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Mondial 2022 : Michel Platini savait qu’il allait rencontrer les Qataris à l’Elysée

Le patron de l’UEFA était informé de la présence de représentants du Qatar à cette réunion organisée le 23 novembre 2010 par Nicolas Sarkozy.

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Publié le 22 novembre 2015 à 20h02, modifié le 23 novembre 2015 à 14h35

Temps de Lecture 4 min.

Michel Platini et Nicolas Sarkozy, en février 2015.

Il y a cinq ans jour pour jour, le 23 novembre 2010, Nicolas Sarkozy recevait à déjeuner à l’Elysée le cheikh Tamin ben Hamad Al-Thani, prince héritier du Qatar et actuel émir, le cheikh Hamad ben Jassem, premier ministre et ministre des affaires étrangères de l’émirat, et Michel Platini, patron de l’Union des associations européennes de football (UEFA).

L’ex-meneur de jeu des Bleus a toujours assuré avoir été « surpris » en découvrant la présence du prince héritier du Qatar et de son premier ministre à ce déjeuner organisé avant le vote du 2 décembre 2010 pour l’attribution des Mondiaux 2018 et 2022 respectivement à la Russie et au Qatar.

Michel Platini, qui avait écarté l’idée de recevoir l’ex-président Bill Clinton, dirigeant d’honneur du comité de candidature des Etats-Unis, pour éviter tout conflit d’intérêts, assurait qu’il pensait voir Nicolas Sarkozy en tête à tête. Pourtant, le patron de l’UEFA s’attendait à rencontrer l’émir du Qatar, Hamad ben Khalifa Al-Thani, à l’Elysée. Selon nos informations, Michel Platini n’a pas caché, dans un premier temps, qu’il allait déjeuner avec M. Sarkozy et le cheikh Hamad, au pouvoir jusqu’en 2013, avant de modifier sa version de ce rendez-vous après les premières critiques.

« Il y a eu un revirement soudain après ce déjeuner »

Or, ce déjeuner aurait été tout sauf anodin. C’est à partir de ce moment-là que le soutien du patron de l’UEFA à la candidature américaine pour 2022 aurait basculé vers un soutien à la candidature du Qatar. C’est en tout cas ce qu’assure le Suisse Joseph Blatter, dirigeant de la Fédération internationale de football (FIFA) depuis 1998 (suspendu en octobre pour quatre-vingt-dix jours par le comité d’éthique de l’organisation internationale, tout comme Michel Platini).

Ce déjeuner « a complètement changé la donne », assure Joseph Blatter, qui, dans un entretien à l’agence de presse russe TASS, le 28 octobre, avait rendu l’ex-chef de l’Etat et le dirigeant de l’UEFA responsables de la victoire (quatorze voix à huit) dans les urnes du Qatar face aux Etats-Unis pour l’organisation du Mondial 2022.

« Tout allait bien jusqu’au moment où M. Sarkozy a tenu une réunion avec le prince héritier du Qatar, qui est aujourd’hui émir, a déclaré Joseph Blatter. Et au déjeuner qui a suivi avec M. Platini il a dit que ce serait bien d’aller au Qatar. Il y a eu un vote à bulletins secrets. Quatre suffrages européens se sont finalement écartés des Etats-Unis et le résultat a été de quatorze voix contre huit. »

Ce scrutin d’attribution fait d’ailleurs l’objet d’une enquête du ministère public de la Confédération helvétique (MPC). Le bureau du procureur général suisse ayant mis au jour « plus de 120 transactions financières suspectes ».

Michel Platini, qui a reconnu avoir apporté son suffrage au richissime émirat, avait assuré dans les colonnes de L’Equipe, en juin 2014 : « Personne ne m’a dit pour qui je devais voter. » « Jamais le Qatar ne m’a demandé de voter pour lui. Ni Sarkozy, ni personne », avait insisté l’ex-sélectionneur des Tricolores (1988-1992), qui reconnaissait toutefois avoir « senti qu’il y avait un message subliminal » de l’ex-chef de l’Etat lorsqu’il s’était « retrouvé avec des Qatariens ».

« Il y a eu un revirement soudain après ce déjeuner. Blatter est loin de tout savoir mais, sur le fond, ce qu’il dit est vrai : Platini a joué un rôle important pour renverser la vapeur contre les Etats-Unis », assure une source contactée par Le Monde.

Un deal trahi avec les Etats-Unis

Selon nos informations, Michel Platini était initialement loin d’être séduit par le dossier de candidature du Qatar. Au printemps 2010, il avait effectué un voyage en Corée du Sud afin de rencontrer Chung Mong-joon, membre du comité exécutif de la FIFA depuis 1994 et dont le pays postulait également à l’organisation du Mondial 2022.

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Mais à l’été 2010, le président de l’UEFA avait rencontré Sunil Gulati, président de la Fédération des Etats-Unis (USSF), à Nyon (Suisse), afin de lui proposer un deal. En échange du retrait de la candidature américaine pour l’attribution du Mondial 2018, l’ex-meneur de jeu des Bleus a promis de soutenir le dossier de l’USSF pour l’édition 2022.

En octobre 2010, Sunil Gulati avait par conséquent officialisé le forfait des Etats-Unis pour le Mondial 2018 et confirmé leur candidature pour la Coupe du monde 2022.

Le pacte scellé avec le président de l’USSF a ainsi été rompu par Michel Platini après le déjeuner organisé à l’Elysée le 23 novembre.

En décembre 2012, à la tribune des Doha Goals, forum mondial du sport, Nicolas Sarkozy s’était enorgueilli d’avoir « soutenu le choix » du Qatar. « Il a fallu attendre le XXIe siècle pour qu’un pays musulman organise pour la première fois un événement de cette importance. C’est une grande décision », avait-il déclaré.

De son côté, Sunil Gulati n’a jamais caché, en privé, son sentiment d’avoir été trahi par Michel Platini. « Je ne lui pardonnerai jamais », avait-il murmuré après le vote de 2010. Depuis, il se mure dans le silence.

Retrouvez notre enquête dans le cahier Sport&forme du Monde daté samedi 28 novembre

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