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Emmanuel Macron lance sa deuxième loi fourre-tout

Le ministre de l’économie s’est dit favorable à ce que les fonctionnaires soient davantage rémunérés au mérite. Un projet qui risque de susciter l’opposition.

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Publié le 09 novembre 2015 à 23h33, modifié le 10 novembre 2015 à 12h02

Temps de Lecture 4 min.

Emmanuel Macron à Paris le 9 novembre 2015.

Après la loi Macron 1 adoptée en juillet, un nouveau projet suivant la même inspiration libérale est désormais sur les rails. Les experts en communication de Bercy lui ont déjà attribué un nom : #noé, pour « nouvelles opportunités économiques », précédé d’un hashtag afin de marquer la modernité du sujet. Le calendrier est lui aussi arrêté : une première série de propositions à la mi-décembre, un deuxième point début janvier, un projet de loi présenté fin janvier en conseil des ministres, a annoncé Emmanuel Macron lundi 9 novembre.

La seule chose qui manque encore, à un mois des premières propositions, c’est… le contenu du projet de loi. Ce texte fourre-tout devrait traiter de l’économie des données de masse, de l’identité numérique, de la preuve numérique, de la création de fonds de pension « à la française », du statut des entrepreneurs indépendants, de la rémunération des « talents », etc., mais sans qu’aucune mesure précise ne soit avancée à ce stade.

« Une sorte d’Odyssée »

A vrai dire, le ministre de l’économie ne semble même pas sûr que son texte soit nécessaire : « Je ne sais pas quelles sont les bonnes réformes sur ce sujet. Peut-être que, même, il n’y en a pas. Peut-être que les choses se font seules », a philosophé lundi M. Macron.

Il fut un temps où les projets de loi correspondaient à une réforme précisément définie au préalable, comme le passage aux 35 heures. Avec son projet, le ministre de l’économie teste un autre modèle, celui de la réforme participative. Au lieu d’assener des solutions, le gouvernement fixe un cadre très général – une loi sur les « opportunités économiques » liées notamment à l’essor du numérique –, avance quelques têtes de chapitre, et incite tous ceux qui se sentent concernés à apporter leur pierre à l’édifice. « Une sorte d’Odyssée », dit M. Macron, qui a embarqué dans l’aventure des experts, des fonctionnaires, des créateurs d’entreprises, etc.

Une quarantaine d’entre eux, comme l’économiste Jean Pisani-Ferry ou la présidente de l’Association pour le droit à l’initiative économique (ADIE) Catherine Barbaroux, ont participé ces deux derniers mois au comité mis discrètement en place pour préparer la réforme. Leurs travaux ont été nourris par un rapport du Conseil d’analyse économique, tandis que le député (PS) Pascal Terrasse défrichait de son côté les questions de l’économie collaborative, dans le cadre d’une mission confiée par Matignon. Ce membre de l’aile droite du parti socialiste pourrait être nommé rapporteur du futur texte à l’assemblée.

Enthousiasme de la fédération des autoentrepreneurs

L’étape suivante, entamée lundi, consiste à partager publiquement le diagnostic sur les freins à la croissance, et à faire appel aux bonnes volontés. Une façon pour M. Macron d’aplanir le terrain, alors qu’une fraction de la gauche lui reste hostile et que sa première loi n’a pu être adoptée qu’en recourant à l’article 49-3 de la Constitution.

« Au lieu de faire croire que le législateur sait tout, on écoute tout le monde, on fait travailler la société civile, c’est génial ! » Grégoire Leclercq, le président de la Fédération des autoentrepreneurs, se montre d’autant plus enthousiaste que le projet de loi pourrait favoriser le recours à ce dispositif et faciliter la transition vers un statut plus classique.

Grégoire Sentilhes, le président de la société de gestion Nextstage et cofondateur du G20 des entrepreneurs, a, lui, un autre motif d’espoir : le fait que M. Macron souhaite « développer une forme de fonds de pension à la française, et adapter le cadre fiscal », comme il l’a mentionné lundi. « Ce serait une inversion fantastique du cours de l’histoire », tant le capitalisme français a été pénalisé par l’absence de capitaux de long terme, juge M. Sentilhes. A ses yeux, il est essentiel d’orienter une plus grande partie de l’épargne, notamment salariale, vers l’économie réelle ainsi que le souhaite Bercy. « Mais cela demande du courage politique. »

« Abaisser les exigences, c’est exactement ce qu’il ne faut pas faire »

Plus les mesures à venir dans ce projet de loi vont se préciser, plus les résistances vont en effet apparaître. L’idée de M. Macron d’abaisser les exigences pour certains métiers l’a montré. « Il existe des dizaines, voire des centaines d’activités soumises à qualification obligatoire, sans que ce soit justifié », note-t-on à Bercy : « Celui qui répare un moteur de voiture, on comprend qu’il doive être qualifié, mais celui qui lave les voitures ? » Idem pour ceux qui repeignent des volets, tressent des nattes afro, etc. Ont-ils besoin d’un CAP pour travailler ?

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« Abaisser les exigences, c’est exactement ce qu’il ne faut pas faire, s’insurge Jean-Pierre Crouzet, le président de l’Union professionnelle artisanale. Si, demain matin, quelqu’un utilise un mauvais produit pour laver votre voiture et bousille la carrosserie, que va-t-il se passer ? La croissance repose avant tout sur une offre de produits et de services de haute qualité, garantis par la qualification des salariés. »

Une partie de la gauche risque aussi de monter au créneau contre les projets de M. Macron visant à déréguler certains pans de l’économie afin que les entreprises classiques puissent mieux résister face aux nouveaux venus tels Uber ou Airbnb. D’autant que le ministre aime agiter des chiffons rouges. Mardi matin, sur Europe 1, il s’est ainsi déclaré favorable à ce que les fonctionnaires soient davantage rémunérés au mérite. La loi Noé pourrait bien affronter un déluge de critiques…

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