Depuis longtemps déjà, les Français ont en tête le mythe de Superman. Cette version modernisée, américanisée, du culte de l’homme providentiel nous habite depuis la monarchie autoritaire. Un nouvel exemple récent ? Il y a quelques jours, Bruno Le Maire a livré sa déclaration de candidature à la primaire présidentielle de la droite. Il s’était fait tout beau pour déclarer sa flamme au pays, en même temps que cette conviction: "Les sauveurs suprêmes, c’est du passé".
Mais que lui ont offert ses fans sitôt clos son propos? Une superbe représentation de Bruno Le Maire en … Superman. Il était un peu trop mignon sans doute, Le Maire-Superman, il faisait penser à cet étudiant américain qui, lors d’un examen, s’était costumé en super héros pour fuir l'épreuve, mais n’avait pas réussi à trouver la porte de sortie de l'amphithéâtre… En effet, ça ne s’improvise pas de devenir un personnage mythologique plein de super pouvoirs, tout en le refusant le plus souvent. Car en politique, les Français ne veulent en réalité ni Dieu ni César ni tribun.
Et cependant, ils en veulent quand même, les Français, de ce super héros mythique et mythologisé !
Les Français sont en effet possédés, aliénés même, par cette quête obsessionnelle d’un Roi, d’un Bonaparte, d’un de Gaulle qui pourraient guider le peuple, relever le pays, et le sortir de la crise. La droite en particulier est hantée par cette culture cheffaillone du chef qui doit cheffer. Et c’est bien parce qu’elle n’a plus de patron que Les Républicains partent en vrille. Car un parti bonapartiste sans Bonaparte, c'est comme un baiser sans moustache, ça n’a ni saveur ni âme. Pour se rassembler, il faut à LR un guide, un général en chef, un super héros. Chirac le fut. "Super menteur" était bel et bien super quelque chose. La droite a eu ensuite Super Sarkozy, mais pendant quelques temps seulement!
Les héros sont fatigués !
Pendant la campagne présidentielle de 2007, Nicolas Sarkozy fut en effet super dominant, super emballant. Très Bonaparte, il prenait chaque jour le pont d’Arcole. Mais il a fini par passer à côté, par enfoncer les portes ouvertes ou faire claquer, même celles qui étaient fermées. Ce nouveau "Napoléon le petit" devint l’objet de toutes les railleries. On le moquait : "Certaines personnes portent un pyjama Superman, Superman porte, lui, un pyjama Sarkozy". Sauf que le vent a fini par tourner. Sarkozy a perdu la magie, et le président sortant, lors de la campagne présidentielle de 2102 eut beau reprendre la musique de Superman pour son grand meeting de Villepinte, même en montant sur l'estrade, il n’était plus à la hauteur du mythe!
À ce même instant, François Hollande incarnait le héros anti-héros Il revendiquait une "présidence normale", ce qui pouvait représenter une espérance démocratique héroïque. Il l'abandonnera une fois à l'Élysée. Il flottait dans le costume d’homme providentiel, et il était partout ridiculisé en "Super-Andouille". Désenchanteur national, le chef de l'état décevait même la gauche, où certes l’on a des songes de vraie démocratie, mais où l'on rêve aussi de monarchie ! On attend, à gauche aussi, une Autorité, une Force. Mais, pour notre super production à nous, il faudra repasser car nos héros sont fatigués. Ils sont en slip. Alors que Superman n'en porte même plus sur son pantalon!
