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Interview

Jean-Daniel Lévy : «On ne peut pas dire que le FN a atteint son maximum»

INTERVIEW - Selon le directeur du département politique et opinion d’Harris Interactive, « le vote FN n’est pas uniquement un message de protestation mais aussi de construction ». Ses électeurs sont « terriblement impliqués », remarque-t-il.

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Jean-Daniel Lévy.

Par Isabelle Ficek

Publié le 14 déc. 2015 à 17:13

Malgré un niveau très élevé au premier tour, le FN a gagné 800.000 voix au second. Qui sont ces nouveaux électeurs ?

Dans ce nouvel apport de votes, 800.000 électeurs de plus dimanche, on constate que les composantes sociales de ces nouveaux électeurs sont assez proches de celles du premier tour. C’est-à-dire un électorat plus jeune, issu des catégories moyennes et populaires, et plutôt dans des territoires ruraux. Surtout, ces nouveaux électeurs sont vraiment venus « pour la gagne ». Dans les enquêtes, 90 % d’entre eux souhaitent que le FN ait des élus. Cela nous dit que ce vote n’est pas uniquement un message de protestation mais aussi de construction. Avant le premier et le second tour, les électeurs du FN, dans les enquêtes, parlaient de « changement ». A l’issue du second tour, ils évoquent leur déception. Nous sommes face à des électeurs terriblement impliqués. A droite et à gauche, les électeurs ne nous parlent pas dans les enquêtes de déception.

Ce barrage au second tour peut-il avoir pour effet de renforcer le vote FN lors des prochains scrutins ?

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Ce qui est certain, c’est que l’idée du « tous contre nous » mobilise. Les électeurs du FN, intimement persuadés qu’ils accéderaient à des exécutifs, sont renforcés dans l’idée, d’une part, que le FN est un parti qui propose autre chose et, d’autre part, qu’ils font face à des formations politiques qui, par des « magouilles » – le terme qu’utilise le FN –, font tout pour garder leur siège. Cela les renforce dans leur idée qu’ils ont raison de voter pour le FN.

Le FN se heurte toujours au plafond de verre mais progresse. Jusqu’où peut-il aller ?

Cela dépend du Front national, dont le renforcement est incontestable, mais aussi de la désaffection vis-à-vis des autres formations politiques, de leur effondrement. Ce qui est frappant, c’est que l’évolution du FN est une évolution en nombre, géographique, générationnelle et également sociale. Et on ne peut pas dire que le FN a atteint son maximum quand on voit à quel point les thématiques – immigration, sécurité, terrorisme – sur lesquelles il se construit sont présentes dans l’actualité et vont le rester dans les mois qui viennent.

Jusqu’à présent, on pensait que les questions économiques étaient plutôt un frein. Or, sur les grands enjeux européens, de finances publiques ou de rapport à l’euro, nous ne sommes pas face à des Français très interrogatifs sur le FN, notamment dans les catégories populaires. Souvent, le FN est présenté comme une formation politique incapable de gouverner, mais, dans les enquêtes, ce n’est pas le sujet central. Les Français ne disent pas que le FN ferait mieux, mais que les autres formations sont démonétisées dans leur capacité à gérer le pays, à réduire le chômage, à répondre aux problèmes des Français.

CARTE Les résultats du FN au second tour

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