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Le yuan chinois reconnu comme monnaie de réserve internationale

Sauf surprise, le FMI va donner son feu vert à l’intégration du Renminbi dans le panier des Droits de tirage spéciaux. Une victoire politique pour Pékin, et une étape de plus vers la libéralisation du système financier chinois.

Par Alain Ruello, Richard Hiault

Publié le 29 nov. 2015 à 16:59

Cela ne devrait être qu’une formalité. Ce lundi, à Washington, le Conseil d’administration du Fonds monétaire international (FMI) va, sauf revirement surprise de dernière minute, avaliser l’intégration du renminbi -le yuan selon son nom usuel- dans le panier des Droits de tirage spéciaux (DTS) , l’unité de compte utilisée par l’institution multilatérale internationale. Mi-novembre, à l’issue de la publication d’une étude des économistes du Fonds stipulant que la devise chinoise remplissait les critères de sélection, la directrice générale, Christine Lagarde, avait soutenu personnellement cette intégration.

Pour le pouvoir à Pékin, il s’agit d’une victoire politique dans sa quête de reconnaissance internationale, puisque la « monnaie du peuple » va côtoyer le dollar, l’euro, la livre sterling et le yen. Il s’agit aussi d’une étape supplémentaire, même symbolique, vers l’ouverture de son système financier.

La valeur du commerce chinois

Premier des critères retenus que la Chine remplit depuis bien longtemps : la valeur de son commerce. Pour qu’une devise soit intégrée au panier de DTS, le pays émetteur doit être classé, sur les cinq dernières années, parmi ceux affichant la plus haute valeur pour son commerce de biens et de services. Avec 2.564 milliards de dollars d’exportations en 2014, selon les chiffres de l’OMC, la Chine se situe en deuxième position derrière l’Union européenne, mais juste devant les Etats-Unis. Second critère important, la devise doit être « librement utilisable ». Derrière ce jargon technique, la devise se doit d’être largement utilisée pour effectuer des paiements lors de transactions internationales et, également, être largement échangée sur les principales places financières mondiales. Contrairement à l’opinion répandue, la devise ne doit pas nécessairement « flotter librement » sur les marchés, à l’instar du dollar américain, de l’euro ou du yen. L’internationalisation du renminbi va donc dans le sens de son intégration.

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Lot de consolation ?

La décision doit être prise avec une majorité des voix de 70 %, et non de 85 % comme dans la plupart des cas au FMI. Les Etats-Unis qui ont toujours leur droit de veto, grâce à leur 17 % du capital, ont laissé entendre qu’ils ne s’opposeraient pas à cette intégration. Pékin devrait donc pouvoir se réjouir de cette consécration. Peut-être faut-il y voir un lot de consolation, alors que la réforme de la gouvernance du FMI, votée en 2010 et nécessitant la ratification par 85 % des membres du Fonds est toujours bloquée. Le Congrès américain ne l’a pas ratifiée. Elle devait pourtant renforcer le poids de la Chine dans le capital de l’institution pour en faire le troisième actionnaire derrière les Etats-Unis et le Japon. Pour l’heure, Pékin pourra se prévaloir de cette autre victoire.

Reste à savoir quel poids représentera le renminbi dans le panier de DTS. L’étude des économistes du Fonds recommandait une pondération comprise entre 14% et 16%. Mais, récemment, l’agence Reuters citant des sources internes du FMI a indiqué que ce serait un chiffre moins élevé. Des sources font état de moins de 10%. Quant à mesurer l’impact financier de la mesure, c’est trop tôt. « L’intégration effective du Renminbi ne sera effective qu’à compter d’octobre 2016. D’ici là, je ne pense pas qu’on verra des évolutions manifestes sur le plan financier et macro-économique », explique Herve Lievore, stratégiste macro chez HSBC Global Asset management à Hong Kong.

Investisseurs privés positifs

Par la suite, les banques centrales devraient augmenter leur exposition au yuan, probablement sous forme d’obligations publiques et de titres monétaires, même si le marché off-shore de la dette chinoise reste encore limité. Les investisseurs privés, eux, devraient accueillir positivement la décision du FMI, mais cela pourrait ne pas suffire. Avant d’augmenter leur exposition, ils suivront de près les progrès de l’ouverture du marché des capitaux que le gouvernement a engagée , mais qu’il tient à piloter de manière progressive et maîtrisée, poursuit Herve Lievore.

Alicia Garcia Herrero, analyste chez Natixis, va dans ce sens. Pour ce qui est de la sphère publique, moins de 3% des réserves des banques centrales vont basculer vers le renminbi. Compte tenu de l’environnement économique actuel (ralentissement, endettement des banques,…), il est plus probable que la devise chinoise reste influencée par les interventions politiques. Dans ces conditions, « il est difficile d’imaginer que les investisseurs privés vont augmenter leur part d’actifs en yuans », estime-t-il.

Richard Hiault et Alain Ruello (Correspondant à Pékin)

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