Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Québec, qui a fermé ses portes en 2021.

Monsieur le président de Google, je vous accuse!

Nous vous mettons au défi de supprimer totalement de votre moteur de recherche, toutes les images de décapitation et/ou faisant l'apologie du terrorisme et/ou provoquant publiquement à la discrimination, à la haine ou à la violence nationale, raciale ou religieuse.
This post was published on the now-closed HuffPost Contributor platform. Contributors control their own work and posted freely to our site. If you need to flag this entry as abusive, send us an email.

Monsieur Sundar Pichai, vous êtes le président de Google, dont le siège social est à Mountain View, Californie, États-Unis. Google est une filiale de la société Alphabet, fondée le 4 septembre 1998, dans un (le) garage Google, de la Silicon Valley, en Californie, par Larry Page et Sergueï Brin, créateurs (géniaux) du moteur de recherche Google. L'entreprise est connue dans le monde entier à travers la situation totalement monopolistique de ce puissant moteur de recherche, avant de devenir le géant par excellence de la Net économie. Google... se donne comme mission «d'organiser l'information à l'échelle mondiale et de la rendre universellement accessible et utile» (The Official Google Blog, «A bird's-eye view», sur googleblog.blogspot.com, 4 avril 2005, cité par Wikipédia). Admettons.

Il est vrai que le web est constitué de plusieurs milliards de milliards de documents, il faut donc bien utiliser un puissant moteur de recherche pour se retrouver dans cette invraisemblable jungle. J'utilise donc le vôtre. J'avoue être séduit par cette rapidité qui me permet en une fraction de seconde de trouver tout ce que je veux... indistinctement.

Indistinctement?

Comment fonctionne votre moteur de recherche? Permettez-moi de citer Google, car je ne suis guère un spécialiste de la chose:

«Lorsque vous effectuez une recherche Google, une liste de résultats provenant des quatre coins du Web s'affiche presque instantanément... Lorsque vous effectuez une recherche Google, nos programmes vérifient notre index afin de vous présenter les résultats de recherche les plus pertinents. Nous utilisons un nombre impressionnant d'ordinateurs pour explorer des milliards de pages Web. Le programme chargé de l'exploration s'appelle Googlebot (également désigné par les termes «robot» ou «robot d'indexation», ou encore «spider» en anglais). Le processus de Googlebot est basé sur des algorithmes; nos programmes informatiques déterminent les sites à explorer, la fréquence d'exploration et le nombre de pages à extraire de chaque site...»

Bref, la machine fait tout. Elle fouine, elle cherche, elle détermine minutieusement, elle extrait, elle indexe et livre alors le/un/les/des contenus, les mots, les phrases, les textes, les vidéos et les images. En vrac, en stock, en gros, en pâté de maison. La machine est surpuissante, elle remplace l'homme. Elle est si puissante qu'elle trouve de tout (ou presque) sur tout. Indistinctement, toujours.

Moi, voyez-vous, je me méfie des machines. Ce n'est pas que je sois has been, je conçois qu'il faille créer des outils performants pour nous permettre d'avancer, de prospecter, de trouver, d'indexer. Mais, je demande qu'il y ait d'un bout à l'autre de la chaîne des hommes (oui, des hommes, des HOMMES) pour vérifier ce que l'on ne voit pas, via... Google, des choses qui attentent à l'Humanité. Tout simplement parce que le monde virtuel ne doit pas être le refuge de toutes les provocations, haines et violences qui bafouent constamment la nature humaine, qui salissent constamment la nature humaine, qui heurtent notre conscience humaine.

Je vous accuse donc:

1) On peut affirmer que des groupes ou groupuscules radicaux qui déclinaient, tant en Europe qu'aux États-Unis ou dans le Monde arabe, ont pu retrouver, grâce aux sites qu'ils ont créés, un second souffle. Pour certains, on peut même parler de renaissance, tant le nombre de connectés est important et peut surprendre. Le Net n'a certes pas inventé la propagande. Il n'est certes pour rien dans la fondation de ces mouvements et leur développement. D'autres paramètres permettent d'expliquer ce que sont ces mouvements, les stratégies élaborées, les liens qu'ils entretiennent entre eux et l'impact qu'ils peuvent avoir. Évidemment, on ne tombe pas automatiquement sur les pages Web de sites djihadistes. Il faut vouloir les trouver. Il n'en reste pas moins que l'on peut trouver ce genre de sites, car ils sont TROP facilement indexés dans les moteurs de recherche. À ce propos, imaginons qu'un élève de collège ou de lycée se doive de préparer un exposé sur la Shoah ou le génocide arménien. Une simple connexion sur un moteur de recherche et la saisie du mot clé «Shoah/génocide arménien» lui donnent accès à une quantité gigantesque de documents qui traitent de la question. Seulement, aucun distinguo n'est fait entre les documents listés sur le moteur de recherche, pas le moindre avertissement. Le moteur référence ce qu'il trouve et ne sait évidemment pas distinguer entre les travaux historiques acceptés par la communauté scientifique et un texte écrit par un négationniste ou un néo-nazi. Le lycéen - quoiqu'on en pense - ne dispose pas forcément des repères nécessaires lui permettant de retenir l'un de ces textes et d'écarter l'autre.

