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La France était dans le viseur de l’Etat islamique bien avant les frappes en Syrie

Le groupe djihadiste s’en était pris aux intérêts français à plusieurs reprises avant l’intervention militaire de Paris.

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Publié le 19 novembre 2015 à 14h26, modifié le 20 novembre 2015 à 15h42

Temps de Lecture 3 min.

« Pourquoi Paris ? », se demande ce jeudi l’éditorialiste du Monde Alain Frachon dans une analyse consacrée aux attentats du 13 novembre. Il rappelle que pour « justifier » la barbarie de leurs actes, les kamikazes du Bataclan ont évoqué auprès des otages et des victimes « ce que votre président fait en Syrie ». « On est là pour venger nos familles et nos proches de l’intervention française en Syrie », ont-ils expliqué, selon le témoignage de l’un des rescapés recueilli par L’Humanité.

Mais de là à dire qu’il y a un lien direct entre les frappes françaises sur l’EI en Syrie et l’action des terroristes à Paris et Saint-Denis, et que ce sont les premières qui auraient constitué « le » déclencheur de la seconde, il y a un grand pas. Un rappel chronologique montre l’escalade des tensions entre Paris et l’Etat islamique au cours des dernières années. Il fait aussi apparaître des tentatives d’attentats bien avant l’engagement français en Syrie.

1. Des attentats sans doute préparés avant les frappes françaises

La première intervention des chasseurs français contre les positions de l’Etat islamique en Syrie date du 27 septembre 2015. Soucieuse de ne pas aider indirectement le régime de Bachar Al-Assad, la France, qui fournissait des armes aux groupes rebelles syriens, s’était refusé à intervenir militairement contre le groupe djihadiste sur le territoire syrien jusqu’au revirement de François Hollande lors de sa conférence de presse de rentrée, le 7 septembre.

Il s’est donc écoulé 67 jours entre la déclaration de guerre de la France à l’EI en Syrie et les attentats du 13 novembre. C’est probablement trop peu pour laisser aux terroristes le temps de planifier des opérations de cette ampleur. Surtout si l’on peut confirmer l’information selon laquelle l’un des terroristes, portant un passeport syrien, est entré en Europe par la Grèce le 3 octobre.

Les attaques à Paris et Saint-Denis étaient donc très vraisemblablement préparées depuis une date bien antérieure à l’intervention française en Syrie.

2. La France officiellement ciblée depuis un an

Toutefois, la France intervenait déjà en Irak avec la coalition internationale contre le groupe Etat islamique depuis le 19 septembre 2014. C’est à la suite de cet engagement que l’EI a pour la première fois ciblé publiquement la France et les Français dans un message du porte-parole Abou Mohammed Al-Adnani diffusé en plusieurs langues le 22 septembre :

« Si vous pouvez tuer un incroyant américain ou européen – en particulier les méchants et sales Français – ou un Australien ou un Canadien, ou tout (…) citoyen des pays qui sont entrés dans une coalition contre l’Etat islamique, alors comptez sur Allah et tuez-le de n’importe quelle manière. »

La veille, un groupe djihadiste affilié à l’EI avait enlevé en Algérie le Français Hervé Gourdel. Celui-ci avait été exécuté le 24 septembre, après le refus de la France de céder à l’ultimatum de cesser ses frappes en Irak.

En janvier 2015, Amedy Coulibaly a revendiqué l’attentat de Montrouge et la prise d’otages de l’Hyper Cacher au nom de l’Etat islamique.

3. Des menaces bien antérieures

Le groupe Etat islamique, qui a proclamé son « califat islamique » entre l’Irak et la Syrie le 29 juin 2014, projetait déjà de frapper les intérêts français bien avant d’être ciblés par l’armée française.

Investi depuis au moins 2010 dans une vaste opération de recrutement de djihadistes occidentaux, notamment français, l’EI avait inspiré une tentative d’attentat sur le sol français avant que Paris n’intervienne en Irak : le 5 juillet 2014, Mohamed O., originaire de Créteil (Val-de-Marne), avait été interpellé par la DGSI alors qu’il projetait un attentat en France, après avoir effectué un séjour dans un camp d’entraînement de l’EI en Syrie.

De même, le djihadiste français Mehdi Nemmouche n’avait pas attendu l’intervention de la Belgique en Irak (en septembre 2014) avec la coalition internationale pour commettre son quadruple assassinat au Musée juif de Bruxelles le 24 mai 2014.

Lire aussi Article réservé à nos abonnés La France, principale cible et vivier de l’« Etat islamique »

4. Une portée symbolique forte

Si l’EI frappe notre pays, ce n’est donc pas uniquement en réponse à une agression militaire. Dans son analyse, Alain Frachon cite plusieurs autres explications :

  • S’en prendre à l’Occident permet à l’organisation de « faire diversion » alors qu’elle est mise en difficulté sur le terrain et a besoin de continuer « susciter des vocations » ;
  • s’en prendre à la France revient à attaquer l’un des symboles mondiaux de la démocratie, vue comme une idolâtrie « qui repose sur la déification du peuple » ;
  • s’en prendre à Paris, « capitale des abominations et de la perversion », c’est frapper l’un des totems de la supposée « décadence morale » à laquelle l’EI a déclaré la guerre ;
  • s’en prendre au Bataclan c’est, selon le message de revendication de l’EI, viser « des centaines d’idolâtres dans une fête de perversité », même si le mode de vie n’est sûrement pas la première cible des djihadistes.
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