Le choc était attendu et personne ne s’est dérobé. Depuis que Ted Cruz, sénateur du Texas, talonne ou même devance Donald Trump, selon les études, dans l’Iowa, premier Etat à se prononcer pour la course à l’investiture républicaine, le 1er février, il est devenu la cible d’une boule de démolition, celle du magnat de l’immobilier. Leur affrontement a dominé le sixième débat opposant les principaux candidats républicains, jeudi soir 14 janvier à North Charleston, en Caroline du Sud.
M. Trump a eu à répondre du poison du doute qu’il distille depuis le 4 janvier en évoquant une hypothétique inéligibilité de son rival liée à son lieu de naissance : Calgary, au Canada. « En septembre, mon ami Donald affirmait (…) que ce n’était pas un sujet. Depuis, la Constitution n’a pas changé, mais les chiffres des sondages, eux, ont évolué », a ironisé M. Cruz, qui a fait valoir qu’il est né américain du fait de la nationalité de sa mère. Accusé, M. Trump n’a pas reculé. « Un énorme point d’interrogation pèse sur votre candidature, vous ne pouvez pas faire ça au parti », a-t-il répliqué.
La tension est une nouvelle fois montée lorsque le sénateur du Texas a été mis en demeure à son tour de s’expliquer sur une accusation portée contre le milliardaire. Alors que Donald Trump utilise désormais dans ses réunions électorales la chanson Born in the USA de Bruce Springsteen, Ted Cruz lui a suggéré le 12 janvier en suggérant de faire jouer plutôt New York New York de Liza Minelli. « Donald est de New York, il incarne les valeurs de New York », avait ajouté le sénateur, pour alimenter les interrogations sur les lettres de créances conservatrices du milliardaire.
« Tout le monde sait que les valeurs de New York sont sociales-libérales, pro-avortement et pro-mariage gay », s’est justifié jeudi le sénateur, qui fait campagne à la droite du Parti républicain. « Propos insultants », a rétorqué M. Trump, convoquant aussitôt les heures sombres du 11-Septembre et « l’odeur de mort » qui avait enveloppé la ville, contraignant son adversaire à applaudir en hommage à la ville meurtrie.
Jeb Bush réalise sa meilleure performance
Alors que le président Barack Obama et la favorite pour l’investiture démocrate Hillary Clinton ont été comme de coutume unanimement accablés, ces échanges tendus mais finalement maîtrisés ont, en fait, servi les deux hommes qui dominent la course à l’investiture. Ils leur ont permis d’escamoter leurs rivaux, souvent réduits au rôle de faire-valoir. Après avoir fait l’étalage au cours des premiers débats de son agilité intellectuelle et de son sens de la repartie, le sénateur de Floride, Marco Rubio, est apparu cette fois-ci emprunté et sur la défensive. Il s’est efforcé de profiter de l’ascendant de M. Cruz en l’attaquant frontalement en fin de débat, mais sans en tirer profit.
Au contraire, l’ancien gouverneur de Floride, Jeb Bush, donné favori il y a un an avant de s’effondrer dramatiquement dans les intentions de vote, a réalisé sans conteste sa meilleure performance, attaquant notamment avec conviction l’idée avancée par M. Trump d’interdire l’accès des musulmans étrangers au territoire américain.
A quinze jours de la première véritable échéance électorale, ce sixième débat n’a pu enfin qu’accroître l’inquiétude de la direction du Parti républicain. Parmi les onze candidats encore officiellement en lice, les francs-tireurs apparaissent plus forts que jamais, alors qu’aucun de ceux qui sont considérés comme modérés n’a pris l’ascendant sur ses concurrents, au risque de diviser durablement l’électorat auquel ils s’adressent.
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