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Déchéance de nationalité : « On ne fait pas de politique avec la Constitution »

Jean-Pierre Mignard, le président de la Haute autorité éthique du Parti socialiste suggère de se baser sur l’indignité nationale qui avait été mis en place après la Seconde guerre mondiale pour condamner la collaboration.

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Plutôt que la déchéance de nationalité, Jean-Pierre Mignard prône « l’indignité nationale »

Par Gabriel Nédélec

Publié le 29 déc. 2015 à 14:41

Le président de la Haute autorité éthique du Parti socialiste, l’avocat Jean-Pierre Mignard, s’oppose, dans son état actuel, au projet d’élargir la déchéance de nationalité aux nés français et suggère avant toute chose de s’entendre avec le Maroc, l’Algérie et la Tunisie, avec qui la France compte de très nombreux binationaux. Il conseille aussi de modifier la loi plutôt que la Constitution qu’il définit comme « sacrée ».

Vous proposez une réécriture du projet. Que reprochez-vous au texte actuel ?

Tout simplement de créer une discrimination entre les binationaux et les autres. A l’heure actuelle, aucun texte ne mentionne le terme binationaux. L’inscrire dans la Constitution constituerait un signal dangereux. D’autant plus dangereux qu’il serait inutile : tous s’accordent pour dire que ce texte n’aura aucune portée pratique. S’il s’agit de prendre une mesure symbolique, celle-ci se doit d’être de l’ordre de la réunion, du rassemblement. Pas de la division. Mais si l’élargissement de la déchéance est maintenu, nous disposons d’alternatives. Au lieu de modifier la Constitution, ce qui est toujours très délicat, changeons la loi de mars 1998qui contient déjà des dispositions à ce sujet. Il suffirait par exemple de rajouter un alinéa. Par ailleurs, la formulation « Toute personne née française qui détient une autre nationalité » créait de fait une discrimination envers des millions de citoyens français qui n’ont aucun doute sur leur appartenance à la communauté française. Je suggère donc la phrase « tout Français qui... » en ajoutant « sauf dans les cas où il en résulterait une situation d’apatride ».

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Vous pointez les risques d’apatridie, mais la France s’est engagé à ne pas créer d’apatride...

L’apatridie existe dans les Constitutions du Maroc, de l’Algérie ou encore de la Tunisie. Des pays avec lesquels nous avons des milliers de binationaux. Il faut prendre en compte la possibilité d’une double déchéance qui, alors, entrerait en contradiction avec le droit international. Dans le monde ouvert actuel, on ne peut pas prendre une telle décision unilatéralement. Il faut au minimum s’entendre avec ces trois pays avec qui nous sommes engagés dans la lutte contre le terrorisme et qui en ont eux-mêmes beaucoup souffert. Ce serait l’occasion de renforcer nos liens avec eux et cela pourrait servir de base à un élargissement futur, pourquoi pas sous l’égide de l’ONU dans le cadre d’une convention particulière. Ce ne serait pas la première fois.

Vous prônez la notion « d’indignité nationale ». Quels avantages y voyez-vous ?

Si le but est le symbole, l’indignité nationale rentre parfaitement dans ce cadre, tout en ayant un véritable caractère punitif. L’indignité nationale, c’est la privation de tous les droits, temporairement ou à perpétuité. Cela a été utilisé après la libération en 1945 pour punir la collaboration. Et cela peut parfaitement s’appliquer au terrorisme puisqu’il s’agissait alors de sanctionner les Français qui ont tué d’autres Français. L’avantage, c’est que cela permet justement de ne pas se préoccuper des questions d’apatridie et de droit international. Mais aussi, cela évite de s’attaquer au code de la nationalité. Un code sacré pour la démocratie, au même titre que le code pénal et la Constitution. Je mets en garde : on ne fait pas de politique avec la Constitution.

Pensez-vous que le gouvernement peut encore faire marche arrière ?

On le peut toujours. Il faut assumer ses erreurs, tous les gouvernements en font. L’erreur ce n’est pas de commettre l’erreur, c’est de ne pas la corriger. Ce serait une preuve de sagesse qui serait mise au crédit du gouvernement. Ne nous précipitons pas, voyons déjà comment nous pouvons nous y prendre avec le Maroc, l’Algérie et la Tunisie, cela nous permettra de sortir par le haut de cette situation.

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