Sécurité : 1200 personnes fichées « S » en Seine-Saint-Denis

 

Sécurité : 1200 personnes fichées « S » en Seine-Saint-Denis

    Sur quelque 10 000 personnes qui font officiellement l'objet de fiches S en France, 1 200 vivent en Seine-Saint-Denis. « Cela fait 10 % de la moyenne nationale », relate un fonctionnaire.

    Ces personnes fichées S, en référence à Sûreté de l'Etat, ont attiré à un moment l'attention ou la vigilance des services de sécurité. Il s'agit de personnes signalées pour radicalisation, mais pas seulement, puisque ces signalements concernent aussi des activistes politiques, d'extrême droite ou d'extrême gauche, et même les hooligans des stades.

    Ce fichier qui conduit notamment aux perquisitions en série depuis les attentats du 13 novembre, et aux assignations à résidence, est alimenté quotidiennement par la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), selon un degré de dangerosité allant de 1 à 15.

    Combien sur ces 1 200 signalements sont signalés pour radicalisation religieuse ? Qui sont ces personnes ? « Le but est de surveiller ces personnes sans qu'elles le sachent » explique une source de l'Intérieur. « Signaler la présence d'une fiche S c'est aussi alerter l'entourage de la personne concernée de ne plus le contacter ou de prendre des précautions qui nuisent au travail de renseignement », renchérit un magistrat.

    Mais en cas de contrôle un peu long à l'aéroport les soupçons peuvent s'éveiller (lire ci dessous).

    (LP/Anne-Laure Abraham)

    Inquiétude à l'aéroport

    A l'aéroport de Roissy, site sensible, le sujet alimente la psychose. « Les salariés se regardent de travers et craignent pour leur sécurité », relate un responsable syndical. L'hypothèse d'exercer un droit de retrait a même effleuré certains esprits.

    « Des salariés fichés S ? C'est possible, si la personne est maintenue en activité, c'est que le degré de dangerosité a été évalué », rassure une source aéroportuaire. La préfecture dément l'information selon laquelle des salariés auraient été licenciés à cause d'une fiche S. Mais pas de retraits de badge pour autant.

    Aucun badge permettant de travailler en zone réservée n'a encore été retiré depuis les attentats du 13 novembre. Pas même suite à la découverte jeudi « d'éléments de prosélytisme avancé et des signaux faibles de radicalisation» ainsi que d'objets volés, retrouvés dans des casiers de salariés de Servair. La perquisition chez ce sous-traitant d'Air France, qui fabrique les plateaux-repas, n'a pour l'heure donné lieu à aucune sanction administrative. Ce lundi la société a indiqué qu'elle se réservait le droit de déposer plainte.

    Et depuis le mois de janvier, 10 personnes se sont vues retirer le fameux laissez-passer, dont deux étaient soupçonnés d'avoir été en lien avec les frères Kouachi, auteurs des attentats du 7 janvier.

    Il avait posté sa fiche S pour se vanter sur Facebook

    Diffuser des informations relatives à la Sûreté de l'Etat peut mettre en péril le travail effectué par les services de renseignements. Les autorités en étaient convaincues, bien avant les attaques du 13 novembre. Au tribunal correctionnel de Bobigny, le 6 octobre, un jeune homme originaire de Chelles (Seine-et-Marne) a été condamné à 4 mois de prison ferme suite à la diffusion de sa fiche S.

    Le jeune homme faisait l'objet d'une surveillance. Ils ont peu goûté de voir diffusée, sur Internet, sa fiche S, assortie du commentaire « ils ont peur ces chiens, rien ne nous touche ». Les caméras de surveillance de l'aéroport de Roissy ont permis de découvrir rapidement comment il se l'était procurée.

    Trouvant que le contrôle de son passeport à l'aéroport prenait trop temps, il avait demandé à sa sÅ?ur de photographier l'écran du policier de la Police aux frontières. Et pendant ses vacances en Thaïlande, il s'était envoyé la photo, finalement diffusée sur l'un de ses comptes Facebook.

    «A l'audience, il a expliqué qu'il n'avait rien à voir avec un jihadiste, juré qu'il buvait de l'alcool et fréquentait des prostituées, rapporte une source judiciaire. Il a expliqué aussi que son fichage devait être lié à sa dernière détention à Fresnes, où il avait partagé la cour de promenade de jihadistes.Il y avait aussi des photos de lui en armes, il a dit que ça avait été pris en Thaïlande et qu'il les avait diffusées pour se la péter auprès de ses amis ».

    Mais il a été condamné à 4 mois de prison avec mandat de dépôt, peine assortie d'une interdiction de sortie du territoire, pour transmission frauduleuse de données contenues dans un système de traitement de données personnelle de l'Etat.

    Les juges ont estimé à l'inverse qu'il s'était radicalisé, au regard d'éléments que le prévenu a niés. Il avait été condamné dix-neuf fois auparavant, mais pour des outrages, principalement et des violences conjugales. Deux mois de sursis ont été prononcés contre la sÅ?ur, qui a pris la photo.