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MAROC

Deux migrants morts asphyxiés près de Ceuta : "Une bavure des forces de l’ordre marocaines"

Nos observateurs nous ont envoyé ces photos de "Vapeur" et "Le Bire", les deux jeunes qui ont trouvé la mort après l'intervention des forces de l'ordre.
Nos observateurs nous ont envoyé ces photos de "Vapeur" et "Le Bire", les deux jeunes qui ont trouvé la mort après l'intervention des forces de l'ordre.
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Nos observateurs rapportent ce qu’ils décrivent comme une bavure commise lundi dans la forêt de Fnideq, près de l’enclave espagnole de Ceuta. Deux Camerounais auraient trouvé la mort, asphyxiés dans une grotte, après que les forces de l’ordre marocaines ont incendié leur campement.

Deux ressortissants camerounais sont morts lundi 30 novembre lors d’une opération d’évacuation d’un campement de migrants dans la ville de Fnideq, au Maroc, à 7 kilomètres de Ceuta. Selon des migrants qui ont été témoins de la scène, les deux jeunes s’étaient cachés dans une grotte pour fuir les agents marocains. Mais lors de l'intervention, les forces de l’ordre - la police ou des auxiliaires de l’armée, selon les sources - auraient mis le feu à des matelas et des couvertures à l’entrée de la grotte, sans vérifier si celle-ci était bien vide. Piégés par les flammes, les deux jeunes seraient alors morts asphyxiés.

Pierre est un migrant camerounais qui vit dans un campement de fortune dans la forêt de Fnideq. Lundi, il a été témoin de l’intervention de police. Pour lui, il s’agit bien d’une bavure.

"On les surnommait Vapeur et Le Bire, ils avaient 23 et 24 ans"

Nous avons l’habitude que les forces de l’ordre viennent dans notre camp pour tenter de nous expulser. Dimanche, personne n’est venu, nous avons baissé la garde. Mais lundi matin, nous avons été pris par surprise. Quand la police est arrivée, deux jeunes sont partis se cacher dans une petite grotte. La police a l’habitude de brûler les affaires que nous laissons derrière nous… ils ont donc mis le feu aux matelas et aux couvertures qui étaient à l’entrée de la grotte. Je suis sûr et certain qu’ils ont vu les deux jeunes entrer dans la grotte.

Le site internet Ceutaldia est allé vérifier la présence des corps dans la grotte.

"Ceux qui sont allés informer la police ont été arrêtés et expulsés"

Il y a eu beaucoup de fumée et une odeur étrange… Quand la police est partie, je suis entré dans la grotte, j’ai mis un chiffon sur mon nez et j’ai essayé de voir ce qu’il y avait à l’intérieur. C’est là que j’ai vu un corps… J’ai directement fait demi-tour. On m’a ensuite dit qu’il n’y avait pas un mais deux corps. Les deux jeunes qui sont décédés se surnommaient  "Vapeur" et "Le Bire", ils avaient 23 et 24 ans.

Mardi matin, huit migrants présents dans la forêt se sont rendus au poste de police pour les informer de la situation. Ils se sont tous faits arrêter pour être expulsés...

Dans l’après-midi, la police et les secours sont revenus en forêt. Je me suis à nouveau caché. Certains migrants m’ont dit que la police les a accusés d’avoir eux-mêmes fait un feu devant la grotte et donc d’avoir tué leurs propres camarades. Je n’y crois pas. 

Notre observatrice Helena Maleno est bénévole dans l’association espagnole "Caminando fronteras" basée près de Tanger. Depuis quelques mois, elle observe une augmentation des violences policières contre les migrants.

"Même la population locale ne supporte plus les violences faites aux migrants"

Plusieurs migrants, témoins de l’intervention de police qui a coûté la vie à deux jeunes, nous ont appelés. Tous ont raconté la même histoire. Pour le moment, il est impossible de savoir s’il s’agit d’un accident ou pas, mais ils disent que les deux migrants sont morts asphyxiés dans la grotte. Selon certains témoins, il ne s’agirait pas de la police mais des forces auxiliaires (militaires).

Ce qui est sûr, c’est que les violences policières lors des expulsions ne se passent pas seulement en forêt ! Elles se multiplient dans la région, près de Ceuta, et sont souvent très violentes. Cela fait quelques mois que l’on craint un dérapage. En plus c’est totalement incohérent… ici la population locale est prête à intégrer les migrants et ne supporte plus les violences qui leurs sont infligées.

Ceuta, route de l’immigration africaine

La cellule de communication de la direction générale de la sûreté nationale marocaine nous a confirmé qu’une enquête était en cours, mais n’a pas souhaité nous donner plus de précisions.

Le Maroc doit faire face à l’afflux de milliers de migrants. Le pays est l’une des principales routes de l’immigration africaine vers l’Europe, notamment à cause de ses frontières communes avec les enclaves espagnoles de Ceuta et Melilla. Dans la région de Tanger, de nombreux migrants campent illégalement dans les forêts qui bordent Ceuta en attendant de tenter leur chance vers l’Europe.

Pour passer, plusieurs solutions périlleuses s’offrent à eux : escalader les hauts grillages qui bordent les enclaves, ou emprunter la voie maritime, parfois à la nage, pour contourner la barrière. En novembre dernier, pour l'émission Ligne Directe, nous avions rencontré dans un campement en forêt un migrant guinéen, Mamadou Diallo. Il nous avait confié avoir tenté de passer en Europe plus de quatorze fois.

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