Attentats du 13 novembre : l'ombre d'un jihadiste français derrière le Bataclan

En analysant les récits de survivants de la salle de spectacle parisienne, les enquêteurs pensent que certains des tueurs étaient en contact avec une vieille connaissance, originaire de Drancy et parti en Syrie en 2013.

Attentats du 13 novembre : l'ombre d'un jihadiste français derrière le Bataclan

    C'est une piste qualifiée de sérieuse qu'explorent depuis plusieurs semaines les policiers antiterroristes. La sanglante attaque suivie d'une prise d'otages menée contre les spectateurs du Bataclan le 13 novembre pourrait avoir été élaborée, ou tout du moins coordonnée, par un Français déjà connu des services de renseignement. Le nom de Charaffe el-Mouadan, 27 ans, parti en Syrie à la fin de l'été 2013, est revenu à l'esprit des enquêteurs de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) après l'audition d'un survivant, pris au piège pendant plusieurs heures dans la salle de spectacle parisienne.

    Entendu quelques heures après le carnage, ce témoin a expliqué d'emblée avoir tenté de se dissimuler en s'accrochant sur le rebord d'une fenêtre, alors qu'un des trois kamikazes venait d'être abattu par la police. Mais l'un des terroristes, décrit de petite taille, l'aperçoit et lui donne l'ordre de revenir vers lui.

    « Cet homme était habillé avec un survêtement, se souvient ce précieux témoin. Il portait une barbe et il m'a donné l'impression d'être le leadeur. Il était plus posé que son complice. Ils nous ont ensuite placés comme boucliers humains autour d'un couloir et devant les fenêtres. »

    Il avait fréquenté l'Association nationale de tir de la police

    L'otage se remémore encore que ce même terroriste a demandé au négociateur de la police de faire reculer ses collègues, car ils « avaient des ceintures d'explosifs et qu'ils allaient tout faire sauter ». Le kamikaze échange pendant près d'une demi-heure avec les forces de l'ordre avant l'assaut final donné par la brigade de recherche et d'intervention (BRI).

    Mais quelques instants avant, ce témoin se rappelle avoir entendu « le plus grand » des deux terroristes s'adresser à son complice pour lui demander s'il « comptait appeler Souleymane ». « Le petit a répondu que non et qu'ils allaient gérer ça à leur sauce, confie encore ce témoin. Il a aussi ajouté qu'il fallait parler en arabe. Après, il y a eu une discussion très tendue entre eux. J'avais l'impression qu'ils ne se connaissaient pas bien... »

    En prenant connaissance des déclarations de ce survivant du Bataclan, les enquêteurs ont rapidement fait le rapprochement avec Charaffe el-Mouadan, également connu sous le nom de Souleymane. Un rapprochement conforté également par la présence de Samy Amimour parmi les terroristes du Bataclan...

    Charaffe el-Mouadan / photo DR

    Les deux hommes, amis d'enfance et originaires du même quartier à Drancy (Seine-Saint-Denis), avaient été mis en examen, en compagnie d'un troisième comparse, Samir Bouabout, en octobre 2012 pour association de malfaiteurs en vue de préparer des actes de terrorisme. A l'époque, El-Mouadan, Amimour et Bouabout nourrissaient le projet de gagner le Yémen ou l'Afghanistan pour y mener le jihad armé. Pour ce faire, Charaffe el-Mouadan, décrit comme le leadeur du trio, de par son charisme, avait suivi des cours de tir, dès mars 2012, au sein de l'Association nationale de tir de la police (ANTP) dans le XVIIIe arrondissement à Paris, avant d'y recommander ses deux amis. Lors de leur audition par les policiers de la DGSI, les trois candidats au jihad avaient finalement indiqué avoir abandonné leur projet initial au profit de leur installation dans un village musulman en Tunisie.

    « Cette piste menant vers Charaffe el-Mouadan est aussi confortée par le fait que Ismaël Omar Mostefaï figurait parmi les kamikazes du Bataclan, confie un proche de l'enquête. Cet homme est passé en Syrie en compagnie d'Amimour et de Bouabout. On sait aussi qu'El-Mouadan et ses deux amis d'enfance se sont rejoints après avoir rallié les rangs de Daech. »

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