La "Jungle" de Calais, le 29 octobre 2015, dans le nord de la France

La "Jungle" de Calais, le 29 octobre 2015, dans le nord de la France.

afp.com/PHILIPPE HUGUEN

A un mois des élections régionales, la "jungle de Calais" se vide à une vitesse impressionnante. En octobre, 6000 migrants s'entassaient dans ce campement à ciel ouvert, devenu le plus grand bidonville d'Europe. Ils ne sont actuellement plus que 4500. Cette baisse, de l'ordre de 25%, est la conséquence directe d'un "plan secret" de Bernard Cazeneuve, révélé ce dimanche par le JDD.

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Le plan du ministre de l'Intérieur comporte deux volets. Le premier fait consensus et satisfait les associations de défense des migrants. Bernard Cazeneuve a demandé aux préfets d'ouvrir aux quatre coins de l'hexagone des "centres d'accueil et d'orientation" destinés aux migrants qui ont renoncé à rejoindre l'Angleterre.

Recours aux centres de rétentions administratifs

Des hôtels et des bâtiments ont été réquisitionnés à cet effet. Vendredi, 917 personnes avaient accepté l'offre d'hébergement. Mais c'est l'autre partie du plan qui suscite la polémique. Les associations accusent Bernard Cazeneuve de procéder à un tour de passe-passe en installant pour quelques jours les migrants dans des centres de rétentions administratives (CRA). Selon l'association La Cimade, 664 personnes y auraient été envoyées au cours des deux dernières semaines.

Ces structures fermées accueillent normalement les étrangers en situation irrégulière, dans l'attente de leur éloignement. Mais rien de tel n'attend les migrants "calaisiens". Et pour cause: la plupart sont inexpulsables, car ils viennent d'un pays en guerre, comme la Syrie.

Une quarantaine de Syriens ont par exemple été envoyés à Nîmes. "Au bout de cinq jours, le préfet n'a même pas demandé le prolongement de la rétention. Dès qu'ils sont sortis, ils ont repris un train pour Calais", confie au JDD un responsable associatif du centre de rétention nîmois. Selon les associations, 98% des "migrants calaisiens" envoyés en CRA ont déjà été libérés.

Les élections régionales approchent

Quel signification donner à ce plan? Elle serait politique, estiment les associations. Elles accusent le gouvernement de vider la jungle le temps des élections régionales. Les sondages donnent aujourd'hui Marine Le Pen gagnante dans la région Nord-Pas-de-Calais-Picardie, où la crise des migrants cristallise les tensions.

Interrogé mercredi par Libération, le cabinet de Bernard Cazeneuve assume cette politique d'enfermement: "On a décidé de prendre une mesure hautement dissuasive, ce qu'est le placement en CRA". Les services du ministre assurent néanmoins au journal que des instructions ont été données pour que les nationalités "ouvertement non-expulsables" ne soient plus envoyées dans ces centres. Adeline Hazan, contrôleuse générale des lieux de privation de liberté, s'est saisie du dossier.

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