« J’aime faire des pipes à mes sandwiches » Les propos choquent, ils sont pourtant l’expression d’une triste réalité au quotidien dans le monde de la publicité où le sexisme ordinaire semble avoir pris une part plus importante que jamais. Un phénomène particulièrement observé aux États-Unis et dénoncé par un groupe féministe à travers une vidéo choc, sans commentaire : #WomenNotObjects (Les Femmes ne sont Pas des Objets).

Si « la femme » a indéniablement gagné en liberté, en occident, ces dernières décennies, l’égalité est encore loin et le monde marchand n’a jamais réellement cessé d’exploiter son image d’une manière souvent dégradante dans le but de vendre un certain modèle de société. Le sexisme dans le monde de la pub est aujourd’hui tellement ordinaire que beaucoup ne le remarquent plus. Cette sous-culture se faisant parfois créatrice de pensée, nombre d’individus viennent même à la défendre. La femme y est trop souvent représentée comme une esclave sexuelle, un symbole de désir, un morceau de viande ou encore une cruche décérébrée réduite à un simple objet de consommation. Les pontes du neuromarketing ne peuvent le contredire, titiller nos instincts les plus primaires à l’aide d’images sexualisées est un accès cognitif redoutable pour vendre un produit quelconque autant aux femmes qu’aux hommes. L’image de la femme, elle, n’est pas au cœur de leurs considérations.

Cette « beaufitude » ordinaire est devenue insupportable pour nombre de femmes qui ne se reconnaissent pas dans cette vision machiste de la féminité. Instagram, par exemple, est devenu un véritable temple de la publicité indirecte pour des annonceurs peu scrupuleux qui utilisent des images hyper-sexualisées pour faire discrètement la promotion de produits. Un collectif vient de réaliser une vidéo sans concession pour dénoncer ce sexisme ordinaire qui va jusqu’à s’insinuer sur les réseaux sociaux. Sous le nom du mouvement et hashtag #WomenNotObjects, ces femmes invitent les utilisateurs, hommes et femmes, à ouvrir les yeux sur cette réalité pour mieux la combattre. Malheureusement, la tâche s’annonce particulièrement difficile, particulièrement dans une Amérique où la montée de la pensée réactionnaire est palpable, symbolisée dernièrement par l’ascension médiatique de Donald Trump. Quelques heures après la diffusion du clip, la section commentaire de leur page Youtube fut noyée dans une marée d’insultes.

#WomenNotObjects

L’humain, ce produit comme les autres

Alors que les mouvements les plus conservateurs continuent de marteler à qui veut bien les écouter que le féminisme serait la cause même de ces dérives, sociologues et historiens s’accordent à dire, avec raison, que ce sont les institutions capitalistes qui ont récupéré le phénomène d’émancipation des femmes pour en faire un pur produit de consommation. Cette objectification de la femme (ainsi que de l’homme, par la force des choses) est précisément le fruit d’un système économique fondamentalement patriarcal à l’opposé même des luttes féministes visant l’égalité des sexes et surtout leur respect. Le brillant reportage Princesses, pop stars & girl power signé Arte avait dernièrement exposé cette réalité complexe et les liens indéfectibles entre les promoteurs de l’économie triomphante et les mouvements anti-féministes. « On y apprend que ce n’est pas le processus de liberté en lui-même qui est responsable de la situation actuelle, mais bien l’instrumentalisation du mouvement d’émancipation par les institutions du libre marché. Et cette instrumentalisation de la « femme objet » n’est-elle pas le signe d’un patriarcat latent au sein même de la logique marketing ? » précisait-on en 2014.

Et, en effet, l’émancipation des femmes, c’est tout sauf leur assujettissement au marché. Le mouvement #WomenNotObjects prend ici tout son sens, sans perdre de vue que le processus d’objectification concerne de plus en plus les hommes, et plus généralement l’humain, dissous dans le consumérisme.

La vidéo

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Source : womennotobjects.tumblr.com / twitter.com

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