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FRANCE

"Attends, je vais chercher mon gun": à Calais, un groupuscule xénophobe menace les migrants

Capture d'écran d'une vidéo postée sur YouTube et sur le groupe Facebook ‘Calaisiens en colère’ le 18 décembre.
Capture d'écran d'une vidéo postée sur YouTube et sur le groupe Facebook ‘Calaisiens en colère’ le 18 décembre.
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Plusieurs vidéos postées ces derniers jours montrent les membres d’au moins un groupuscule xénophobe s’en prendre à des migrants à Calais, proférant des insultes racistes et les menaçant d’une arme à feu.

L’une des vidéos au moins a été mise en ligne sur YouTube par le groupe "Calaisiens en colère". Dans ce clip de vingt-trois secondes, on devine des migrants marchant de nuit. Une voix proche de la personne qui filme crie "c’est la guerre cette nuit".

Interrogé par France 24, un expert balistique indique qu’à 0'16", un bruit d’objet métallique en train d’être manipulé est percevable. Lorsqu’ils l’entendent les migrants se mettent d’ailleurs à courir. Juste avant la 20e seconde, on peut voir un objet qui pourrait être une arme de poing passer devant l’objectif et se refléter à la lumière. Un coup de feu– qui peut aussi être tiré à blanc – est également perceptible une seconde plus tard.

Video filmée à Calais et postée sur YouTube ainsi que sur la page Facebook "Calaisiens en colère" le 18 décembre.

 

"On est en France ici"

 

La deuxième vidéo dure près d’une minute trente. Elle montre des véhicules de la police française patrouillant le long d’une route, au bord de laquelle des migrants circulent habituellement. L’obscurité ne permet pas de les distinguer, mais les commentaires xénophobes des personnes autour du caméraman sont clairs : "fils de pute", "enculé", "bande de bâtards", lancent-ils aux migrants, alors qu’un autre répète "on est en France ici". A 1’01", on entend l’un d’eux dire : "attends, je vais chercher mon gun". Juste après, un autre demande "j’ai un flash-ball chef, je peux l’utiliser ?" [un flash-ball est une arme non létale qui tire des balles de caoutchouc et qui peut blesser].

Vidéo filmée à Calais et publiée sur YouTube.

Bien que les deux vidéos soient visibles en entier sur YouTube, une version écourtée de la première a été postée sur la page Facebook "Calaisiens en colère". La vidéo est coupée avant le son de l’arme à feu. Dans un post sur le blog ‘Passeurs d’Hospitalité’, Philippe Wanesson, militant associatif à Calais, note que plusieurs membres du groupe Facebook ont noté la différence entre les deux vidéos. L’un poste ainsi ce commentaire : "ils l’ont retiré de la vidéo parce que c’était quelque chose de pas commun. Pour éviter les poursuites envers la personne, évitez de dire quoi que ce soit sur ce qu’il manque".

Caputre d'écran de l'un des commentaires postés sous la vidéo sur le groupe Facebook "Calaisiens en colère".

Sur sa page Facebook, le groupe "Calaisiens en colère" se présente comme "apolitique" et dit avoir pour but "l'unité des Calaisiens face à l’insécurité due aux migrants". Il demande à ses membres d’éviter toute remarque raciste.

Sollicité par France 24, "Calaisiens en colère" n’a pas souhaité répondre à nos questions.

"Ils font cela pour propager un climat de peur et pour effrayer les migrants"

Claire Millot est la secrétaire générale de l’ONG française Salam, qui aide les migrants dans la "jungle "de Calais.

Il y a deux groupes qui organisent régulièrement des manifestations : "Sauvons Calais" et "Calaisiens en colère". Les migrants en ont peur. Beaucoup d’entre eux ont été attaqués. Ces gens arrivent en voiture, munis de bars de fer, et essayent d’attaquer les migrants hors du camp. Mais il n’est pas possible de faire le lien entre les groupes "Sauvons Calais" ou "Calaisiens en colère" et les individus qui ont mené les attaques. Chaque fois qu’il y a des affrontements, il n’y a ni police ni témoins… Ces individus font cela pour propager un climat de peur et pour effrayer les migrants.

Par le passé, de nombreux habitants de Calais accueillaient les migrants. Mais il semble que l’accroissement du nombre de migrants provoque une hostilité croissante à leur égard. C’est ainsi que des groupes comme "Calaisiens en colère", dont la création est assez récente, enregistrent de plus en plus de soutiens. Je peux comprendre que certaines personnes puissent avoir peur. Désormais, presque tout le monde ici est opposé à leur présence. Cela dit, pour avoir parlé avec les gens qui vivent à Calais, il semble que ceux qui participent aux manifestations contre les migrants ne sont même pas des habitants de la ville, mais viennent des environs.

"Calaisiens en colère" n’est pas le seul groupe à critiquer l’afflux de migrants dans la ville. En décembre, certains de ses membres ont été photographiés en train de manifester à coté de militants d’un groupe d’extrême droite.

"Il y a une différence entre le fait d’être en colère et inciter à la violence et à la haine"

Christian Salomé préside l’ONG Auberge des migrants.

Sur la page Facebook des "Calaisiens en colère", on peut voir beaucoup de gens incitant à la violence. Je ne dis pas que ce sont nécessairement des membres de ces groupes qui attaquent les migrants, mais ils diffusent des messages de haine. D’autres gens reçoivent ces messages et vont ensuite agresser les migrants. Des groupes crient et insultent les migrants presque chaque nuit. La police ne fait presque jamais rien pour les en empêcher. Je peux comprendre la colère des résidents de Calais, de voir des milliers de migrants qui soudainement, vivent dans leur ville. Mais il y a une différence entre le fait d’être colère et inciter à la violence et à la haine.

Article écrit en collaboration avec Andrew Hilliar (@andyhilliar), journaliste à France 24.

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