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Chômage : pourquoi la courbe ne s’inverse pas

En novembre, le nombre de demandeurs d’emploi de catégorie A a légèrement baissé. Mais sur un an, la courbe du chômage est toujours en progression.

Le Monde

Publié le 24 décembre 2015 à 14h10, modifié le 24 décembre 2015 à 16h59

Temps de Lecture 5 min.

A la veille de Noël, une petite note positive. Le nombre de demandeurs d’emploi de catégorie A, c’est-à-dire sans aucune activité, a diminué de 15 000 (- 0,4 %) en novembre, selon les chiffres publiés, jeudi 24 décembre, par Pôle emploi et le ministère du travail. Il s’établit ainsi à 3 574 800.

La ministre du travail, Myriam El Khomri, y voit la confirmation d’une tendance à la stabilisation, la hausse du nombre de chômeurs de catégorie A ayant été limitée à 0,1 % sur les trois derniers mois. Le problème, c’est que depuis deux ans aucune baisse mensuelle n’a pu être enregistrée deux mois de suite. Et que, sur un an, le nombre de demandeurs d’emploi de cette seule catrégorie A est en augmentation de 2,5 %.

Quelles sont les raisons de ce chômage persistant ? L’horizon va-t-il se dégager dans l’année qui s’ouvre ? Comment et sur quoi le gouvernement compte-t-il agir ? Un rapide tour d’horizon pour comprendre un peu mieux ce sujet de l’emploi en France.

  • Pourquoi le chômage ne se résorbe-t-il pas ?

Une agence Pôle emploi à Lille, le 16 décembre 2015.

Début décembre, l’Insee a annoncé un bond du taux de chômage au troisième trimestre, celui-ci atteignant 10,2 % de la population active en France métropolitaine, soit son plus haut niveau depuis 1997.

Le mois de novembre marque certes une baisse, sur un mois, du nombre des demandeurs d’emploi quand on se limite à observer la catégorie A. Mais, sur un an, il est en hausse de 2,5 %. Surtout, si l’on comptabilise l’ensemble des catégories A, B et C (incluant donc ceux qui sont en activité réduite) en France métropolitaine, le chiffre des demandeurs d’emploi s’élève à 5 442 500, et il est en hausse de 0,1 % sur un mois et de 5,1 % en un an.

Ces résultats témoignent d’une activité économique qui reste encore trop fragile pour laisser entrevoir un recul durable du chômage. Le – petit – retour de la croissance, qui ne devrait guère dépasser 1,1 % en 2015 selon l’Insee, est trop poussif pour relancer l’activité, et l’emploi.

C’est ainsi que l’emploi salarié dans les secteurs marchands non agricoles est resté stable au troisième trimestre. Neuf cents postes ont même été détruits au cours de ce trimestre, ramenant leur total à 15 847 900. Dans la construction et l’industrie, l’emploi a continué de reculer, de respectivement 0,8 % et 0,5 %. Il faut remonter jusqu’à 2011 pour trouver une création nette d’emploi dans l’industrie.

Au total, sur un an à fin septembre, le niveau de l’emploi salarié est en hausse de 0,2 % seulement : les créations d’emplois ne sont donc pas suffisantes pour absorber la hausse naturelle de la population active. En 2014, 160 000 actifs sont arrivés sur le marché du travail, selon l’Insee. A en croire les différentes prévisions, même avec une croissance à 1,8 % du produit intérieur brut (PIB), le recul ne serait que de 0,2 point, soit 200 000 emplois créés…

  • Quelles sont les perspectives ?

La France a besoin d’une croissance plus forte et plus durable pour parvenir à inverser la tendance sur le front du chômage. Or, sur ce plan, la dernière note de conjoncture de l’Insee, mi-décembre, n’est pas rassurante : au quatrième trimestre, la croissance du PIB ne devrait atteindre que 0,2 %, soit deux fois moins que ce que prévoyait l’Institut il y a encore deux mois.

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A ce titre, un indicateur inquiète toujours : celui de l’inflation. Les prix à la consommation ont baissé de 0,2 % en novembre. Sur un an, les prix sont stables. Mais cette inflation molle, quasiment généralisée en zone euro, est synonyme de croissance anémique et elle est risquée pour l’économie si elle s’installe.

