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Délinquance : une enquête contredit les chiffres du gouvernement

Une enquête de l’Observatoire national de la délinquance indique une « stabilité » dans le nombre de cambriolages, contrairement à des déclarations de Manuel Valls

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Publié le 12 novembre 2015 à 19h22, modifié le 13 novembre 2015 à 12h20

Temps de Lecture 3 min.

Des policiers municipaux à Tourcoing en janvier 2015.

Au mieux une stabilité, au pire une hausse du nombre de cambriolages, un sentiment d’insécurité bloqué à un niveau élevé et une explosion de la peur du terrorisme. Les enseignements de la dernière enquête de victimation publiée, vendredi 13 novembre, par l’Observatoire national de la délinquance et de la réponse pénale (ONDRP) vont être politiquement complexes à gérer pour le gouvernement. L’enquête, réalisée auprès de 15 484 ménages, constitue la seule mesure fiable de l’évolution des phénomènes de délinquance. Les personnes sont interrogées sur les faits subis durant l’année précédente – ici, 2014 – et sur leur ressenti au moment de l’enquête – de janvier à avril 2015.

Selon l’ONDRP, 568 000 ménages ont été victimes d’un cambriolage dans leur résidence principale pour l’année 2014, contre 520 000 en 2013. Une hausse tempérée par le responsable des statistiques à l’ONDRP, Cyril Rizk : « Compte tenu du degré de précision de l’enquête, de la marge d’erreur, nous préférons parler de stabilité. Depuis 2012, le chiffre varie dans un intervalle qui reste étroit. » Le nombre de cambriolages déclarés avait fortement augmenté de 2008 à 2011, pour atteindre 542 000 à la fin du mandat de Nicolas Sarkozy. Depuis, il est stable.

Cette première conclusion va à l’encontre de la communication gouvernementale depuis quelques mois. Cette dernière se fonde sur les chiffres fournis par la police et la gendarmerie. Dès novembre 2014, le premier ministre, Manuel Valls, avait évoqué « pour la première fois en six ans (…) une baisse du nombre de cambriolages dans notre pays », ajoutant : « Je ne connais que trop bien le procès qui a longtemps été fait par certains à la gauche en matière de sécurité. On la disait angélique, laxiste, incapable de se saisir de cette question. Les faits ont apporté un démenti cinglant à ceux qui pourraient penser cela. »

Lors de son discours aux responsables des forces de sécurité, le 13 octobre, le ministre de l’intérieur, Bernard Cazeneuve, a également salué les « résultats » de ses services dans la lutte contre les cambriolages, qui ont « diminué ».

L’exercice est jugé « pédagogique » par M. Rizk : « Non, il n’y a pas de baisse des cambriolages. Et s’il y avait eu une baisse, il était trop tôt pour l’évoquer il y a un an. Il faut être patient. » Cela montre une nouvelle fois que les chiffres bruts de la police et de la gendarmerie ne peuvent être considérés comme des indicateurs fiables des évolutions de la délinquance malgré l’utilisation politique qui continue à en être faite, à droite comme à gauche. Sur la même période, la police affichait en effet une baisse des cambriolages de résidences principales de 4,7 % et la gendarmerie, de 8,9 %.

« Effet Charlie »

L’ONDRP constate également une hausse des violences physiques (hors vols), et notamment subies par les femmes : 1 011 000 contre 860 000 lors de l’enquête précédente. Pour l’ensemble de la population, les violences physiques et sexuelles déclarées repassent la barre des 2 millions pour la première fois depuis 2008-2009. Mais l’Observatoire tempère : « Les données dont on dispose sont encore trop fragiles pour établir une hausse. »

Cette stabilité globale de la délinquance déclarée s’accompagne d’une stabilité du sentiment d’insécurité. Un peu plus de 21 % des personnes interrogées ont déclaré ressentir de l’insécurité dans leur quartier ou dans leur village « souvent, de temps en temps ou rarement ». Ce chiffre avait augmenté sans discontinuer de 2008 à 2013, en lien avec l’explosion des cambriolages, avant de baisser en 2014. Même stabilité pour la part de personnes ayant « observé des phénomènes de consommation ou de trafic de drogues », qui reste au-dessus des 20 %.

Enfin, l’ONDRP a mesuré, sans surprise, un « effet Charlie » sur les préoccupations des Français : la part des personnes qui citent le terrorisme comme problème numéro un est passée de 2,6 % à 17,7 %. Le terrorisme prend la deuxième place, derrière le chômage. Il n’avait jamais dépassé les 5 % depuis la création de l’enquête. Conséquence, tout le reste baisse, même la délinquance, désormais problème numéro un pour seulement 9,7 % des Français, contre 13,8 % en 2014.

Mais la délinquance pourrait revenir sur le devant de la scène. Depuis octobre, le nouveau service statistique du ministère de l’intérieur publie mensuellement les chiffres de la police et de la gendarmerie corrigés des variations saisonnières, avec maintes précautions (le service compare notamment des périodes minimales de trois mois). Et tous les indicateurs retenus comme significatifs (cambriolages et vols) sont au rouge fin 2015.

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