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Une thérapie génique efficace contre la drépanocytose

L’institut Imagine, où s’est en partie déroulé l’essai, est le premier pôle européen de recherche, de soins et d’enseignement sur les maladies génétiques.

Un jeune patient atteint d’une forme sévère de cette maladie du sang soigné à l’hôpital Necker est en voie de rémission et n’a plus besoin de traitements.

C’est une première historique: un garçon de 13 ans atteint de drépanocytose est aujourd’hui en rémission complète, après avoir été traité par thérapie génique en octobre 2014. Ce résultat, annoncé mercredi 2 mars dans le New England Journal of Medicine, est le fruit d’une collaboration entre l’Hôpital Necker-Enfants malades (AP-HP) et l’Institut des maladies génétiques Imagine, sous la direction du professeur Marina Cavazzana. Un résultat d’autant plus porteur d’espoir que la drépanocytose est la maladie génétique la plus fréquente en France (une naissance sur 1900 en 2013), mais aussi dans le monde (plus de cinq millions de malades).

Particulièrement fréquente dans les populations d’origine antillaise, africaine et méditerranéenne, la drépanocytose est due à une anomalie de l’hémoglobine, le principal constituant des globules rouges en charge du transport de l’oxygène. «Une mutation du gène de l’hémoglobine déforme les globules rouges qui ont une forme de croissant et qui peuvent alors obstruer des petits vaisseaux sanguins. Cela provoque une anémie chronique et des crises douloureuses très fréquentes», indique le professeur Marina Cavazzana, coordinatrice du centre d’investigation clinique en biothérapie à l’Hôpital Necker et chercheuse à l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm).

Une alternative à la greffe

Jusqu’à maintenant, le seul traitement curatif qui pouvait être proposé aux malades était la greffe de moelle osseuse, puisque c’est dans cette substance située à l’intérieur des os que sont fabriqués les globules rouges. En remplaçant la moelle déficiente du patient par celle d’un proche compatible, il est possible de rétablir une production de globules rouges normaux et un transport correct de l’oxygène. Cependant, cette intervention très lourde est réservée aux cas les plus sévères.

Le Pr Marina Cavazzana, pédiatre hématologiste, a mené cet essai clinique.

N’ayant aucun donneur compatible et présentant des symptômes particulièrement sévères, le jeune garçon a pris part à l’essai en septembre 2014. «Nous avons d’abord prélevé les cellules-souches de sa moelle osseuse sous anesthésie générale. Un vecteur viral porteur du gène sain a été introduit dans les cellules afin de les corriger. Nous avons ensuite réinjecté ces cellules traitées», explique Marina Cavazzana. Ce vecteur a été mis au point par Philippe Leboulch, professeur au MIT (Boston, États-Unis) et fondateur du laboratoire américain Bluebird Bio qui sponsorise l’essai clinique.

Une rémission mais pas de guérison

L’adolescent n’a désormais plus besoin de sa transfusion mensuelle. «Neuf mois après avoir reçu cette greffe de cellules corrigées, le patient se porte bien et produit environ 51,5% d’hémoglobine normale», a précisé l’Assistance Publique - Hôpitaux de Paris (AP-HP) dans un communiqué. Le garçon n’a désormais plus aucun traitement à prendre et il a pu reprendre l’école et le sport. Les médecins parlent d’une rémission complète, mais pas encore de guérison. «Il faudra attendre 5 ou 10 ans pour cela, quand nous aurons un recul suffisant», commente la chercheuse avec prudence. Par ailleurs, ce traitement a un coût très important: 500 000 euros par patient. Celui-ci devrait néanmoins diminuer avec l’amélioration des techniques de biologie moléculaire.

Quatre autres jeunes de 13 à 21 ans inclus dans l’essai clinique n’ont, eux non plus, plus besoin d’être transfusés. Pour l’heure, seuls deux autres patients doivent entrer dans le protocole l’année prochaine. «Ces résultats sont extrêmement positifs. Nous espérons reprendre l’essai plus tard avec un plus grand nombre de patients qui ne trouvent pas de donneur familial compatible», conclut Marina Cavazzana.

Dans son communiqué, l’AP-HP se montre également optimiste: «Si ces premiers résultats étaient confirmés, la thérapie génique pourrait devenir une thérapeutique curative, en remplacement de la greffe chaque fois que le patient ne bénéficie pas d’un donneur compatible». Aux États-Unis, cette même thérapie génique fait l’objet d’un essai clinique mené auprès de 7 adultes souffrant de drépanocytose. Les premiers résultats, présentés lors du congrès américain d’hématologie, sont moins encourageants que ceux obtenus chez le jeune français.

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