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état d'urgence

Le Conseil d’Etat valide les assignations à résidence de sept écologistes

La plus haute juridiction administrative française a tout de même émis quelques réserves et chargé le Conseil constitutionnel d’examiner le régime des assignations.
par Pierre Alonso
publié le 11 décembre 2015 à 19h56
(mis à jour le 11 décembre 2015 à 21h13)

Leurs assignations à résidence devaient se terminer samedi en même temps que la COP 21. Vendredi, le Conseil d’Etat, plus haute juridiction administrative, a examiné leurs recours contre cette mesure de privation de liberté et a validé les assignations à résidence. La plus haute juridiction administrative française a tout de même émis quelques réserves et chargé le Conseil constitutionnel d’examiner le régime des assignations. En attendant que cette question prioritaire de constitutionnalité soit examinée, le Conseil d’Etat a également demandé aux tribunaux administratifs d’exercer un contrôle plus étroit, via les procédures de «référé», c’est-à-dire d’urgence.

Depuis deux semaines, ces sept militants écologistes pointent trois fois par jour au commissariat, doivent rester chez eux entre 20 heures et 6 heures et ne peuvent quitter leur commune (Rennes pour cinq d’entre eux, deux villes en région parisienne pour les autres). Militants écologistes ? L’exécutif leur dénie cette qualité, Cazeneuve parlant de «casseurs» et Valls de «militants qui pouvaient représenter un vrai problème par rapport à l’ordre public».

Pour les autorités, le moindre trouble survenant pendant la COP risquait de détourner les forces de sécurité de leur mission de lutte contre la menace terroriste, ce qui justifiait donc ces mesures préventives. Un principe «opérationnel et fonctionnel» qu’a reconnu et endossé le rapporteur public du Conseil d’Etat, niant un «effet d’au­baine [dont l’exécutif] tirerait argument pour éviter tout risque de débordement». Les avocats des militants contestaient vivement que les mesures permises par l’état d’urgence ne se bornent pas aux motifs ayant présidé à son instauration : «Les assignations à résidence doivent être limitées aux menaces terroristes. Aujour­d’hui, ce sont les militants écologistes, demain les étudiants et les syndicats revendicatifs», a plaidé Me Garreau.

Marie (1), assignée à Rennes, ne plaçait pas grand espoir dans ce recours : «Le Conseil d’Etat, c’est une grosse farce.» Celui-ci ne les avait pas entendus à Rennes, rejetant leur recours au motif que l’urgence n’était pas caractérisée. «La liberté d’aller et venir est gravement mise en cause et il n’y aurait pas d’urgence ?» a feint de s’interroger Me Garreau.

Le rapporteur public a abondé dans le même sens, signalant son «profond désaccord avec les juges des référés» : «Par leur nature et leurs effets, les mesures d'assignation à résidence créent une situation d'urgence.» Autrement dit, les tri­bunaux administratifs ­devraient, comme le demande le Conseil d'Etat, consentir à examiner les recours très rapidement. En revanche, il a rappelé que l'utilisation de «notes blanches», ces documents non-signés et non-datés émanant des services de police ou de renseignement, ne posaient aucune difficulté. «L'administration se justifie avec des notes qu'elle produit elle-même», a répliqué Me Spinosi, représentant de la Ligue des droits de l'homme.

(1) Prénom modifié

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