Gorbatchev dit sa «honte de Poutine et Medvedev»

Mikhail Gorbachev [Veni/Flickr]

Dans une interview russe publiée le 1er février, l’ancien président de l’Union soviétique, Mikhaïl Gorbatchev fait la critique sévère du président Vladimir Poutine et du Premier ministre, Dimitri Medvedev.

Selon le dernier dirigeant soviétique, Vladimir Poutine s’est emparé du pouvoir de manière illégale, avec l’aide de factions sans scrupules. Mikhaïl Gorbatchev estime que si les élections étaient libres en Russie, il y aurait beaucoup plus de groupes d’opposition. L’omniprésence des forces de sécurité est inacceptable, selon le dernier chef d’État communiste.

L’Occident tient en haute estime Mikhaïl Gorbatchev, qui a facilité le démantèlement pacifique de l’empire soviétique. Dans son propre pays toutefois, il est beaucoup moins apprécié. C’est la première fois qu’il critique aussi directement le pouvoir actuel en Russie.

Au début de l’interview, Mikhaïl Gorbatchev affirme que Vladimir Poutine dirige le pays via des amitiés personnelles. « Des amis de l’école, des gens avec qui il jouait au football dans la rue ».

« Pour moi, ce type de ‘relations personnelles’ est inacceptable », a-t-il dit à Lyudmila Telen, rédactrice en chef du site Radio Svoboda, qui a enchainé en disant : « C’est pour ça qu’il ne se fait pas trahir. Alors que vous, vous avez été trahi. »

Pour Mikhaïl Gorbatchev, c’est Vladimir Poutine qui trahit les gens, en s’appropriant des biens publics, en prétendant réformer alors qu’il ne fait que s’enfoncer dans plus de corruption. Partout dans le monde, on observe un retour des régimes autoritaires et des dictatures. « En Russie aussi ? », a demandé la journaliste. « Oui », a répondu Mikhaïl Gorbatchev, qui considère que la déficience des institutions russes laisse la porte ouverte à l’abus et l’arbitraire.

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« Nos dirigeants aiment gouverner manuellement », a-t-il déclaré. Lorsque la journaliste lui a demandé ce qu’il signifiait, Gorbatchev a répondu « parce qu’ils n’ont pas été élus », avant d’expliquer qu’après 1990, les élections russes sont devenues encore moins libres qu’elles ne l’étaient durant l’ère soviétique.

La journaliste a affirmé que la Russie avait une tendance à l’autoritarisme et a demandé à Mikhaïl Gorbatchev comment il avait échappé à cela lorsqu’il était au pouvoir. Il a répondu que cela dépendait de la personnalité de la personne aux commandes du pays, et de son expérience.

« Ils ont une expérience différente, ils gèrent le pays manuellement et jouent sur la peur », explique Mikhaïl Gorbatchev, qui cite Victor Cherkesov, un membre des services de sécurité russe, pour qui l’actuel système est tchékiste. [La Tcheka est le prédécesseur du KGB, fondé par Lénine].

« J’ai failli en faire partie. On m’a invité à en faire partie », a-t-il déclaré, faisant référence au KGB de l’Union soviétique. « Mais vous avez refusé », a souligné la journaliste. « Ce n’est pas la question », a-t-il répondu, de manière détournée. La suprématie des structures de sécurité, leurs prérogatives excessives pour prendre des décisions politiques ou interférer dans la vie des gens sont inacceptables ». Selon Mikhaïl Gorbatchev, le pays a cruellement besoin d’un nouveau système électoral, qui donnerait au peuple le droit réel de choisir.

Sans cela, le vainqueur des prochaines élections serait Poutine, comme pour les suivantes, a demandé la journaliste. « Je n’ai pas dit ça », a répondu Mikhaïl Gorbatchev, avant d’expliquer qu’il rejetait l’idée d’un système dans lequel deux personnes décident de tout. « J’ai honte pour eux. Ils agissent de manière indécente, comme s’il n’y avait pas de société, pas de Constitution et pas de système électoral. Ils décident tout entre eux. Mais combien sommes-nous ? 140 millions ? Je n’aime pas ça. Ils se prennent pour les sauveurs de la patrie », a-t-il estimé.

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