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Nucléaire : la Belgique relance un réacteur fissuré, les Verts allemands furieux

Le réacteur nucléaire de Tihange 2, situé près de Liège (sud-est de la Belgique), a redémarré après un arrêt de 21 mois lié à des inquiétudes sur la sûreté de l’installation, en raison de la présence de milliers de fissures dans la paroi de sa cuve, soulevant de vives protestations dans l’Allemagne voisine.

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«Tihange 2 a été redémarré en toute sûreté», a assuré la filiale belge du groupe français Engie. Le réacteur, mis en service en 1983 et dont la production annuelle à pleine puissance «pourra atteindre 8.000.000.000 de kWh», a «été couplé au réseau à 21h21» lundi, a précisé l’exploitant Electrabel.

«Redémarrer un réacteur qui a des fissures est irresponsable et dangereux. Compte tenu de la proximité avec la frontière, le gouvernement allemand aurait dû depuis longtemps oeuvrer pour sa fermeture», a réagi dans un communiqué la porte-parole du parti écologiste allemand, Sylvia Kotting-Uhl.

«Si une défaillance de la cuve de réacteur conduit à un accident nucléaire, l’Allemagne serait également fortement irradiée en raison d’un fréquent vent d’ouest», a-t-elle ajouté, en jugeant «extrêmement douteuse» la «manière d’agir de la surveillance nucléaire belge».

Les autorités de l’Etat-région de Rhénanie du Nord-Westphalie (Allemagne), voisin de la Belgique, avaient par avance protesté contre ce redémarrage. Début décembre, des associations écologistes belges, allemandes et néerlandaises avaient remis au ministre belge de l’Intérieur, Jan Jambon, une pétition signée par 16500 personnes réclamant l’arrêt définitif du réacteur.

Le ministre, en charge de la sécurité, avait répondu qu’il ne faisait que suivre l’avis de l’agence de contrôle nucléaire belge (AFCN), qui avait autorisé mi-novembre le redémarrage de ce réacteur, ainsi que celui de Doel 3, près d’Anvers (nord), également exploité par Electrabel.

Fissures de 18 cm

Les deux réacteurs avaient été arrêtés à deux reprises. Une première fois à l’été 2012, après la découverte lors d’opérations de maintenance de milliers de microbulles, dues à l’action de l’hydrogène au moment de la fabrication des cuves en acier. Après un feu vert donné en mai 2013 pour un redémarrage, l’arrêt avait été de nouveau ordonné en mars 2014 lorsque Electrabel avait obtenu des «résultats inattendus» lors d’une analyse complémentaire.

Les deux réacteurs, qui représentent à eux deux un tiers de la puissance des sept réacteurs belges, comptaient environ 13.000 fissures liées à l’action de l’hydrogène pour Doel 3 et 3.150 pour Tihange 2, selon des études publiées en février. Les plus grandes atteignent 18 centimètres.

De nouveaux tests ont alors été menés. «L’AFCN tient à souligner que tant les dossiers de justification d’Electrabel que sa propre décision finale reposent sur les résultats d’études scientifiques approfondies», avait assuré l’agence le mois dernier.

«L’AFCN a conclu qu’Electrabel a pu démontrer de manière convaincante que les microbulles d’hydrogène présentes dans les parois des cuves n’avaient pas d’impact inacceptable sur la sûreté des réacteurs», avait alors expliqué l’agence.

L’exploitation des deux réacteurs a donc été autorisée jusqu’à leur arrêt définitif, prévu par la loi prévoyant la sortie du nucléaire, au 1er octobre 2022 pour Doel 3 et au 1er février 2023 pour Tihange 2.

Le ministre de l’Economie de Rhénanie du Nord-Westphalie, le social-démocrate Garrelt Duin, avait qualifié d’«irresponsable» la prolongation d’activité des réacteurs. Et la ville allemande d’Aix-la-Chapelle, située à une soixantaine de kilomètres du réacteur, avait envisagé en vain des options légales pour s’opposer à son redémarrage.

Une vingtaine de centrales nucléaires sur les quelque 430 qui fonctionnent dans le monde sont équipées des mêmes cuves. Des experts avaient exprimé leurs craintes d’une rupture de la paroi des cuves et l’écoulement de liquide hautement radioactif en cas d’incident nécessitant l’injection d’eau froide.

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