Natacha Polony. «J'ai envie de faire connaître des gens»

Par Propos recueillis par Anne-Sophie Douet/ALP

À la fois chroniqueuse en vue et personnalité clivante, la journaliste Natacha Polony a désormais sa propre émission sur Paris Première. Baptisé « Polonium », ce « talk-show » hebdomadaire se veut à son image : vif et tranché.



Vous êtes très critique vis-à-vis de la classe politique française. Aucune personnalité ne trouve grâce à vos yeux ?
Non, je n'ai pas trouvé un seul dirigeant politique qui ait le discours susceptible de rassembler les Français, d'analyser la situation catastrophique de notre pays et de donner envie aux Français de s'inventer un destin commun.

Le 22 octobre est paru votre sixième ouvrage, « Nous sommes la France » (Plon). Parlez-nous-en...
Ce titre vient d'une banderole qu'on a pu voir dans la manifestation du 11 janvier 2015. Dans cet essai, je donne des pistes pour comprendre à qui renvoient ce « nous » et ce « la France » aujourd'hui.

Vous avez été candidate pour Chevènement aux législatives de 2002 à Paris. Comment avez-vous vécu cette expérience ?
Cette campagne m'a appris le danger des partis politiques. Ce sont des machines à sélectionner des médiocres. Pour avancer dans un parti politique, il faut passer plus de temps à grignoter le voisin qu'à penser à l'intérêt commun. En contrepartie, le temps passé à serrer des mains sur les marchés m'a permis de faire de nombreuses rencontres. C'était parfois bouleversant de voir comment les gens me déversaient leur désespoir.

La page est-elle définitivement tournée ?
Oui, je suis journaliste à plein-temps. Jamais plus, je ne soutiendrai un homme ou un clan politique. Même si l'engagement en politique, comme le journalisme, sont deux façons de porter la parole.

Avez-vous pris vos distances par rapport aux idées de Jean-Pierre Chevènement ?
Je crois toujours à ses idées. Au lendemain du 21 avril 2002, j'ai vu l'enthousiasme pour Chevènement se soulever. Puis c'est retombé. L'enthousiasme des gens s'est reporté sur celui qui portait la subversion, c'est-à-dire Jean-Marie Le Pen... Nous n'avons pas su capter cette colère.

On vous a collé une étiquette de femme de droite, mais vous semblez vous amuser à brouiller les pistes... Où vous situez-vous sur l'échiquier politique ?
Mes idées ne rentrent pas dans le clivage gauche-droite. Je suis républicaine, souverainiste et girondine... une rareté ! Cela signifie que je crois profondément que la République ne sera forte que si elle s'appuie sur sa diversité. Je suis souverainiste car j'estime que c'est le peuple, souverain, qui décide de son destin. Ce sont les fondements de la République et de la démocratie. Mais pour obtenir une souveraineté individuelle, il est nécessaire que chaque individu soit instruit. D'où l'importance de l'éducation.

Vous avez d'ailleurs été professeur de lettres avant de démissionner de l'Éducation nationale. Que s'est-il passé ?
J'ai enseigné un an, avant que Jack Lang ne fasse passer les réformes de Claude Allègre. Avec ces réformes, on continuait à tuer à petit feu l'Éducation nationale, donc j'ai choisi de démissionner. Mais j'aimais enseigner. C'est pourquoi j'ai ensuite été prof à la faculté Léonard-de-Vinci pendant neuf ans. Une période passionnante.

Vous avez trois enfants en bas âge. Que pensez-vous de l'enseignement qu'ils reçoivent aujourd'hui à l'école ?
Mes enfants ont une chance : je suis en mesure de compenser à la maison les méfaits de certaines méthodes, comme la méthode globale pour apprendre à lire, par exemple. Je fais le boulot avec eux. C'est pour les autres que je m'inquiète. Tous ceux qui n'ont pas la chance d'avoir des parents capables de les aider. Si l'école ne parle pas de Victor Hugo ou de Montaigne à ces gosses, qui le fera ? Ne serait-ce que parce que c'est beau et que tous les enfants ont droit au beau.

Quel regard portez-vous sur le Grand Journal (Canal +), dont les audiences sont catastrophiques et où vous avez passé un an ?
On a tendance à lyncher Maïtena Biraben qui n'a pas mérité cela. Moi, je savais que je ne passerais pas plus d'une année dans cette émission qui m'a appris à arracher la parole, à concentrer mes questions. Ce qui n'est pas ma culture de base !

Quel regard portez-vous sur le grand chamboule-tout initié par Bolloré à Canal + ?
Cela me permet de mesurer ma chance d'être aussi libre chaque matin sur Europe 1 (*).

Vous avez désormais votre propre émission sur Paris Première (**). Quel en est le concept ?
C'est du sur-mesure. Il s'agit vraiment de ce dont j'avais envie depuis des années : du débat, des interviews, avec des gens qui ont fait l'actualité de la semaine. Je veux qu'on y ait la même liberté de ton qu'autour d'une table entre amis. Nous allons aller au fond des sujets, à la fois avec véhémence et nuance.

Qui seront vos invités ?
J'ai envie de faire connaître des gens. Peut-être moins des universitaires que des personnes de plain-pied dans la vie professionnelle.

On pense forcément à Michel Polac et son émission culte, « Droit de Réponse »...
Oui, c'est une référence. C'est pourquoi aussi l'émission est enregistrée mais dans les conditions du direct : comme chez Polac, les débats ne seront pas coupés. Le but n'est pas de faire s'insulter les gens mais de faire se parler des individus qui ont des opinions radicalement opposées. Ce sera argument contre argument.

Pourquoi ce titre, « Polonium » ?
C'est moi qui l'ai proposé, car c'est un de mes surnoms. Sans doute parce que je suis un poison !

* Du lundi au vendredi, à 8 h 35.
** Le vendredi, à 22 h 55.

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