Il y a quelques bonnes nouvelles cependant dans ce tableau peu réjouissant. Tout d’abord, la production industrielle a progressé de 0,5 % en octobre par rapport au mois précédent. Sur les trois derniers mois, elle est en hausse de 2,3 % par rapport aux trois mêmes mois de 2014.

Par ailleurs, après avoir baissé de − 11 000 au premier trimestre, l’emploi intérimaire a augmenté au cours du deuxième trimestre de + 20 000, puis de + 16 000 au troisième trimestre (alors qu’on s’attendait à une hausse de 4 000 emplois intérimaires). Cette dynamique devrait se prolonger : + 16 000 et + 14 000 pour les deux premiers trimestres 2016.

Or, en général, quand la reprise arrive, les entreprises commencent par recruter des intérimaires, avant de pérenniser les embauches. La reprise, le gouvernement dit l’entrevoir en 2016 : il table sur une hausse de 1,5 % du PIB.

Cette estimation est toutefois jugée ambitieuse par les économistes. Selon l’Insee, de nombreux aléas demeurent : les effets des attentats, dont la persistance, début 2016, reste difficile à évaluer, ou encore l’ampleur du ralentissement dans les pays émergents, qui a pesé sur le commerce extérieur.

Cela fait dire aux experts de l’Insee que le chômage « devrait baisser légèrement pour retrouver, à la mi-2016, son niveau de 2015 » (10,4 %). De véritable inversion de la courbe, il n’est toujours pas question.

  • Que compte faire le gouvernement ?

Manuel Valls, a annoncé, le 14 décembre, la préparation d’« un plan massif de formation pour les chômeurs » et des mesures pour doper l’apprentissage, qui seront présentées en janvier.

Dès le lendemain de la défaite des élections régionales, marquées par la progression du vote Front national avec un « sujet chômage » qui reste l’une des principales préoccupations des Français, le premier ministre, Manuel Valls, a annoncé, le 14 décembre, la préparation d’« un plan massif de formation pour les chômeurs » et des mesures pour doper l’apprentissage.

Selon la ministre de l’emploi, Myriam El Khomri, l’accompagnement des personnes peu qualifiées sera au cœur du plan pour l’emploi qui doit être présenté en janvier. La ministre planche aussi sur la réforme du code du travail, prévue pour mars.

La formation des chômeurs a un effet immédiat : ces personnes n’étant plus comptabilisées dans les statistiques à partir du moment où elles commencent une formation, cela fait baisser rapidement les chiffres. A moyen terme, cette mesure peut toutefois avoir des effets positifs si les qualifications sont bien ciblées.

M. Valls a aussi promis de valoriser l’apprentissage alors que ces contrats en alternance entre l’entreprise et les études ont faibli de 8 % en 2013 et de 4 % en 2014. Un geste vers les jeunes, particulièrement touchés par le chômage. Cependant, selon l’économiste Eric Heyer, directeur du département analyse et prévision à l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), cette mesure repose en partie sur une erreur de diagnostic : si l’apprentissage baisse, c’est surtout, selon lui, parce que le secteur du BTP ne se porte pas bien.

Le premier ministre a également dit vouloir « encourager » les emplois de service (aide à domicile, garde d’enfants, jardinage…). De plus, un nouveau traitement contre le chômage de longue durée pourrait être testé. Une proposition de loi des députés socialistes, dite « d’expérimentation territoriale » visant à ramener à « zéro » le nombre de personnes qui cherchent un emploi depuis au moins un an, a été adoptée, à l’unanimité, par l’Assemblée nationale le 10 décembre.

Ce texte prévoit d’offrir à des chômeurs de longue durée un poste en CDI dans des activités socialement utiles. Le dispositif devrait d’abord s’appliquer dans une dizaine de territoires, pendant cinq ans.

Il reste désormais quelques mois à François Hollande pour tenir sa promesse « d’inverser la courbe du chômage ». Il en a fait une condition pour se présenter à l’élection présidentielle de 2017.

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