L’UE déroule le tapis rouge pour Erdoğan à La Valette

Recep Tayyip Erdo?an [Presidencia de Mexico/Flickr]

Les dirigeants de l’UE ont accueilli avec déférence le président turc Recep Tayyip Erdoğan, lors d’un sommet sur la crise des réfugiés.

Les chefs d’État et de gouvernement se sont réunis à La Valette, à Malte, pour discuter de la manière dont la Turquie et l’UE pourraient coopérer pour freiner la vague d’immigrants fuyant la Syrie d’arriver en Europe. Ankara devrait recevoir les 3 milliards d’euros qu’elle réclame, qui lui permettront de mieux gérer la situation.

Plus de 650 000 des 800 000 réfugiés qui ont atteint les pays de l’UE par la mer cette année sont partis de Turquie. Le pays abrite également plus de deux millions de réfugiés ayant fui la Syrie voisine ou d’autres pays de la région.

Ankara utilise l’arme des réfugiés comme moyen de pression. La Turquie exige la reprise des négociations en vue d’une possible adhésion à l’UE, la libéralisation des visas pour les citoyens turcs voyageant dans l’UE et la participation des dirigeants turcs aux sommets de l’UE, en échange de sa coopération.

Partenaires égaux

Les chefs d’Etat ont convenu d’un nouveau sommet rassemblant la Turquie et les chefs d’État ou de gouvernement des 28 États membres. Jean-Claude Juncker, le président de la Commission, a annoncé que le sommet avait pour objectif de « conclure » les négociations avec la Turquie sur un accord de coopération pour la crise de l’immigration.

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Il a expliqué avoir demandé aux États membres de contribuer à une aide de 2,5 milliards d’euros sur deux ans. Cette aide permettra à la Turquie de mieux assister les demandeurs d’asile. Le budget européen verserait les 500 million restants.

Le premier vice-président de la Commission, Frans Timmermans, vient de rentrer de Turquie. Il a présenté aux dirigeants européens les autres demandes d’Ankara, dont la libéralisation des visas et une promesse de reprise des discussions liées à une possible adhésion.

Fort de sa toute récente réélection, Recep Tayyip Erdoğan avait tenu à l’organisation d’un sommet avant de s’engager à renforcer la sécurité aux frontières. « Il faut à présent montrer à la Turquie que nous sommes des partenaires égaux », indique une source au sein de l’UE.

Le président du Conseil, Donald Tusk, a confirmé qu’une rencontre entre les 28 et la Turquie aurait lieu à Bruxelles avant la fin de l’année. Il s’est déclaré « sûr à 99 % » que le sommet se déroulerait au mois de novembre.

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« Il a été décidé qu’il y aurait un Conseil européen avec la Turquie comme invitée », a annoncé François Hollande. « Il pourrait se tenir à la fin du mois de novembre ou au début du mois de décembre. »

Donald Tusk a précisé qu’il rencontrerait Recep Tayyip Erdoğan en compagnie du président de la Commission, Jean-Claude Juncker. Le style autoritaire du président turc a été très critiqué à l’approche du sommet du G20, organisé à Antalya, en Turquie.

Préparatifs législatifs

Jean-Claude Juncker a expliqué qu’il présenterait des propositions législatives pour la création d’un mécanisme de subvention pour les réfugiés en Turquie. Le fonds ne peut en effet exister sans base juridique. Le Parlement européen et le Conseil devront donc valider la proposition de la Commission pour que le projet puisse se concrétiser.

Le fonds permettrait de mobiliser 500 millions d’euros du budget européen et 2,5 milliards d’euros versés par les États membres. Ce fonds serait actif en 2016 et 2017 et les premiers versements auraient lieu le 1er janvier 2016. La participation des États serait calculée de la même manière que leur contribution au budget européen, en fonction de leur revenu national brut. (RNB).

La manière dont l’argent sera dépensé sera déterminée par la Commission et les autorités turques, mais l’aide humanitaire d’urgence sera la priorité absolue. Un document de la Commission souligne que l’engagement de la Turquie est « essentiel à une participation politique ».

Répression des médias

Alors que les dirigeants se réunissaient à Malte le matin du 12 novembre, on a appris que la police turque avait fait une descente dans les bureaux de Zaman, un important journal d’opposition.

Plus tôt dans la semaine, la Commission a publié un rapport très attendu qui demande au nouveau gouvernement à cesser d’enfreindre les principes d’État de droit, de liberté des médias et de droits de l’Homme. Ce rapport était prêt depuis un certain temps, mais Bruxelles attendait les élections pour le publier. Interrogé par EURACTIV, Frans Timmermans a assuré que la Commission avait « été claire » quant à son opinion sur ce type d’actions.

Les 11 et 12 novembre, les dirigeants européens avaient déjà rencontrés leurs homologues africains pour s’accorder sur des aides financières et un plan d’action pour endiguer la crise de l’immigration.

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Au grand dam de la Hongrie et d'autres anciennes républiques soviétiques, qui se sont opposées au plan, l'Union européenne a décidé de répartir 120 000 réfugiés parmi ses États membres. Cela ne représente qu'une petite partie des 700 000 réfugiés qui, selon l'Organisation internationale pour les migrations (OIM), devraient atteindre les frontières de l'Europe cette année, en provenance d'Afrique, d'Asie et du Moyen-Orient.

L'UE courtise également la Turquie avec des promesses d'argent, d'exemption de visa et de nouveaux chapitres dans les négociations d'adhésion pour qu'Ankara essaye de juguler l'afflux de réfugiés sur son territoire.

  • 11 et 12 novembre : Sommet de La Valette sur la migration.
  • 15 novembre : Sommet du G20.
  • D'ici fin 2015 : Sommet UE-Turquie

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