Il est donc possible de manifester contre l’état d’urgence durant l’état d’urgence. Plusieurs milliers de personnes ont défilé samedi 30 janvier à Paris et dans des dizaines de villes de France pour la levée de l’état d’urgence et contre la réforme constitutionnelle. Dans la capitale, quelque 5 500 manifestants selon la préfecture de police (20 000 selon les organisateurs), ont défilé sous une pluie battante entre la place de la République et le Palais-Royal.
Revivez la manifestation parisienne
L’état d’urgence en lui-même n’interdit pas les manifestations si tant est que le préfet n’a pas pris un arrêté à cet effet. Depuis sa mise en place le 14 novembre, la préfecture de Paris avait déjà interdit des manifestations en Ile-de-France dans le cadre de la COP21. Mais la manifestation de samedi n’ont pas été désapprouvée par la préfecture de police qui a reçu la déclaration – une manifestation sur la voie publique n’étant pas soumise à autorisation mais simplement à déclaration.
« Le refus de la manifestation n’était pas exclu, on s’est posé la question jusqu’au bout », concédait ainsi la présidente de la Ligue des droits de l’homme (LDH), Françoise Dumont, dont l’association fait partie du collectif « Nous ne céderons pas ! » qui appelait à manifester au côté du collectif « Stop état d’urgence ». Derrière ces deux collectifs, plus d’une centaine d’organisations – associations (LDH, Attac, Droit au logement, Collectif contre l’islamophobie en France…), syndicats (Syndicat de la magistrature, CGT, FSU…) mais aussi quelques formations politiques (NPA, PG…) – se sont mobilisées.
Manifestations dans 70 villes
Samedi après-midi, dans plusieurs dizaines de villes en France – environ soixante-dix, selon la liste diffusée –, des manifestations se sont déroulées dans le calme.
« On attend que la société civile se mobilise pour dire qu’elle n’est pas d’accord pour sacrifier ses libertés au nom de la sécurité. L’état d’urgence ne peut pas devenir un état permanent », soulignait avant le début de la manifestation Françoise Dumont, consciente de l’ampleur du défi, à l’heure où « l’émotion est encore vive » après les attentats :
« Beaucoup de Français considèrent que sans état d’urgence la police ne pourra rien faire, ce qui est faux : l’arsenal législatif antiterroriste existe déjà. Nous voulons affirmer qu’il est possible que l’Etat protège les citoyens face au terrorisme sans remettre en cause les droits et les libertés. »
Faire pression sur les députés
Objectif de la mobilisation : appeler à une levée immédiate du régime d’exception en vigueur jusqu’au 26 février – à l’heure où le gouvernement s’apprête à présenter mercredi un projet de loi visant à le prolonger à nouveau de trois mois –, s’opposer à l’extension de la déchéance de nationalité mais aussi faire pression sur les députés pour qu’ils votent contre le projet de réforme constitutionnelle.
« On peut exercer un effet levier sur les députés dont le vote serait encore hésitant, estime Françoise Dumont, il faut qu’ils aient le courage d’aller contre une partie de l’opinion publique en constatant qu’une autre partie les soutiendra dans leur choix ».
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