Santé : l'avis médical à 295 â?¬ fait hurler

Un nouveau site propose au malade un second avis d'expert sur dossier, moyennant une jolie somme non remboursée par l'Assurance maladie. Il est la cible de l'ordre des médecins et de professionnels de santé.

Santé : l'avis médical à 295 â?¬ fait hurler

    Encore une riche e-idée. Solliciter un second avis d'un médecin quand on vient de vous annoncer une mauvaise nouvelle, c'est légitime, voire nécessaire. Mais comment faire quand les spécialistes se font rares ? Depuis le 1er décembre, trois entrepreneuses proposent une solution avec un nouveau site Internet. Sur Deuxiemeavis.fr, on peut solliciter à distance et sur dossier numérisé l'avis d'un « expert » sur un premier diagnostic. Réponse assurée sous quatre à sept jours sur 180 pathologies, dont cancers, asthme, dégénérescence maculaire liée à l'âge, syndrome du canal carpien, arthrose... Le site a la caution de sommités médicales dont le Pr Laurent Degos, vice-président de l'Institut Pasteur, du P r Didier Sicard, ancien président du Comité national d'éthique, et de Claude Rambaud, vice-présidente du Ciss, qui représente les associations de patients.

    Enquête annoncée

    Mais voilà, à 295 â?¬ la consultation, non remboursée par l'Assurance maladie, les réactions sont nombreuses et vives. En particulier du Conseil national de l'ordre des médecins, qui va enquêter sur les nouvelles pratiques de téléconsultations. « Ce site pose le problème plus général de l'ubérisation de la santé qui passe par une plate-forme Internet sans respecter le vertueux parcours de soins défendu par les pouvoirs publics, explique Jacques Lucas, chargé du dossier à l'ordre dont il est le vice-président. J'ai cru comprendre que l'initiative de Deuxiemeavis.fr pourrait être soutenue par des complémentaires santé qui prendraient en charge la consultation. Il y aurait alors deux portes d'accès aux soins, celle qui passe par ces complémentaires et celle des autres patients, ce qui créerait une inégalité. »

    Autre réaction, celle de la CSMF, premier syndicat de médecins. Son président, Jean-Paul Ortiz, ne décolère pas : « A l'heure où l'on parle d'égalité d'accès aux soins pour tous, proposer sur Internet un pseudo-deuxième avis pour près de 300 â?¬ est scandaleux. » De fait, les créatrices du site ont déjà convaincu « une mutuelle et une branche professionnelle » de rembourser cet acte. Ce qui fait bondir les médecins sur la toile. A l'image du Dr Valérie Briole, rhumatologue à Paris. « Comment des organismes mutualistes et l'Etat, qui estiment à 23 â?¬ la valeur réelle d'une consultation, sont-ils capables de soutenir un site où, pour 295 â?¬ payables d'avance, des experts émettraient un second avis médical sans examiner le patient ! » Pour elle, « ce site exploite le doute des patients dans un but lucratif ».

    Sur les 295 â?¬ facturés, 120 â?¬ vont au médecin, 175 â?¬ servent à couvrir les frais du site. Ce prix et sa répartition ne satisfont pas pleinement le Ciss, qui rappelle que « ce site est et doit rester une solution parmi d'autres ». Le ministère de la Santé note simplement qu'il s'agit « d'un projet d'initiative entièrement privé, sans soutien financier public ».