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Billet de blog 20 janvier 2014

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La leçon de ''Racine''

Elle est donnée dans le communiqué de ce collectif d'enseignants appartenant à la mouvance du « Rassemblement Bleu Marine », qui s'en prend à l'exclusion de deux élèves de terminale ES pour ''quenelle photographique''.

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Elle est donnée dans le communiqué de ce collectif d'enseignants appartenant à la mouvance du « Rassemblement Bleu Marine », qui s'en prend à l'exclusion de deux élèves de terminale ES pour ''quenelle photographique''.

Pourtant à l'évidence fort éloigné de Jean Racine, d'« Esther et Athalie » et des demoiselles de Saint-Cyr, ce collectif a pris le nom du dramaturge pour jouer de son homonymie avec le mot « racine ». Il prétend ''faire la leçon'' aux auteurs de l'exclusion et plus généralement à la majorité des « membres de l'institution scolaire » ; mais la rhétorique et le type d'argumentaire mis en œuvre dans ce communiqué en disent moins sur l'affaire de l'exclusion elle-même que sur la nature profonde du ''collectif Racine'' lui-même, et nous donnent une ''leçon'' sur ce qu'il est et à quoi il appartient. Le communiqué mérite donc d'être longuement cité dans ''sa forme originale'' ( à méditer...).

« Sous le climat créé par la charge tout à la fois grotesque, illégale et liberticide que le ministre de l’Intérieur a cru devoir lancer contre l’humoriste Dieudonné, deux élèves ont été placé en garde à vue, le parquet d’Evry ouvrant une enquête (?!!), puis exclus définitivement du Lycée Rosa Parks de Montgeron dans l’Essonne, à la suite d’un dépôt de plainte de leur professeur d’histoire, Mme Volcot-Cohen, pour « quenelle photographique » [...] Si quelques voix de professeurs se sont élevées contre cette décision, principalement sur les réseaux sociaux, elle reçoit par le silence l’assentiment de la majorité des membres de l’institution, quand ce n’est un soutien déclaré […]. Le Collectif Racine remarque d’abord le caractère exorbitant d’une telle sanction pour un geste dont il ne s’épuisera pas à interpréter la signification, jugeant simplement que seuls certains esprits perturbés de la Licra et du Crif peuvent l’assimiler à un « salut nazi inversé ». Il remarque aussi que le salut en question n’est pas proscrit par la loi. Il juge encore que la célérité et la sévérité à l’œuvre ici contrastent avec le laxisme général régnant dans l’institution : lenteur des procédures, mollesse des sanctions, maintien dans les classes d’élèves ayant perpétré des violences, lancé des insultes, commis des délits. Le Collectif Racine s’alarme enfin de la pente orwellienne dévalée par le gouvernement qui, d’un côté, n’a que les « valeurs de la république » à la bouche et, de l’autre, s’engage dans des démarches liberticides ; qui, d’un côté, relâche les délinquants à tours de bras et, de l’autre, fait montre d’une grande brutalité, en paroles et en actes, contre ses opposants ; qui, d’un côté, tremble devant les banlieues communautarisées et, de l’autre, abat une main de fer contre un humoriste et d’inoffensifs potaches. Le Collectif Racine, s’inquiétant d’une dérive qui nous ramène aux « heures-les-plus-sombres-de-notre-histoire » (pour reprendre une expression chère aux bien-pensants), rappelle l’institution à ses devoirs formels : réserve, neutralité, légalité, ainsi qu’aux exigences non écrites qui doivent inspirer ses décisions : sens de la mesure, proportionnalité des sanctions, hiérarchisation des maux qui affectent l’institution ».

En raison de l'importance qu'elle lui accorde, la présidente du Front national Marine Le Pen avait clôturé le 12 octobre dernier la conférence de lancement du "collectif Racine" en soulignant qu'une telle initiative était « inimaginable il y a quelques années », signe que « la bien-pensance recule » et que « les professeurs sont comme les autres citoyens ». On comprend qu'elle puisse être satisfaite de l'existence du ''collectif Racine'' et de son mode opératoire. Quelle leçon ! 

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