HAUTE-SAVOIE Annecy : excédés, des riverains posent des panneaux "Vente d’héroïne"

Stéphane BOUCHET - 03 mars 2016 à 06:03 | mis à jour le 17 avr. 2021 à 19:16 - Temps de lecture :

Mardi, alors qu’ils circulaient sur le boulevard de la Corniche, l’étroite route qui serpente au pied du Semnoz, les policiers annéciens ont fait une étrange découverte : un panneau indiquant “Vente d’heroïne”, inscrit en rouge sur blanc et visible de loin.

Depuis quatre ans, l’agglomération annécienne a effectivement vu fleurir de nombreux points de vente de cette drogue redoutable. Un trafic organisé par les réseaux mafieux albanais, contre lesquels la police et la gendarmerie mènent une lutte constante et féroce.

Une lutte qui a conduit à l’arrestation de plus d’une vingtaine de ressortissants albanais, à la saisie de plusieurs dizaines de kilos de drogue et de produits de coupe, sans parler des sommes d’argent liquide trouvées lors des perquisitions. Mais malgré les efforts déployés par les forces de l’ordre et la justice, les réseaux se reconstituent aussi vite qu’ils sont dissous.

Les policiers municipaux arrivent en pleine transaction

Avec un bénéfice évalué à plusieurs centaines de milliers d’euros par an, il n’est pas difficile de trouver de nouveaux vendeurs. Parmi les points de vente répertoriés, figurent justement les bois du Semnoz, dans lesquels les policiers annéciens ont effectué plusieurs arrestations.

Intrigués par leur découverte, les fonctionnaires municipaux ont donc suivi le petit sentier situé au pied du panneau et sont tombés, quelques dizaines de mètres plus loin, sur un attroupement, visiblement en pleine transaction, qui s’est aussitôt dispersé dans les bois à la vue des uniformes.

Avertis de la découverte, les policiers d’Annecy ont mené leur enquête et ont vite acquis la conviction que les panneaux avaient été posés par un riverain excédé par l’omniprésence des trafiquants dans le voisinage.

« Il faut dire que le défilé est permanent, témoignait un habitant du quartier, habitué aux promenades en forêt. On ne peut pas faire une balade sans tomber sur des individus habillés en tenue de ville, qui n’ont visiblement rien de joggeurs et parlant avec un fort accent. Ils rentrent dans la forêt, vont farfouiller dans un secteur bien précis et vont servir leurs clients. »

Un témoignage qui ne tardera pas à se vérifier. Alors que la discussion suit son cours, un homme arrive, marchant dans la boue chaussures de ville aux pieds. Il emprunte la sente indiquée par le témoin et en ressort aussitôt pour se diriger vers une voiture arrêtée au bord de la route.

« Vous voyez, je n’invente rien, commente le riverain, désabusé. Même s’il n’y a pas vraiment de danger, c’est dérangeant lorsqu’on se promène en famille. Une fois, lors d’une balade en famille, on a croisé une dame habillée tout en blanc, avec des yeux écarquillés et rouges. Ma petite fille a cru que c’était une extraterrestre ! Le défilé est permanent, alors je comprends celui qui a posé le panneau. C’est une façon d’attirer l’attention sur ce qui se passe ici… »