En finir avec les collèges ghettos, mission impossible ?

LE FAIT DU JOUR. La ministre de l'Education, Najat Vallaud-Belkacem, présente mardi un plan pour en finir avec les collèges ghettos en jouant sur la carte scolaire. Un chantier réputé difficile.

En finir avec les collèges ghettos, mission impossible ?

    « Vous comprenez, c'est ma fille », souffle ce proviseur d'Aubervilliers (Seine-Saint-Denis) qui s'escrime depuis des années à attirer les classes moyennes dans les établissements du département, alors qu'il s'apprête à l'inscrire au CP... dans le privé. Il n'est pas seul à vivre ce paradoxe. Sur le papier, personne n'est contre la mixité sociale. Mais qui va jusqu'à inscrire son enfant dans un établissement réputé « mauvais » pour jouer le jeu d'une carte scolaire contournée par tant d'autres ?

    Le résultat collectif des stratégies individuelles est désastreux. Actuellement, un collégien sur dix étudie dans un établissement sans mixité, où plus de 63 % des élèves sont des enfants très défavorisés, fils et filles d'ouvriers, de chômeurs ou d'inactifs. Le gouvernement annonce qu'il veut briser la ségrégation : il présentera demain un plan pour la mixité à l'école.

    Dix départements tests

    Parmi les pistes envisagées, certains experts plaident pour que les cartes scolaires suivent des lignes de métro ou de bus, permettant de mélanger les élèves du centre et de la périphérie. D'autres suggèrent des secteurs géographiques plus vastes qu'aujourd'hui, auxquels correspondraient non plus un mais plusieurs établissements aux réputations différentes. A charge pour l'administration de répartir les élèves afin d'équilibrer les classes sociales entre les établissements.

    Est-ce une réforme de la carte scolaire ? Elle ne dit pas son nom. Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l'Education nationale, qui avance en terrain miné à un mois des élections régionales et juste après la vive contestation qu'a entraînée sa réforme du collège, veut que les lignes bougent localement d'abord, avec des expérimentations laissées sous la houlette des départements.Une petite dizaine, dont Paris, la Seine-Saint-Denis et l'Hérault, auraient déjà accepté de tester des mesures cousues main par un comité d'experts. Mais suffit-il de mélanger un « bon » et un « mauvais » collège pour obtenir deux établissements moyens ? Les familles peuvent toujours recourir au privé, voire déménager.

    Un risque de fichage social ?

    « La mixité n'est pas qu'une affaire de statistiques. Si on n'accompagne pas le redécoupage d'une offre attractive, ça ne marchera pas, s'inquiète Stéphane Troussel, président (PS) du conseil départemental de Seine-Saint-Denis. Il faut mettre des moyens sur la table. » « On demande à l'école de résoudre les problèmes de mixité sociale que les politiques de la ville n'ont pas su démêler, ajoute la députée Annie Genevard, déléguée à l'éducation au sein des Républicains, qui fustige un « fichage social » et regrette la suppression des classes bilangues inscrite à la récente réforme du collège, qui fonctionnaient souvent comme produit d'appel des collèges peu cotés en direction des familles favorisées.

    QUESTION DU JOUR. Avez-vous mis votre enfant dans le collège de secteur ?