Les mondes de l'islam 1/10 : où vivent les musulmans

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Les mondes de l'islam 1/10 : où vivent les musulmans

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Carte. Ils sont 1,6 milliard, répartis sur tous les continents. Les musulmans se distinguent les uns des autres par l’origine géographique, la langue, la culture, la pratique religieuse... ou l’absence de pratique. Où vivent-ils, et quelle part de la population représentent-ils dans chaque pays ?

 Circulez dans la carte, zommez et dézoomez avec le bouton +/- pour voir d'autres pays, survolez ou cliquez sur les données pour obtenir des précisions sur chaque cas (nombre absolu et part dans la population) :

Source : Pew Forum on Religious & Public Life, Muslim population by country, 2011 : chiffres de 2010, à partir des recensements et données de chaque Etat. Est comptabilisé l'attachement à l'islam des individus, en tant que composante culturelle et historique.

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Quelques considérations globales

Un cinquième de la population est musulmane.
L'islam est la 2e religion en nombre d'individus derrière le christianisme. Dans 49 pays, la majorité de la population est musulmane.
20% des musulmans vivent dans des pays arabes. L’islam est la religion du monde qui augmente le plus vite_,_ avant tout à cause du rythme de la transition démographique dans les pays à majorité musulmane par rapport au reste du monde. Cette progression démographique est cependant aujourd'hui à relativiser. Comme le démontre le démographe Youssef Courbage (Le rendez-vous des civilisations, avec Emmanuel Todd, Seuil, 2007), la fécondité s'effondre dans le monde musulman depuis une trentaine d'années. "De 6,8 enfants par femme en 1975, la moyenne est tombée à 3,7 en 2005. L'indice de fécondité est désormais le même en Iran et en Tunisie qu'en France". Principalement dû aux irrésistibles progrès de l'alphabétisation des femmes, ce contrôle des naissances est "à la fois le symptôme et le levier d'une large transformation anthropologique" des pays musulmans modernes.

 Les 5 pays où la part de musulmans dépasse les 99%

  • Maroc : 99,9%
  • Afghanistan : 99,8%
  • Tunisie : 99,8%
  • Iran : 99,7%
  • Mauritanie : 99,2%

Quelques considérations locales

7,6 enfants par femme au Niger et 1,7 en Azerbaïdjan ; 15% de musulmans en Inde et 99% en Irak ; 54% de polygamie au Burkina-Faso et 70% de matrilocalité dans le nord de Sumatra... Ces disparités locales appellent une analyse découpée par grandes zones culturelles :

  • L'espace arabo-musulman : Le noyau central du "domaine de l'islam" défini en quelques décennies du VIIe siècle perdure jusqu'à aujourd'hui. 97% des Arabes sont musulmans. La fécondité y a été amputée de moitié en une génération (de 7,5 à 3,6 enfants par femme entre 1975 et 2005), avec cependant de fortes disparités entre Maghreb (taux semblables aux taux européens), péninsule arabique (6,2 enfants par femme au Yémen), et Machrek (disparités démographiques internes entre sunnites et chiites au Liban ou en Syrie).
  • L'espace turco-indo-persan : Cette zone est caractérisée à la fois par un nombre important de musulmans (taux de fécondité élevé), et par un éclatement ethnique et religieux, les populations musulmanes s'étant insérées dans de grands empires multiethniques, multiconfessionnels et multiculturels (Inde, Bangladesh, Pakistan...) 
  • L'espace sahélo-soudanais : Dans cet ensemble anciennement islamisé, de l'ouest sénégalais à la Corne orientale de l'Afrique, les voies de pénétration de l'islam sont passées par les savanes ouest-africaines, le désert du Sahara, la mer Rouge et les comptoirs arabes le long de l'océan Indien. Longtemps réservé à une élite urbaine, l'expansionnisme arabe et peul ont peu à peu imposé l'islam en opposition aux colonisations européennes. La fécondité y est encore très élevée, la transition démographique n'en étant encore qu'à ses débuts.
  • L'espace malayo-indonésien : La structure familiale y dévie du modèle standard moyen-oriental patrilinéaire, patrilocal, et patriarcal. Tardivement et pacifiquement islamisés, Java, la Malaisie, le sud de Sumatra voient la famille de la femme prédominer dans la vie sociale. La naissance d'une fille y est valorisée, et leur scolarisation est supérieure à celle des garçons. Dans le plus grand pays d'islam, l'Indonésie, l'indice de fécondité, qui varie de 2,28 à 2,48 enfants par femme selon les estimations, signe une transition démographique achevée. En Malaisie, la forte fécondité des musulmans n'est pas un effet du sous-développement, mais participe d'une revendication communautaire.

Les divergences sont telles entre ces espaces culturels que l'on peut douter de l'idée selon laquelle l'islam influencerait la démographie : d'un pays à l'autre, l'éventail des taux de fécondité à travers le monde est aussi large que l'application de la Charia ou d'une éducation religieuse, qui seront les thèmes des épisodes à venir de cette collection. Si en Islam on ne trouve pas d’unité jusqu'au cœur fondamental de la structure familiale, comment continuer d’accréditer l'idée d'un "choc des civilisations", irréductibles et antagonistes, que recouvre la notion-même de "civilisation" ?

La polygamie

L'importante polygamie actuelle dans des pays africains et musulmans, comme le Mali ou le Burkina-Faso, n'a que peu à voir avec l'islam : en Mauritanie par exemple, le taux de polygamie des groupes musulmans est bien inférieur à celui des groupes sub-sahariens animistes ou chrétiennes (Musulmans 4%, alors que Wolof 33% ou Soninké 55% - chiffres de 2001). Globalement, dans le monde musulman arabe, la polygamie est une pratique minoritaire, touchant entre 5 et 10% des femmes. En Afrique ou en Asie, l'islam a progressé dans un univers anthropologique où les systèmes familiaux étaient constitués et différenciés bien avant l'arrivée de cette religion.

A écouter sur France Culture :

27/10 -

8 min

Histoire de l'Islam

59 min