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Police-Justice

Moi, Atsa, 57 ans, victime d'un kamikaze du Stade de France et oublié de tous

TEMOIGNAGE RMC/BFMTV - Un mois après, rencontre avec des victimes des attentats oubliées de tous. Ce soir-là, Atsa et sa femme se trouvent aux abords du Stade de France pour vendre des écharpes lorsqu'un kamikaze actionne sa bombe tout près d'eux. Dans l'explosion, lui a eu un doigt arraché. Elle est toujours dans le coma, un boulon logé dans le cerveau. Aujourd'hui, il se dit brisé et en colère.

Le 13 novembre dernier, l'horreur. En l'espace de quelques minutes, des fusillades et une série d'explosion ont lieu dans Paris et à Saint-Denis, aux abords du Stade de France. Des attentats qui vont faire 130 morts et près de 350 blessés. Mais un mois après ces dramatiques événements, force est de constater que certaines de ces victimes ont été oubliées des autorités comme des médias: celles du Stade de France.

Pas invité aux Invalides

Pour rappel, en marge du match France-Allemagne, trois kamikazes ont actionné la charge qu'ils portaient sur eux. Lors de la première explosion, un chauffeur de bus qui accompagnait un groupe de supporters a été tué. Mais il y a eu aussi des blessés graves, notamment près du McDonald. C'est là que le troisième kamikaze, Bilal Hadfi, a actionné sa bombe tout près d'un groupe de personnes. 14 ont été blessés dont 7 très gravement.

Parmi elles, plusieurs membres d'une même famille, celle d'Atsa, 57 ans. Venu notamment avec son épouse pour vendre des écharpes de l'équipe de France et du PSG, il reçoit une trentaine de boulons dans le corps. Un mois après, Atsa doit sortir cette semaine de l'hôpital avec un doigt en moins. Sa femme, elle, est dans un état plus critique: elle est toujours dans le coma, un boulon logé dans le cerveau. Mais aujourd'hui, si Atsa se dit particulièrement en colère, c'est parce qu'il n'a pas été invité comme d'autres blessés à la cérémonie d'hommage aux Invalides.

"Je pleurais comme un gamin"

"Je voudrais que toute la France sache que même au Stade de France il y a eu des blessés graves, témoigne-t-il, en pleurs. On nous a mis à l'écart. Rien que d'y repenser ça m'énerve… Nous, on voulait être en communion avec toutes les victimes parce qu'on l'est autant qu'elles". Et d'ajouter: "Le jour de la cérémonie, je me suis mis au garde-à-vous dans mon lit et je pleurais comme un gamin".

Cette cérémonie d'hommage Atsa l'a donc regardée seul, depuis son lit d'hôpital. Un lit d'hôpital qu'il arrive enfin à quitter quelques heures par jour, depuis une semaine. Pour l'instant, il n'a toujours pas été entendu par la police pour raconter ce qu'il a vu ce 13 novembre. Un jour désormais gravé dans sa chair: son corps a été criblé des boulons contenus dans la ceinture d'explosifs du kamikaze. "On m'a notamment ouvert l'estomac parce que l'un d'entre eux s'est arrêté juste sur le colon, détaille-t-il. Les médecins disent que c'est un miracle parce qu'il a traversé mon corps sans rien toucher…

Une trentaine de boulons retirés

Et ce n'est pas tout: "J'ai eu aussi une vingtaine de boulons sur toute la jambe… Mon doigt a été arraché, on me l'a recousu avec tous les nerfs… Sur le visage, j'ai bien une dizaine de boulons qui ont dû être retirés". Atsa reste bien sûr encore très fragile et, s'il doit sortir prochainement de l'hôpital, impossible pour lui de retourner dans son logement car celui-ci n'est pas adapté à sa convalescence.

Dépité et en colère en raison du manque de reconnaissance de sa situation, il compte bien créer une association pour venir en aide aux victimes oubliées comme lui. "Je vais travailler et ramasser de l'argent pour ceux qui vont rester invalides, entre quatre murs en attendant la mort", dit-il. Pour récolter des fonds, Atsa veut continuer à vendre des écharpes comme il le faisait le soir du 13 novembre…

M.R avec Céline Martelet