En Iran, les femmes musiciennes condamnées au silence

Une représentation de l'orchestre symphonique de Téhéran a été annulée à la dernière minute. La raison : les femmes iraniennes ne peuvent (toujours) pas se produire sur scène.

Publié le 01 décembre 2015 à 07h00

Mis à jour le 08 décembre 2020 à 06h03

Drôle de sort que celui réservé à l'orchestre symphonique de Téhéran, et plus précisément à ses musiciennes. Dimanche 29 novembre, alors que l'ensemble s'apprête à jouer l'hymne national iranien, en marge d'un championnat international de lutte, sa prestation est brutalement suspendue, au motif que « les femmes ne pouvaient pas jouer sur scène ». « Les chaises avaient été installées, tout semblait bien se passer », a expliqué le chef d'orchestre Ali Rahbari à l'agence de presse iranienne Isna, sans préciser d'où provenait l'interdiction.

« Pourquoi ne seraient-elles pas autorisées à jouer l'hymne national de leur propre pays? », s'est indigné Ali Rahbari. Depuis la révolution islamique de 1979, elles n'ont plus le droit de se produire seules sur scène. Elles sont, en revanche, autorisées à jouer d'un instrument dans un orchestre ou un groupe, mais après autorisation préalable du ministère de la Culture. Et visiblement, pas toujours.

Par le passé, des concerts de groupes comportant des femmes ont déjà été interdits. L'année dernière, le concert du groupe « Erfan », comprenant plusieurs femmes, a été interdit à Ispahan (centre du pays). D'après les membres du groupe, c'est le ministère de la Guidance islamique du gouvernement Rohani, chargé de la surveillance des médias et des activités culturelles, qui en était à l'origine. 

C'est en revanche la première fois qu'une telle censure frappe l'orchestre symphonique, créé en 1937 et dont l'histoire a notamment été marquée par la figure de Heshmat Sandjari, qui l'a dirigé de 1960 à 1972, comme le rappelle France Musique. Né en Iran en 1948, Ali Rahbari en a pris la tête pour la première fois en 2005, avant de démissionner suite aux critiques des ultra-conservateurs qui l'accusent de promouvoir les valeurs occidentales. Revenu à la direction de l'orchestre en 2013, il a décidé de ne pas céder. « Ou bien nous jouons tous ensemble, ou bien nous partons ». Conséquence : l'orchestre est resté muet. 

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