Le premier A 320Neo sera livré d'ici la fin de 2015 à Qatar Airways ou Lufthansa.

Le premier A 320Neo sera livré d'ici la fin de 2015 à Qatar Airways ou Lufthansa.

A.Doumenjou/Airbus

1007 commandes engrangées depuis le 1er janvier 2015.Airbus a franchi un seuil symbolique, le 30 novembre, loin devant son concurrent américain Boeing qui affiche 568 commandes nettes au 2 décembre. Une jolie performance pour l'avionneur européen, après deux années record (1456 commandes en 2014 et 1503 commandes en 2013).

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C'est toujours la famille A 320, celle des moyen-courriers, qui porte le succès d'Airbus: 876 commandes depuis le début de l'année, contre moins de 400 pour le 737 de Boeing. Une des clés de la suprématie d'Airbus sur ce segment de marché réside probablement dans sa politique moteurs: "Contrairement à Boeing, Airbus propose aux compagnies le choix entre deux motoristes, explique Philippe Plouvier, managing partner au Boston Consulting Group. Un motoriste leader, le franco-américain CFM, et un challenger, Pratt&Witney, qui se montre très agressif pour pénétrer le marché." Cela permet de tirer les prix vers le bas, un effet non négligeable quand on sait que les moteurs pèsent pour un quart dans le prix de l'avion...

Les A 320 se vendent tellement bien qu'Airbus a décidé d'augmenter la cadence de production de ces appareils, de 42 exemplaires par mois actuellement, à 60 exemplaires par mois à la mi-2019. A cet horizon, l'usine de Hambourg en fabriquera 36 chaque mois, celle de Toulouse, 16, Tianjin (en Chine) 4 et Mobile (aux Etats-Unis), 4. Une montée en cadence qui devra s'accompagner d'un "switch" entre les A 320 Ceo ("classic engine option"), jusque-là majoritaires dans la production, et les A 320 Neo ("new engine option"), dont la première livraison devrait intervenir d'ici à la fin de cette année.

Un vrai défi pour le constructeur. Car si Airbus fait la course en tête sur les ventes, il fait moins bien que Boeing sur le front des livraisons: 556 contre 709 chez son concurrent depuis le début de l'année. Or comme le rappelle un expert du secteur, "ce sont les livraisons qui font le chiffre d'affaires, et la rentabilité". Et sur ce plan Boeing est encore plus performant qu'Airbus, qui vise un nombre de livraisons au moins équivalent à 2014 en 2015, soit au moins 630. Enfin, sur le créneau des ventes de longs-courriers, très lucratif, l'Américain mène toujours la danse, notamment avec son produit phare le 777. Depuis deux ans, les commandes de l'A 350, le dernier-né d'Airbus, sont à la peine, mais elles flirtent quand même avec les 800 unités et "l'enjeu était surtout de réussir les premières livraisons (depuis décembre 2014, NDLR) et la mise en exploitation de l'appareil", souligne Philippe Plouvier.

Le vrai point noir de cette moisson 2015, c'est l'A380: pas une vente depuis le début de l'année. Les allers-retours d'Airbus au sujet de sa stratégie pour le super-jumbo ne contribuent pas à l'image du produit. Fin 2014, l'avionneur affirmait qu'il lancerait un A 380 Neo. Cet automne, en revanche, il a temporisé, évoquant un appareil "de type A380 Neo entre 2020 et 2025". Seul le principal client de l'A380, la compagnie Emirates, presse Airbus de se lancer. "Le marché est très étroit et il faut trouver un partenaire motoriste prêt à participer à un tel projet", note Philippe Plouvier.

La chute des prix du pétrole, au plus bas depuis sept ans, ne milite pas non plus pour un investissement coûteux dans une motorisation améliorée. Et l'A380 reste un appareil compliqué à opérer pour les compagnies aériennes, en termes de remplissage, de maintenance et d'accueil dans les aéroports. "La famille A 350 est beaucoup plus prometteuse, estime le consultant, avec un potentiel de volume supérieur." Petit à petit, Airbus familiarise le marché avec l'idée que l'A 380 n'est pas nécessaire à sa réussite économique et financière, et que la sous-performance du super jumbo n'empêchera pas l'avionneur d'atteindre ses objectifs de rentabilité. Il est vrai que l'appareil représente moins de 10% de sa production totale. Dix ans après son premier vol, l'A 380 a du plomb dans l'aile...

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