Myriam El Khomri au Pôle Emploi de Saint-Ouen, au nord de Paris, le 24 février 2016

Après son "malaise", Myriam El Khomri, photographiée ici au Pôle Emploi de Saint-Ouen le 24 février 2016, doit revenir rapidement sur le devant de la scène.

AFP/Dominique Faget

Myriam El Khomri au bord du burn-out? La question se pose, ce mardi, après un léger malaise de la ministre du Travail, qui l'a contrainte à annuler ses rendez-vous médiatiques et professionnels de la journée.

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Un "accident domestique", assure François Hollande, qui ajoute que la ministre sera "sur pied dès ce soir", louant au passage "une femme de convictions".

D'après ses proches, elle se serait "cognée la tête après avoir glissé dans sa douche". Le mardi matin, son entourage évoquait pourtant un "petit malaise", sans plus de précisions. "Rien de grave, tout va bien", assure la principale concernée, dans un message diffusé sur Twitter,

"Petit malaise" contre "accident domestique", les versions divergent mais le constat est le même: depuis son arrivée rue de Grenelle, en septembre dernier, Myriam El Khomri n'est pas épargnée par la critique.

En novembre, elle avait elle-même donné prise aux attaques en s'emmêlant les pinceaux, en direct sur BFMTV, à propos du nombre de renouvellements possibles de CDD. Malgré ses explications et le soutien de ses collègues, son image en est restée écornée.

El Khomri, entre admiration et déception

Rebelote mi-février. Jusque-là inconnue du grand public, elle est la cible de critiques virulentes, pour porter le projet de loi sur la réforme du code du travail, un texte rejeté pèle-mêle par une partie de la gauche, les syndicats ou les jeunes socialistes.

Pour tenter de calmer le jeu, le 29 février, Manuel Valls reporte la présentation du projet de loi. 24 heures plus tard, ce mardi matin, Myriam El Khomri est hospitalisée.

Officiellement, il n'y a aucun lien, mais le symbole est lourd.

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"C'est très injuste ce qui lui arrive", explique à L'Express Felix Beppo, adjoint socialiste du 18e arrondissement de la capitale, là où est élue depuis plusieurs années la ministre du Travail.

Place Jules Joffrin, le même sentiment domine, l'admiration... teintée d'une pointe de déception. Myriam El Khomri est décrite comme une femme "compétente" et "bosseuse", mais on s'y demande "ce qu'elle est allée faire dans cette galère?" résume Ian Brossat, élu communiste de l'arrondissement et adjoint au logement de la maire de Paris.

A demi-mots, les plus étonnés parlent d'un choix "carriériste", voire, comme Pascal Julien, élu écologiste du même arrondissement, "opportuniste".

Une (ancienne?) aubryste

"Ce texte est aux antipodes de ses valeurs, s'étonne-t-il. En acceptant de le défendre, elle se renie. Elle qui était pourtant de gauche, assez proche des écolos - et j'emploie l'imparfait à dessein... Elle a même soutenu Martine Aubry à la primaire socialiste!" Félix Beppo renchérit: "Je ne sais pas si Myriam El Khomri a oublié qu'elle était aubryste, mais ça a l'air d'être de l'histoire ancienne".

"Il y a deux ans, Myriam El Khomri était porte-parole de la candidate Anne Hidalgo, elle s'est engagée à ses côtés contre l'extension du travail dominical dans la capitale et se retrouve aujourd'hui à défendre un texte qui détruit les droits des salariés!" persifle un conseiller de Paris qui la connaît bien.

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La benjamine du gouvernement a-t-elle les épaules assez solides pour encaisser? "C'est une ministre comme les autres, assure Pascal Julien, et elle se doutait bien qu'en acceptant un job de chargée de mission, elle en prendrait plein la figure", relativise Pascal Julien, persuadé que l'avant projet de loi sur la réforme du code du travail a été préparé en amont et est téléguidé depuis Matignon.

Une théorie également soutenue par un ancien conseiller de la ministre, Pierre Jacquemain, qui a claqué la porte récemment, non sans égratigner ce dimanche Manuel Valls, dont il est persuadé qu'il a rédigé de A à Z le projet de loi controversé.

"El Khomri n'est pas le problème"

Parmi ses collègues du 18e arrondissement, certains veulent continuer à croire, comme François Hollande, que Myriam El Khomri est une femme de convictions. "Je refuse de la juger. Ce qui la motive, c'est de faire réussir le président de la République, croit savoir Félix Beppo. Elle a fait un compromis entre ses valeurs et la dynamique générale. Elle a été embarquée dans une ligne gouvernementale qui pose problème, mais elle n'est pas le problème."

"Myriam ce n'est pas Macron, elle n'est pas libérale, résume une élue parisienne. Et ce n'est pas une opportuniste non plus. On est toujours venu la chercher et, à chaque fois, pour lui faire des propositions qui ne se refusent pas. Mais, c'est une fille d'une loyauté à toute épreuve. Elle a pris des engagements et considère qu'elle doit aller jusqu'au bout", défend cette proche de la ministre.

Jusqu'au bout c'est-à-dire en présentant le projet de loi, rebaptisé loi sur "les nouvelles protections pour les entreprises et les salariés", le 24 mars prochain en conseil des ministres. Le texte poursuivra ensuite son bonhomme de chemin parlementaire. Il s'annonce semé d'embûches.

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