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"J'ai été en garde à vue pour avoir manifesté place de la République"

TEMOIGNAGE - Manue, militante de 24 ans au syndicat Solidaires Etudiant-e-s, a été placée en garde à vue dimanche soir pour avoir manifesté place de la République en marge de la COP21. Elle raconte au JDD les 24 heures de sa garde à vue, un peu musclée en raison de l'état d'urgence en vigueur.

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Plusieurs débordements ont lieu dimanche place de la République, à Paris.
Plusieurs débordements ont lieu dimanche place de la République, à Paris. © Reuters

"Une manifestation contre un grand sommet inutile"

"Je suis militante à Solidaires Etudiant-e-s . Avec ce syndicat étudiant, j'ai décidé de participer à une manifestation dimanche, place de la République, à Paris. Ce rassemblement était prévu depuis longtemps. Ce devait être 'la marche pour le climat' annulée après les attentats. Mais, dans le contexte actuel, l'opinion publique doit savoir qu'une énième réunion des chefs d'Etat et de gouvernement ne va pas changer les choses. Ce grand sommet inutile n'inversera pas le réchauffement climatique. Un mouvement de contestation très fort est donc nécessaire. Le peuple en a marre des dirigeants qui ne servent à rien. Faire une COP21 avec le soutien de multinationales qui ne sont pas la solution mais le problème est assez ridicule."

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"Il n'y avait pas de 'Black Blocs' dans notre groupe"

"Dimanche après-midi, nous étions d'abord dans un cortège qui tournait autour de la place de la République. Nous avons essayé partir en manifestation, mais un cordon de CRS a bloqué notre mouvement. Il n'y avait pas de 'Black Blocs', ni d'éléments violents dans notre groupe. Je n'ai pas été témoin des manifestants qui lançaient sur les CRS des bougies en mémoire des victimes des attentats autour de la statue de la République. Il s'agissait d'une minorité. Il y a une stratégie de communication d'assimiler la majorité à quelques personnes qui n'ont pas de morale.

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Tout à coup, sans que j'entende de tirs de sommation - ce qui n'est pas réglementaire -, les forces de l'ordre ont balancé du gaz lacrymogène. Nous nous sommes dispersés. Mais nous n'avons pas pu quitter la place : le métro était fermé et les accès aux rues extérieures bloqués. Il y avait du lacrymo de partout, il fallait donc qu'on sorte. Nous nous sommes alors rapprochés du NPA (le Nouveau parti anticapitaliste) et d'Alternative libertaire, des organisations qui auraient pu négocier avec les policiers. Mais ces derniers n'ont rien voulu entendre. Ils nous ont rassemblé dans un coin de la place. C'était violent. Je n'arrivais plus à respirer, un camarade a fait un malaise. Et, coincés dans l'angle d'une rue, nous avons été interpellés."

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Les images diffusées par la préfecture de police qui montrent les débordements de dimanche et des 'Black Blocs' autour de la statue centrale de la place : 


"Les policiers ont mis du temps à gérer les 370 manifestants embarqués"

"Deux cars nous ont emmenés au commissariat Marx Dormoy, dans le 18e arrondissement à Paris. Il y avait une très bonne ambiance dans le bus, on se disait que ça n'allait qu'être qu'un contrôle d'identité et qu'on allait être relâchés dans la soirée. Nous avons attendu plus d'une heure avant d'être officiellement mis en garde à vue. Il y avait eu beaucoup trop d'interpellations et les policiers ont mis du temps à gérer les 370 manifestants embarqués. Le motif de ma garde à vue était 'participation à un rassemblement illégal avec refus de dispersion après sommation'. Or, à titre personnel, je n'ai jamais entendu de sommation.

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Lire : La police déployée en mode "tolérance zéro" pour la COP21

Les officiers de police judiciaire nous ont mis la pression pour ne pas faire appel à notre avocat afin de gagner du temps et de sortir plus vite. Ça a marché sur moi et j'ai fait le choix d'être entendue sans conseil. Mon audition a duré de 3h30 à 5h25 du matin - j'ai d'ailleurs raté le repas qu'ils ne nous ont distribué que vers 4 heures du matin. Certaines auditions se sont déroulés normalement, d'autres sont tombés sur des agents très agressifs. Un des manifestants que je connais s'est fait ainsi insulter par un policier qui a déclaré, devant lui, à un collègue : 'J'espère qu'il s'est pris des gros coups dans la gueule celui-là.' Personnellement, le policier qui m'a interrogée a tenté de me manipuler pour me faire dire des choses. Il voulait connaître les détails sur l'organisation de la manifestation, savoir si je faisais partie d'un groupuscule."

"Nous n'avions qu'une seule peur : que la garde à vue soit prolongée"

"Quand je suis revenu en cellule, je croyais que j'allais sortir rapidement. En fait, nous sommes restés 24 heures en garde à vue, jusqu'à 15h45. Le dimanche soir, nous étions vingt femmes dans la cellule, plusieurs d'entre nous étions par terre. Il faisait froid et plus aucune couverture ne semblait disponible. Dans la nuit, ils ont opéré à un transfert de manifestants vers d'autres commissariats. Nous n'étions plus que trois pour la journée de lundi. Nous n'avions qu'une seule peur : que la garde à vue soit prolongée, comme l'autorise l'état d'urgence. Maintenant, je vais échanger avec l'avocat de notre syndicat étudiant. Puis je vais attendre ma convocation. Soit je serai disculpée, soit il y aura un rappel à la loi, soit une peine réelle. Nous ne pouvons pas risquer plus de six mois de prison avec sursis."

Lire : Les écolos craignent que les activistes climat fassent les frais de l'état d'urgence

Source: leJDD.fr

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