des affaires dans cette carrière. Dès lors que la famille présidentielle est impliquée, vous n'obtiendrez aucun accès". Une version contestée par la direction de la mine qui évoque simplement quelques actionnaires privés.
Reste que ce métier de creuseurs est soumis à bien des difficultés. Déçus de voir leur terre et ses richesses cédées aux grands groupes miniers étrangers, ils restent déterminés à avoir leur part du gâteau.