L'opposition au Venezuela a dénoncé le meurtre, mercredi, d'un de ses dirigeants locaux, en plein rassemblement pour les élections législatives du 6 décembre, dans un climat de campagne tendu alors que le chavisme risque de perdre sa majorité parlementaire.

«Luis Manuel Diaz, secrétaire général de l'Action démocratique (AD) à Altragracia de Orituco (État de Guarico, centre, NDLR) vient d'être assassiné par balle», a tweeté le député Henry Ramos Allup, également secrétaire général national de ce parti d'opposition et candidat aux prochaines élections.

Selon lui, M. Diaz était à ce moment-là sur une estrade au côté de Lilian Tintori, épouse du leader de l'aile radicale de l'opposition Leopoldo Lopez.

Ce dernier avait été condamné en septembre à près de 14 ans de prison pour incitation à la violence lors des manifestations antigouvernementales entre février et mai 2014, qui ont fait officiellement 43 morts.

Henry Ramos Allup a attribué cet homicide à des «bandes armées» liées au Parti socialiste (PSUV) au pouvoir et affirme que l'auteur du coup de feu fatal a tiré depuis un véhicule.

Le Venezuela est l'un des pays les plus violents au monde avec, selon les derniers chiffres publiés par l'ONU, 53,7 homicides pour 100 000 habitants en 2012 (contre 1,44 pour 100 000 au Canada en 2013, par exemple).

Ce meurtre survient à un peu plus d'une semaine des élections législatives du 6 décembre, pour renouveler les 167 députés du Parlement monocaméral.

Le scrutin est organisé dans un climat historique, l'opposition étant donnée largement favorite, bénéficiant du ras-le-bol de la population, confrontée à une grave crise économique mêlant inflation élevée et pénurie de biens de première nécessité.

La majorité des sondages lui attribuent en effet une large avance - entre 14 et 35 points -, qui devrait lui permettre de remporter la majorité parlementaire pour la première fois depuis l'arrivée au pouvoir en 1999 d'Hugo Chavez, décédé en 2013, et auquel a succédé Nicolas Maduro.

Déjà plusieurs incidents

La coalition regroupant une trentaine de partis d'opposition, la Table pour l'unité démocratique (MUD), a vivement condamné le meurtre de M. Diaz, accusant le gouvernement de Nicolas Maduro d'être responsable «par action et par omission de tout acte de violence au Venezuela».

La coalition tient pour responsables de ces violences «les plus hauts niveaux de l'État qui ont semé la haine» et appelle l'Organisation des États Américains (OEA), les Nations unies, l'Union européenne et même le Vatican à «exiger du gouvernement et du PSUV qu'ils dénoncent publiquement l'usage de la violence comme arme politique».

L'opposition a déjà dénoncé plusieurs incidents ayant impliqué ses dirigeants au cours des deux dernières semaines, notamment une attaque armée contre l'ex-candidat à la présidentielle, Henrique Capriles.

Le député et candidat Miguel Pizarro a quant à lui affirmé qu'une fusillade avait éclaté sur son parcours dimanche à Petare, un quartier de l'est de Caracas. Il a également montré des photos de personnes encagoulées qui portaient des armes à feu.

En réaction, le président du Parlement et numéro 2 du parti chaviste au pouvoir, Diosdado Cabello, a taxé de «montages» les attaques récemment dénoncées par l'opposition.

«La nouvelle mode c'est de dire : des groupes armés chavistes s'attaquent à n'importe qui. Cela nous le savons déjà!», a-t-il ironisé dans son émission hebdomadaire à la télévision.

La Mission électorale de l'Union des nations sud-américaines (UNASUR), établie au Venezuela depuis la semaine dernière, a déploré dans un communiqué la mort de l'opposant et exprimé «son rejet le plus déterminé de tout type de violence qui puisse affecter le déroulement normal du processus électoral».

Elle a également lancé un appel aux autorités «pour que soit menée une enquête exhaustive sur ce fait condamnable, dans le but d'éviter l'impunité face à cet événement».

L'UNASUR est la seule organisation internationale autorisée à accompagner le prochain scrutin législatif par les autorités électorales vénézuéliennes, qui ont refusé les missions d'observation des Nations Unies, de l'OEA et de l'Union européenne.

Une opposante accuse le président

Lilian Tintori, figure importante de l'opposition au président vénézuélien, a accusé jeudi Nicolas Maduro d'être responsable du meurtre, affirmant se sentir elle aussi menacée.

«Ils veulent me tuer», a déclaré l'épouse de l'opposant radical incarcéré Leopoldo Lopez, lors d'une conférence de presse. Elle a affirmé s'être trouvée à «deux mètres» de Luis Manuel Diaz, secrétaire général de l'Action démocratique (AD) quand il a été tué par balle mercredi soir, en pleine réunion, à Altagracia de Orituco (centre).

«Ils veulent terroriser les Vénézuéliens (...) Pour moi, Nicolas Maduro est le responsable direct», a-t-elle affirmé, appelant toutefois ses partisans à «garder le calme».

Lilian Tintori est devenue une figure importante de l'opposition vénézuélienne depuis que son mari, le leader de l'aile radicale de l'opposition Leopoldo Lopez, a été emprisonné en février 2014.

Il a depuis été condamné à plus de 13 ans de prison pour son rôle présumé dans les manifestations antigouvernementales entre février et mai 2014, qui avaient fait 43 morts selon le bilan officiel.

Devant la presse, Mme Tintori a raconté jeudi l'attaque contre M. Diaz : «Nous étions sur l'estrade, la candidate (à un poste de députée) Rummy Olivo allait commencer à chanter. J'étais à côté d'elle et à ce moment-là, nous avons entendu, très près, une rafale d'une dizaine de tirs. Nous nous sommes jetés au sol et j'ai vérifié que je n'étais pas touchée».

C'est le député Henry Ramos Allup, également secrétaire général national de ce parti d'opposition et candidat aux élections, qui a donné l'alerte sur Twitter, accusant des «bandes armées» liées au Parti socialiste (PSUV) au pouvoir d'avoir mené l'attaque.

Le président Nicolas Maduro a rejeté jeudi ces accusations, assurant qu'il s'agissait d'«un règlement de comptes entre bandes rivales».