2) De fait, les sites racistes et antisémites peuvent être consultés via Google et les moteurs de recherche et nul ne doit plus ignorer aujourd'hui ce que l'on peut alors découvrir grâce à des moteurs de recherche qui indexent tout, indistinctement.

3) Sur Google, j'ai tapé le mot «décapitation», au singulier. J'ai cliqué sur l'onglet «Images» de votre moteur de recherche et c'est avec consternation, horreur et dégoût que j'ai vu que plusieurs occurrences (tendance de recherches) sont proposées : «Décapitation Mexique», «Décapitation en direct», «Décapitation publique», «Décapitation Arabie Saoudite», «Décapitation Moyen-âge», «Décapitation au sabre».

Dans toutes ces occurrences, Google Images indexe et renvoie vers des photos monstrueuses, particulièrement inhumaines, d'une violence inouïe. Je vois par exemple, des jambes en train de jouer au football avec la tête -je dis bien la tête- d'un homme qui a été décapité, tête maculée dans son sang. Il s'agit en l'occurrence d'un homme. Je vois aussi ici la photographie immonde d'un homme qui a été décapité par les islamistes de Daech, tête posée sur son propre corps. Je vois les photographies innombrables de journalistes et d'otages qui allaient être décapités par Daech. Dans un cérémonial de mort, les terroristes font poser ces hommes, avant de les supplicier. Je vois les photographies de barbares qui brandissent des couteaux, affutés, tous les objets de la mort, de l'horreur et de la bestialité.

Il y a peu, Marine Le Pen postait plusieurs photos choquantes des victimes de Daech sur son compte Twitter dont un cliché illustrant la décapitation du journaliste James Foley, pour répondre à Jean-Jacques Bourdin qui faisait un parallèle entre Daech et son parti. Wallerand de Saint Just, candidat FN aux élections régionales 2015 en Ile-de-France rejetait la faute... sur Google: «elle est accessible, cette photo...», disait-il, sur Google. En effet, toutes ces photographies sont accessibles.

Google ne diffuse pas. C'est vrai. Il indexe, nuance. Même s'il rend accessible le contenu que personne ne trouverait sans son aide. Il est vrai aussi que sans la création d'une infraction d'indexation «sauvage», aucun recours (pénal) n'est possible contre Google.

Monsieur Sundar Pichai, vous êtes un être humain, doté d'une conscience et d'une humanité, probablement. Vous avez une famille, peut-être... Non? Pas qu'un business modèle, en tête?

Nous vous mettons alors au défi aujourd'hui de supprimer totalement et intégralement de votre moteur de recherche, toutes les images de décapitation et/ou faisant l'apologie du terrorisme et/ou provoquant publiquement à la discrimination, à la haine ou à la violence nationale, raciale ou religieuse.

Car, vous le savez mieux que quiconque... les outils permettant d'exclure automatiquement certains contenus existent. Ils sont à l'œuvre en matière de contrefaçon, là où les enjeux financiers «concernent» les géants du Net. Pourquoi ne les utilisez-vous pas lorsque cela est réellement nécessaire ? Est-ce ou serait trop vous demander ?

Sommes-nous alors des censeurs, nous qui nous battons pour que le Net soit régulé de ces scories? Sommes-nous liberticides, nous qui considérons que le racisme n'est pas une opinion, mais une tare, une tache indélébile? Sommes-nous dangereux, nous qui rêvons d'un Net et d'un monde débarrassé de ces horreurs? Sommes-nous dangereux, nous qui nous appuyons sur les conventions, chartes et traités internationaux, dûment signés et acceptés par tant de pays et de peuples? Est-ce nous qui sommes dangereux ou les autres? Ceux qui se taisent lorsque des pages attisent la haine, discriminent, poussent au meurtre? Et foulent au pied les plus élémentaires des droits: les droits de l'homme.

VOIR AUSSI SUR LE HUFFPOST

Les produits anti-Google de Microsoft

Close
Cet article fait partie des archives en ligne du HuffPost Canada, qui ont fermé en 2021. Si vous avez des questions ou des préoccupations, veuillez consulter notre FAQ ou contacter support@huffpost.com.