Menu
Libération
Régionales

Retrait, fusion, maintien... Ce qui attend la gauche dimanche soir

Régionales 2015dossier
Jamais le Parti socialiste n'aura été soumis à un dilemme aussi difficile que pour ces élections régionales. Passage en revue des options possibles ce dimanche soir.
par Lilian Alemagna
publié le 6 décembre 2015 à 16h00
(mis à jour le 6 décembre 2015 à 18h14)

«Une soirée de nerf et de sang-froid». C'est ce qui attend, pour reprendre l'expression d'un haut dirigeant socialiste, la direction du PS ce dimanche. Une fois les premiers résultats connus et les tendances dans les régions à fort risque Front national analysées au cours d'un bureau national (BN) exceptionnel convoqué à 21h30, il sera temps pour Jean-Christophe Cambadélis et les siens de se prononcer sur la conduite à tenir s'ils ne veulent pas voir une, deux ou trois régions basculer dimanche prochain dans l'escarcelle du FN. Le premier secrétaire du PS a prévu de parler à 22h30 depuis le siège du PS, rue de Solférino. Avant ça, il devrait s'entretenir avec ses têtes de liste pour éviter une communication chaotique.

La règle de base

Sur le papier, elle est simple : «la gauche doit se rassembler» en vue du second tour le 13 décembre et «tout faire» pour «empêcher le Front national de l'emporter». Lorsqu'une liste des socialistes et de leurs alliés arrivera troisième ce dimanche soir – derrière l'extrême droite et la droite – leurs dirigeants regarderont de très près les résultats. Si les listes de l'alliance LR-UDI-Modem sont devant le FN, pas de danger, les socialistes se maintiendront au second tour pour tenter, après fusion avec les écologistes et le Front de gauche, de doubler la droite sur le fil grâce à leurs réserves de voix. En revanche, si les listes du parti de Marine Le Pen arrivent largement en tête, là, c'est une autre histoire.

L’astuce du «total gauche»

Puisque les socialistes n'ont pas réussi à convaincre leurs alliés EE-LV et PCF à s'unir dès le premier tour dans les régions à fort risque FN – comme Paca ou Nord-Pas-de-Calais-Picardie – Cambadélis ne cesse de parler depuis plusieurs semaines de «total gauche». Ainsi, le patron du PS compte additionner les listes PS, écolos et Front de gauche et comparer le résultat avec celui des listes LR-UDI-Modem arrivées devant. L'option, par exemple, pourrait se présenter dans le Nord où les listes de Pierre de Saintignon (PS), Sandrine Rousseau (EE-LV - Parti de gauche) et Fabien Roussel (PCF - Front de gauche) devraient, à eux trois, arriver devant celle de Xavier Bertrand. Cambadélis ne manquera d'appeler Bertrand à se désister. Mais l'ex-ministre de Sarkozy, arrivé deuxième, n'acceptera jamais de se désister, suivant la consigne de son parti : «ni» FN, «ni» PS et aucun changement de liste entre les deux tours.

L’option difficile du retrait

C'est aussi une tradition socialiste : lorsque le Front national peut l'emporter dans une élection et que la liste de gauche est en ballottage défavorable derrière une autre liste dite «républicaine», elle se retire et appelle à «faire barrage à l'extrême droite» en utilisant «l'autre bulletin de vote».

Mais ce scénario dit du «désistement républicain» est beaucoup plus facile à faire accepter lors d'élections au scrutin uninominal – législatives ou lors des dernières départementales – que lors de proportionnelles de listes comme c'est le cas pour ces régionales. Or, avec ce mode de scrutin, un retrait de liste signifie l'absence pour six ans de tout élu de gauche dans les assemblées locales. Une situation inacceptable pour les socialistes locaux qui ne veulent pas «disparaître» de leurs régions, d'autant plus quand, ont-ils répété durant la campagne, «la droite extrême parle comme l'extrême droite».

Pourtant, c'est l'option que devrait privilégier ce dimanche la direction PS, qui ne peut expliquer, d'un côté, qu'elle ne «laissera pas de région au FN», et ne pas prendre ensuite la responsabilité de retirer ses listes. Après avoir semblé enterrer cette option en septembre, Cambadélis devrait faire entériner ce choix par un vote ce dimanche soir en bureau national. De quoi prendre en étau ses têtes de liste : d'un côté ils seront poussés au retrait par Paris, de l'autre leurs militants feront tout pour que leur liste se maintienne. Le PS a déjà connu un avant-goût de la soirée qui les attend : en 2014, lors des municipales, plusieurs de leurs têtes de liste avaient eu du mal à choisir entre le retrait (Fréjus, Brignoles…) ou le maintien (Béziers, Beaucaire…). La différence avec ce soir : à l'époque, une poignée de villes étaient concernées; ce soir, la question peut se poser dans trois à quatre régions.

Le jamais vu d’une fusion gauche-droite

L'option a été posée sur la table par Manuel Valls : s'il faut «tout faire» pour faire barrage au FN dans ces élections régionales, le Premier ministre n'a pas exclu l'option «fusion». Un «front républicain» au vrai sens du terme qui verrait les listes de gauche rejoindre celles de droite dans les régions où l'extrême droite pourrait l'emporter. Et tant pis si cela donne raison à Marine Le Pen et les siens qui ne cessent de dénoncer depuis des années la «caste UMPS» à longueur de tracts et de meetings. Pour l'instant, ce scénario a été repoussé par tout le monde. Tant par la direction du PS qui ne peut se permettre de se ranger derrière des personnalités très marquées à droite comme Xavier Bertrand dans le Nord et Christian Estrosi dans le Sud.

Mais aussi et surtout côté LR, où il n'est pas question d'offrir de la place à la gauche sur leurs listes. Reste une option : un nouveau chef de file qui viendrait réussir une improbable synthèse. Pour le Nord, certains responsables PS rapportent que des «discussions» ont eu lieu entre les socialistes locaux et la centriste Valérie Létard pour une très hypothétique «fusion technique» – c'est-à-dire sans accord de gestion dans les conseils régionaux. Mais, là encore, la tête de liste régionale, Xavier Bertrand, ne l'acceptera pas et les directions nationales, LR et PS, non plus.

Pour aller plus loin :

Dans la même rubrique