Vladimir Jankélévitch (31 August 1903 in Bourges–6 June 1985 in Paris) pictured on January 18, 1980 prior a TV talk show ''Apostrophes'', Channel II, Paris. Jankélévitch was a French philosopher and musicologist. Jankélévitch was the son of Russian parents, who had emigrated to France. In 1922 he started studying philosophy at the École normale supérieure in Paris, under Professor Bergson. From 1927 to 1932 he taught at the Institut Français in Prague, where he wrote his doctorate on Schelling. He returned to France in 1933, where he taught at the Lycée du Parc in Lyon and at many universities, including Toulouse and Lille. In 1941 he joined the French Resistance. After the war, in 1951, he was appointed to the chair of Moral Philosophy at the Sorbonne, where he taught until 1978.  AFP PHOTO JOEL ROBINE / AFP / JOEL ROBINE

Vladimir Jankélévitch en 1980 sur le plateau d'Apostrophes.

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Par grand vent et dans la tempête, il faut une boussole qui ne défaille point. La littérature est cette boussole. Le nord qu'elle indique est celui de la seule place tenable face aux dictatures du quotidien qui ont nom bêtise, intégrismes divers, compromis incessants, lâchetés minuscules, retour des impostures. Cette place porte un nom: résistance.

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Résister, donc. Ce n'est pas affaire de mots, mais d'actes. C'est ce que rappelle le magnifique livre posthume de Vladimir Jankélévitch. Né en France en 1903 dans une famille d'intellectuels russes (son père fut le premier traducteur de Freud en français), normalien, il est maître de conférences lorsque la guerre éclate. Blessé au front, il est révoqué de son poste cinq mois avant la promulgation des lois antijuives. Débute alors une vie clandestine dans la Résistance qui ne prendra fin qu'avec la Libération.

"Quelqu'un qui fait comme il dit"

Jamais, pourtant, Jankélévitch ne prit la pose du héros. Il préféra être celui qui pense, coûte que coûte: la mort, le pardon, la mémoire, la nostalgie, l'irréversible... Toute son oeuvre philosophique est irriguée par un fleuve: la littérature. Et lui-même se révèle écrivain: style fluide, pensée droite, loin du jargon qu'affectionnent certains de ses pairs.

Les articles ici rassemblés témoignent de la clarté de sa pensée, qui nous met en garde, d'abord, contre le retour des idées criminelles. A la question "Qu'est-ce qu'un philosophe?" il répond: "C'est d'abord quelqu'un qui fait comme il dit."

Les textes écrits en hommage à ses camarades résistants sont bouleversants. Georges Politzer, Boris Vildé, Jean Cavaillès, les lycéens de Buffon et les profs de la Sorbonne, tous les martyrs de la Résistance trouvent ici une voix qui refuse de parler en leur nom mais demande: que diraient-ils s'ils voyaient ce que nous faisons de la liberté qu'ils nous ont léguée?

On y trouve notamment ceci, qui est admirable et peut nous guider aujourd'hui encore: "Il ne s'agit pas d'être sublime, il suffit d'être fidèle et sérieux." A-t-on jamais mieux défini l'esprit de résistance?

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