LAICITE Latifa Ibn Ziaten, mère d’une victime de Merah, sifflée à l’Assemblée

Elle témoignait hier soir lors des Rencontres de la laïcité du groupe socialiste. Jean Glavany, qui organisait cet événement, minimise l'incident et parle de "deux participants vulgaires et agressifs".
Xavier FRERE - 08 déc. 2015 à 21:06 | mis à jour le 08 déc. 2015 à 21:07 - Temps de lecture :
Latifa Ibn Ziaten, la mère d'un des trois soldats tués à Montauban le 11 mars 2012 par Mohamed Merah. Photo DR
Latifa Ibn Ziaten, la mère d'un des trois soldats tués à Montauban le 11 mars 2012 par Mohamed Merah. Photo DR

Que s’est-il exactement passé hier dans la salle Victor-Hugo de l’Assemblée nationale lors des Rencontres de la laïcité, organisées par le groupe socialiste ? En fin d’après-midi, Latifa Ibn Ziaten, la mère d'un des trois soldats tués à Montauban, le 11 mars 2012 par Mohamed Merah, a été huée et sifflée par des participants.

La raison ? « Le port du voile », d’après plusieurs journalistes présents. Après leur esclandre, ces personnes ont bruyamment quitté la salle de conférence où le thème était « La laïcité, défense et promotion des droits universels ».

« Un ou deux cons » selon Jean Glavany

Jean Glavany, à l’origine de ces Rencontres, nous a expliqués hier soir l’incident : « Il y a eu un ou deux cons -je le dis franchement- très minoritaires, deux types sur les deux cents dans la salle, qui ont souhaité qu’elle réponde sur le voile. Ils étaient vulgaires et agressifs. Mais ce n’était pas prévu qu’elle réponde, elle devait s’en aller…Je les ai quasiment mis dehors ».

Ces deux personnes ont ensuite quitté la salle. « Exaspéré », par l’attitude de ces deux participants qu’il « cherche à identifier », Jean Glavany a préféré clôturer les débats sans redonner la parole à Latifa Ibn Ziaten. Mais, contrairement à ce que certains témoins ont raconté dans un premier temps, notamment sur les réseaux sociaux, « ce ne sont pas des députés », assure le député des Hautes-Pyrénées. « Aucun député ne ferait un incident de ce type, ce sont des gens qui se sont inscrits sur une liste… »

Son invitation ? « C’est presque une provocation de ma part »

Sur la présence même de Latifa Ibn Ziaten à ces Rencontres sur la laïcité, Jean Glavany assume : « Au moment où la religion musulmane était dans la tourmente, ça avait un sens qu’elle vienne, elle qui est victime du terrorisme et qui passe sa vie à défendre les valeurs de la République. Cela avait une valeur symbolique très forte, et d’autre part, comme elle porte le voile, et comme dans le monde laïc, beaucoup de gens ont une réticence à cet égard, je voulais qu’elle s’en explique… Ce n’est pas interdit dans l’espace public comme à l’Assemblée nationale ».

Il ne cache pas qu’il voulait « affronter le problème » de la présence du voile dans un tel débat, « c’était presque une provocation de ma part ». Latifa Ibn Ziaten a expliqué qu’elle portait le voile -ou plutôt "le foulard"- parce qu’elle portait le deuil de son fils Imad, alors militaire et première victime de Mohamed Merah.

Les réseaux sociaux s'insurgent

Sur les réseaux sociaux, hier soir, une avalanche de commentaires dénonçait l’attitude « insupportable » de ces personnes vis-à-vis d’une mère qui s’implique aujourd’hui beaucoup dans la lutte contre la radicalisation. Jean Glavany, lui, se montrait écoeuré après cet incident : « Il ne faut pas que des gens de gauche emboitent le pas du Front national à ce point, c’est délirant, c’est l’absence de lucidité démocratique et républicaine ».

L’énoncé de cette journée était justement de ne pas laisser « le Front national effectuer un rapt de la laïcité pour la détourner de son sens et n’en faire qu’un combat contre l’islam »...

Le 19 novembre dernier, Latifa Ibn Ziaten, avait reçu le prix de la Fondation Jacques-Chirac pour la prévention des conflits, pour son action de promotion d’un dialogue inter-religieux et d’une culture de la paix.