Ces ministres qui n'ont pas de métier

La ministre du Travail est l'incarnation d'une singularité française : les membres du gouvernement n'ont souvent rien connu d'autre que la politique ou l'Ena.

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Excepté le ministre de l'Économie Emmanuel Macron et quelques autres, les membres du gouvernement de Manuel Valls ne brillent pas par une expérience professionnelle autre que la politique.
Excepté le ministre de l'Économie Emmanuel Macron et quelques autres, les membres du gouvernement de Manuel Valls ne brillent pas par une expérience professionnelle autre que la politique. © Olivier CORET

Temps de lecture : 3 min

La nouvelle ministre du Travail, Myriam El Khomry, se trouve en première ligne dans le combat contre le chômage. Un fléau dont elle a une connaissance plutôt théorique puisque, dès ses études terminées, elle est devenue la collaboratrice d'Annick Lepetit, maire du 18e arrondissement puis députée de Paris. Elle s'est lancée dans la politique à trente ans à peine, comme adjointe au maire de la capitale Bertrand Delanoë.

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Elle n'est pas seule dans ce cas, loin de là. Le chef du gouvernement Manuel Valls n'a qu'une idée lointaine du fonctionnement d'une entreprise puisqu'il est devenu attaché parlementaire du député de l'Ardèche Robert Chapuis en 1983. Il avait alors tout juste 21 ans. Cinq ans plus tard, il intégrait le cabinet de Michel Rocard à Matignon, un lieu qu'il connaît donc depuis longtemps.

Le Drian, Fabius et les autres

Le numéro deux du gouvernement, Laurent Fabius, a tout juste eu le temps de s'installer au Conseil d'État, à sa sortie de l'Ena, avant de se placer dans le sillage de François Mitterrand, dont il est devenu le directeur de cabinet en 1979. Son secrétaire d'État aux Affaires européennes, Harlem Désir ? À part une brève incursion dans le secteur privé comme animateur de radio, il est passé de SOS Racisme au Parti socialiste, après un bref détour par l'écologie. Quant à Ségolène Royal, sortie de l'Ena en 1980, elle n'a guère eu le loisir d'entrevoir les murs du tribunal administratif avant d'entrer au cabinet de la ministre des Affaires sociales Nicole Questiaux, puis de rejoindre l'Élysée de Mitterrand. Également issu de la promotion Voltaire, également affecté au tribunal administratif, le ministre des Finances Michel Sapin ne s'y est pas attardé non plus puisqu'il a été élu député dans la vague rose de 1981. Il avait 29 ans.

Maître assistant à l'université pendant quelques années, Jean-Yves Le Drian n'a rien connu d'autre que la politique depuis 1981. Najat Vallaud-Belkacem a été brièvement juriste avant de rejoindre l'équipe du sénateur-maire de Lyon Gérard Collomb.

Profession : politique

Marisol Touraine, ministre des Affaires sociales, est passée de l'Ena à une courte carrière administrative, avant d'intégrer le cabinet de Michel Rocard à Matignon. Et Sylvia Pinel, ministre du Logement, n'a connu que les bureaux du conseil général du Tarn-et-Garonne, fief de son protecteur Jean-Michel Baylet, avant d'être élue députée, puis nommée ministre... Il n'y a guère que Bernard Cazeneuve à avoir une expérience du secteur privé puisqu'il fut un temps cadre à la Banque populaire. Stéphane Le Foll a pour sa part été professeur d'économie pendant une quinzaine d'années. Sans oublier Emmanuel Macron, à qui certains reprochent assez son passage chez Rothschild & Cie. C'est peu.

Les gouvernements nommés sous Chirac et sous Sarkozy ne regorgeaient pas non plus de personnalités bardées d'expériences dans le monde réel, celui de la concurrence et des « vraies gens ». Citons tout de même, pour l'équipe de François Fillon, Christine Lagarde, Luc Chatel, Jean-Louis Borloo ou Éric Besson, tous immergés un temps dans des expériences professionnelles intenses et éloignées de l'univers politique. D'aucuns prétendent que la politique, justement, est un métier et que les pièces rapportées de la société civile font de mauvais ministres. Ce n'est pas une raison pour tomber dans un recrutement monolithique et caricatural, qui contribue à éloigner ceux qui dirigent le pays des préoccupations quotidiennes des Français.

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Commentaires (88)

  • RUGBY1948

    Même si c'est difficile à admettre il faut bien reconnaître que les articles de Sophie Coignard, dans le Point nous obligent à regarder EN FACE quelques vérités politiques qui expliquent pourquoi notre système aboutit de facto à creuser le fossé entre les citoyennes et citoyens et "celles et ceux qui nous gouvernent". Pour espérer une oxygénation de la vie politique il faudrait d'abord imposer le non-cumul des mandats (stricto-sensu et sans "passe-droit") mais aussi s'attaquer aux rému- nérations et autres avantages de nos députés, sénateurs, élu(e)s européens ainsi que celles des grands corps d'Etat (hauts fonctionnaires)Autant de moyens drastiques que se gardent bien d'aborder nos élu(e) s tous bords confondus. Cette moralisation est un serpent de mer dont peu de gens parlent mais serait pourtant salutaire, dissuasif et financièrement oxygénant pour les finances du pays.

  • berrichon 93

    Tant que nous serons gouvernés par des théoriciens plutôt que des praticiens il n'y aura pas de redressement possible. Un humoriste disait : "mettez 2 énarques dans le désert, dans 2 ans ils sont obligés d'importer du sable". Avec le club de la promotion "Voltaire" condisciples de Mr Hollande, il ne leur aurait fallu que 6mois.

  • US-D-F

    De ce ppoint de vue, on ne peut même pas leur reprocher de ne rien comprendre á la réalité tout court, sans paler d'entreprise. Ils ne la connaissent pas, mais vraiment pas du tout ! Arrètons de produire des "reformes" á qui mieux mieux, c'est l'appearillage gouvernemmental qu'il faut reformer !
    Le model anglo-saxon serait un bon exemple...