Ces tribunaux de l'injustice opèrent en parallèle sur nos territoires, violant les droits les plus fondamentaux de nombreuses femmes musulmanes. Estimés à environ 90 au Royaume Uni, ils décident principalement des questions relatives au droit familial : généralement des procédures de divorces entamées par des femmes. Cela n'est pas surprenant puisque les hommes eux n'ont pas besoin de demander la permission de s'en aller ou de devenir polygames. Ils peuvent simplement répudier leurs épouses mais l'inverse n'est pas possible. Les femmes, elles, doivent au préalable se justifier, négocier et payer des frais de procédures... En plus de l'humiliation il y a donc l'appauvrissement et la solitude.
Récemment, The Independantconsacrait justement un article à cette terrible réalité européenne qui pénalise surtout les femmes. Le journal britannique commente à ce propos le travail du dr. Machteld Zee qui, dans sa thèse de doctorat à l'Université de Leiden a étudié le problème de l'application de la loi en Europe face aux religions. Dans ce cadre, elle est allée sur le terrain et a eu accès à l'univers glauque des tribunaux islamiques au Royaume Uni qui ne sont pas les seuls à bafouer les droits des femmes en Europe.
Malgré cette obstination à nier les droits de la femme, le débat sur l'islam et l'intégration se fait encore du bout des lèvres. Il aura du mal à avoir lieu tant que les simplismes des extrémistes d'une part et les mantras de bisounours d'autre part se substitueront en permanence à cette conversation indispensable au changement. Et nos lois dans tout ça? Comment peuvent-elles remplir leur objectif de justice face à de telles dérives ?
En effet, le laxisme et l'inégalité devant les lois persistent malgré les beaux discours. C'est une forme de terrorisme silencieux perpétré dans nos contrées contre des femmes musulmanes abandonnées à elles-mêmes au nom du multiculturalisme. C'est un crachat sur les fondements de l'Europe. Et pourtant nous refusons de regarder, nous refusons d'agir, nous minimisons, nous faisons semblant de ne rien voir car notre préoccupation première demeure encore souvent d'être politiquement corrects et de "respecter" la soi-disant culture ou religion des autres au lieu de privilégier les droits des personnes d'où qu'elles viennent et de veiller à l'application sans conditions de nos lois.
L'exemple du Royaume Uni où fleurissent les tribunaux de la charia est édifiant. C'est un des symptômes les plus visibles de cet échec d'intégration des personnes en Europe. Une Europe qui ne réussit pas à se faire respecter et qui vacille parce qu'elle a abandonné dans les faits ses principes les plus élémentaires. C'est ainsi que sur son territoire, ses lois sont bafouées et de nombreux sujets restent tabous. Le Royaume-Uni a connu une explosion du nombre de mariages islamiques. Ils sont aujourd'hui estimés à 100.000 selon de nombreuses sources dont une majorité d'unions polygames. Selon la première femme juge des tribunaux de la charia au Royaume Uni "le gouvernement ne devrait pas imposer aux musulmans de n'avoir qu'une seule femme. Les gens ont le droit de décider pour eux-mêmes".
Et les femmes impliquées, quand pourront-elles réellement décider pour elles-mêmes ? Dans le cadre d'un mariage islamique, le divorce en droit civil ne suffit pas à rendre sa liberté à la femme qui reste sous l'emprise du mari. Tant que la femme n'a pas obtenu le divorce, l'homme garde ses droits sur elle qu'elle le veuille ou non et peut en épouser une autre, civilement et/ou religieusement s'il le souhaite. Et tant qu'il ne répudie pas sa première conjointe, cette dernière devient contre son gré une coépouse. Elle, elle ne pourra pas choisir parce qu'elle est née femme. Si humiliée elle s'en va ou se remarie sans rompre le mariage religieux, elle est ostracisée ou devient une cible potentielle de violences ou de crimes liés à "l'honneur". Ses proches se sentiront obligés de baisser la tête et la pression sociale fera le reste.
Les mariages islamiques se déroulent en marge de la société. Leurs conséquences excèdent le cadre folklorique. Tout se passe dans le secret des cérémonies à huis clos, qui n'implique pas les institutions officielles, qui n'est pas officiellement enregistré et qui ne tient nullement compte de la loi en vigueur. Il n'est donc pas reconnu par l'État. Les femmes impliquées dans ce type d'unions ne peuvent pas faire valoir leurs droits devant les tribunaux civils... Au cours de leur vie, de nombreuses musulmanes européennes sont abandonnées par le système face aux discriminations qu'elles subissent, allant de la privation d'éducation à l'obligation de se marier à un inconnu et corollaire de tout cela, l'impossibilité de divorcer.
À ce stade il n'existe pas d'études montrant l'existence de tribunaux de ce type dans le Benelux. Cependant la violation des droits des femmes pour des motifs religieux face à une justice impuissante est bien réelle aussi chez nous et trouve les mêmes justifications qu'ailleurs. Aux Pays-Bas des petites Néerlandaises nées en Europe et qui n'ont pas fini de grandir se retrouvent piégées à l'étranger pour épouser un oncle ou un cousin. La Néerlandaise d'origine pakistanaise Shirin Musa, après s'être libérée de sa captivité maritale aux Pays-Bas, a créé Femmes For Freedom, une organisation au service des Néerlandaises sacrifiées de cette manière ou d'une autre sur l'autel du multiculturalisme.
On ne peut pas tolérer la violation de la loi au nom des croyances ou des cultures. On ne peut pas tolérer la présence de "législations" parallèles sur le territoire européen. On ne peut pas subordonner la loi à la religion. Dans la pratique, nous devons tourner le dos au relativisme culturel qui n'est rien d'autre qu'une forme de lâcheté. Ce n'est pas de la tolérance, mais une complicité de fait face à des violations graves des droits humains. En attendant, le coût social et économique c'est pour l'ensemble de la société aujourd'hui et demain.
Pour agir, on n'a même pas besoin d'inventer autre chose car la loi c'est la loi et c'est tout. Ce principe doit être non négociable. C'est notre responsabilité. Il faut qu'un vent de courage politique souffle sur nos contrées pour que la primauté de nos lois sur les religions se traduise dans la réalité.