Il y a moins de trois mois, dans un entretien au Monde, Xavier Bertrand affirmait qu’il maintiendrait sa candidature à la primaire pour la présidentielle de 2017 s’il emportait la région Nord-Pas-de-Calais-Picardie, pour « défendre ses idées ». « Si je m’engage pour cette élection, c’est aussi pour être le porte-parole au niveau national des 6 millions d’habitants de ma région », justifiait le candidat Les Républicains (LR). Puis Xavier Bertrand a fait campagne. Une campagne « dure », qu’il dit avoir prise « un peu comme un coup de poing en pleine figure » et qui a « changé à jamais [sa] façon de faire de la politique ». Il a parcouru son immense région, éprouvé le désenchantement lourd de ses habitants.
Au cours de ses meetings, animés debout au milieu des électeurs, sans estrade, il a promis qu’il « serait avec eux pendant six ans ». Après le premier tour des régionales, qui a confirmé qu’il affronterait bien la présidente du Front national (FN), Marine Le Pen, lors d’un duel au second, Xavier Bertrand a affirmé qu’il n’était « plus certain » d’être candidat à la primaire.
Elu très largement à la tête du Nord-Pas-de-Calais-Picardie le 13 décembre, avec plus de 57 % des voix, il a finalement confirmé, lundi 14 décembre sur France 2, son retrait de la course à l’investiture à droite pour la prochaine présidentielle. Une décision « irrévocable », a-t-il précisé, affirmant avoir décidé de se « consacrer pleinement à la région ».
« Concrètement, je vais quitter mes fonctions de député de l’Aisne et de maire de Saint-Quentin. Pourtant j’aime ma ville profondément. J’ai décidé, aussi, de ne pas être candidat à la primaire de la droite et du centre. »
« Je ne suis pas légitime »
Pourquoi renoncer à la primaire ? En tant qu’ancien ministre du travail, Xavier Bertrand a argué qu’il ne se sentait « pas légitime » :
« Depuis ces trente dernières années, (…) il y a bien une faillite collective, et j’ai fait partie de cette classe politique. Aujourd’hui, je demande à être jugé sur ce que je vais faire à la tête de la région en m’occupant des gens et en m’y consacrant à 100 %. Si je réussis à faire mes preuves, là les gens se diront que je mérite peut-être mieux que les politiciens parisiens. Aujourd’hui, j’ai bien conscience que c’est à partir du terrain qu’on doit faire ça. »
Xavier Bertrand, un besogneux qui a toujours surjoué la modestie, cultive depuis des années sa singularité au sein de sa famille politique et à l’égard des « Parisiens ». Lui est picard, n’a fait ni l’ENA ni Sciences Po. « Le système ne m’a jamais accepté, expliquait-il au Monde fin septembre. J’ai toujours senti une forme de mépris à mon égard de la part de beaucoup de ténors politiques. Quand en 2012, j’ai été réélu député de justesse, après qu’on m’a collé l’étiquette de Parisien, ça a créé un déclic : depuis, j’ai décidé de totalement assumer mon enracinement provincial. »
Un enracinement sur lequel il a misé pendant cette campagne des régionales, au cours de laquelle il n’a cessé de fustiger l’attitude des responsables nationaux. « Je ne supporte plus la politique nationale », assène-t-il dans l’entre-deux-tours. « Qu’on nous foute la paix, qu’ils se taisent ! » lance-t-il aussi à l’adresse de Nicolas Sarkozy et des ténors de la droite.
Lundi soir sur France 2, Xavier Bertrand a de nouveau déploré « le spectacle » auquel se livre sa « famille politique », qui devrait évincer la vice-présidente du parti, Nathalie Kosciusko-Morizet :
« Les seules réponses que l’on apporte à cela, c’est l’organigramme des Républicains ou la date de la primaire. Mais, mon dieu, mais qu’ils se réveillent ou alors on va vers une catastrophe politique ! J’ai le sentiment que dimanche, les électeurs nous ont donné une dernière chance. »
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