Températures dignes d’un printemps des plus agréables, neige artificielle dans les Alpes : le mois de décembre s’annonce des plus chauds, en France, mais aussi dans le monde. Et peut-être même le plus chaud depuis le début des relevés météorologiques il y a plus d’un siècle. Retour sur une anomalie de chaleur, qui interroge sur le rôle du changement climatique.
- Des températures records en France…
Des records de températures ont été battus en France, jeudi 17 décembre. Avec 16,2 °C au Touquet, 16,2 °C à Calais, 15,6 °C à Charleville-Mézières ou encore 15,4 °C à Ouessant, le thermomètre a atteint des niveaux inégalés depuis l’année 2000. Le mercure n’est pas descendu en deçà de 12,6 °C à Boulogne-sur-Mer dans la nuit de mercredi à jeudi, du jamais vu depuis 1985.
Une douceur « remarquable » qui perdure depuis fin octobre, à l’exception de quelques jours de fraîcheur fin novembre. « La situation est due à un anticyclone centré sur le sud de l’Europe, qui pousse les dépressions au nord, vers l’Islande, explique Marion Pirat, prévisionniste à Météo France. Des masses d’air chaud remontent alors du Maghreb vers l’Europe de l’Ouest. »
Cette vague de chaleur devrait perdurer jusqu’à la fin de l’année. « 2015, avec une anomalie de chaleur de + 0,8 °C, se classe pour l’instant au 4e rang des années les plus chaudes en France depuis le début des relevés en 1900, derrière 2014, 2011 et 2003, précise Anne Pineaud, climatologue à Météo France. Mais si la douceur persiste, 2015 pourrait passer au 3e rang, devant 2003. Dans ce cas, les trois années les plus chaudes jamais enregistrées le seraient toutes depuis 2010. »
- … et dans le monde
Les températures enregistrées dans le monde entre janvier et novembre ont battu des records, laissant présager que l’année 2015 sera la plus chaude de l’histoire moderne, selon les experts de l’Agence américaine océanique et atmosphérique (NOAA) dans leur rapport mensuel sur le climat, publié jeudi. Sur les onze mois de l’année, la température moyenne à la surface des eaux et des océans a dépassé de 0,87 °C la moyenne du XXe siècle, atteignant un plus haut jamais enregistré depuis 1880 et dépassant le précédent record atteint en 2014.
Le mois de novembre, en particulier, a été le plus chaud depuis le début des annales, avec + 0,97 °C par rapport à la moyenne. C’est ainsi le septième mois consécutif à battre un record de températures, précise l’agence américaine.
Début novembre, le Met Office avait déjà proclamé, sur la foi des neufs premiers mois de l’année, que 2015 serait la première année dont la température franchira le cap de 1 °C de réchauffement par rapport à la période préindustrielle. Entre janvier et septembre, la moyenne des températures relevées à la surface de la Terre est ainsi supérieure de 1,02 °C à celle enregistrée, à période équivalente, dans les dernières décennies du XIXe siècle.
Un réchauffement qui se ressent jusqu’aux pôles. La température de l’air arctique a dépassé la normale de 1,3 degré Celsius et atteint son niveau « le plus élevé depuis le début des relevés en 1900 », a précisé l’« Arctic Report Card 2015 » publié par la NOAA. La température moyenne de l’air sur un an, à partir de relevés pris entre octobre 2014 et septembre 2015, a augmenté de 3 °C depuis le début du XXe siècle.
- Un puissant El Niño
2015 est aussi l’année du puissant El Niño. Ce phénomène climatique naturel, qui revient tous les trois à sept ans et fait grimper le thermomètre du Pacifique tropical, tire les températures mondiales vers le haut, en plus de la tendance lourde au réchauffement. Or, selon un bulletin de l’OMM daté du 16 novembre, l’anomalie chaude du Pacifique tropical va excéder 2 °C. Ce qui placera l’actuel El Niño au rang des épisodes les plus intenses observés depuis 1950 – avec ceux de 1972-1973, 1982-1983 et 1997-1998.
« Les graves sécheresses et les inondations catastrophiques qui touchent aujourd’hui les zones tropicales et subtropicales portent la signature de l’actuel El Niño, le plus puissant que l’on ait observé depuis plus de quinze ans », a expliqué Michel Jarraud. D’après l’OMM, une corrélation a également été établie entre l’actuel épisode et certains phénomènes majeurs, comme la « saison cyclonique très active dans les bassins du Pacifique Nord-Ouest et du Pacifique Nord-Est ».
- Une concentration inégalée de CO2 dans l’atmosphère
Dernier record : le seuil des 400 parties par millions (ppm) de concentration atmosphérique de dioxyde de carbone (CO2) est sur le point d’être franchi de manière imminente. Un tel niveau de concentration de CO2 est inédit depuis le pliocène, voilà 5,3 millions à 2,6 millions d’années, à une époque où le niveau des océans fluctuait entre 5 mètres et 40 mètres au-dessus du niveau actuel. Ce taux était de 270 ppm environ au cours de la période préindustrielle et n’a jamais excédé 300 ppm au cours du dernier million d’années.
« Chaque année, les concentrations de gaz à effet de serre battent de nouveaux records , a déclaré dans un communiqué Michel Jarraud, le secrétaire général de l’OMM. Et chaque année, nous répétons que le temps presse. C’est maintenant qu’il faut agir pour réduire radicalement les émissions de gaz à effet de serre et pour qu’il nous reste une chance de contenir à un niveau raisonnable la hausse des températures. »
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