Les pompiers sont-ils de plus en plus souvent agressés ? La question se pose à nouveau, alors que deux d’entre eux viennent d’être violemment pris à partie à Ajaccio et que plusieurs rassemblements de soutien ont été organisés dans la foulée.

Dénonçant des « zones de non-droit », des centaines de manifestants qui ont défilé ce week-end dans le quartier des Jardins de l’Empereur, affirmaient vouloir retrouver eux-mêmes les auteurs du guet-apens, une démarche vivement critiquée par le préfet de Corse. Mais qu’en est-il réellement des violences visant les pompiers ? La Corse constitue-t-elle un cas à part ?

Des agressions en hausse

Les chiffres sont sans appel : les soldats du feu sont de plus en plus souvent agressés d’après l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP). Ainsi, 1 603 sapeurs-pompiers se sont déclarés victimes en 2014, contre 1 234 en 2012. Soit une augmentation de 30 % en trois ans. Et le phénomène n’est pas nouveau. L’ONDRP avait déjà recensé, entre 2008 et 2012, une hausse de 37 % de ce type d’agressions.

Les trois quarts des agents agressés ont déposé plainte. Idem pour les dégâts matériels. En 2014, pas moins de 374 véhicules de sapeurs-pompiers ont été détériorés. Le tout pour un préjudice estimé à près de 265 000 €.

La Corse épargnée

La répartition des agressions enregistrées sur le territoire n’a toutefois rien d’homogène. Certaines régions s’avèrent sensiblement plus concernées que d’autres : c’est notamment le cas de Rhône-Alpes, France-Comté, Lorraine et Alsace.

À l’inverse, les sapeurs basés en Corse, dans le Limousin et en Outre-mer s’avèrent les moins exposés aux violences. Dans ces trois départements, aucune agression n’a même été déclarée en 2014, ni aucune détérioration de véhicule. À lire aussi : Les agressions de sapeurs-pompiers en 2014

Les quartiers défavorisés, principale cible

En France de façon générale, les agressions de pompiers se concentrent principalement dans les quartiers les plus désavantagés, et notamment « dans les zones urbaines », selon l’ONDRP. En cause : le sentiment de relégation, la misère économique, les relations parfois tendues avec les forces de l’ordre.

Mais pourquoi s’en prendre aux pompiers, dont la mission unique est de venir en aide aux habitants ? « Ces agressions trouvent leur origine dans la frustration d’une partie de la jeunesse de ces quartiers », analyse Sebastian Roché, politologue au CNRS et spécialiste de la délinquance. « Aussi étrange que cela puisse paraître, cette frustration s’exprime vis-à-vis de cibles totalement indistinctes. Elle peut aussi bien viser des enseignants, des infirmières, des sapeurs-pompiers, autant d’individus dont l’action quotidienne vise précisément à empêcher la relégation de ces quartiers… »