«Ce qui manque, c'est la volonté politique…»

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    «Ce qui manque, c'est la volonté politique…»
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Recueilli par Pierre Challier

Que préconisent les Nations Unies face à cette crise ?

D'appliquer les accords qui ont déjà été pris par l'Union européenne en 2015 et de manière urgente. L'an dernier, ces accords avaient décidé de la relocalisation de 66 000 réfugiés depuis la Grèce mais jusqu'à aujourd'hui, les états européens n'ont promis que 1 600 places et seulement 325 personnes sont relocalisées. Les accords sont en place. Les mécanismes sont en place. Jusqu'à maintenant, seule la mise en œuvre manque. Nous exhortons aussi les autorités grecques à renforcer la capacité d'enregistrement des demandeurs d'asile, avec le soutien des états de l'UE, car il est évident que la Grèce seule ne peut pas examiner toutes ces demandes sur place. Au-delà, il faut en fait agir sur trois niveaux.

C'est-à-dire ?

Il faut d'abord trouver une solution au conflit syrien et acheminer de l'aide humanitaire à l'intérieur de la Syrie, ainsi qu'on a pu le faire avec le reste des Nations Unies ces derniers jours. Au deuxième niveau, il faut travailler dans les pays voisins de la Syrie, la Turquie, la Jordanie et le Liban pour qu'ils puissent stabiliser la population des réfugiés chez eux. Et, troisième niveau, l'Europe doit jouer son rôle, mais aussi les autres pays du monde, le monde arabe, l'Amérique du nord, l'Amérique latine, l'Australie, l'Asie pour partager l'accueil des réfugiés syriens et trouver des solutions, car c'est une crise globale. Tant que nous aurons des conflits en Syrie, en Irak, en Afghanistan ou dans d'autres zones, les gens partiront de chez eux pour chercher la sécurité ailleurs. Nous devons stabiliser et organiser ces mouvements comme on l'a fait pendant la guerre des Balkans, au Kosovo, où des centaines de milliers de réfugiés ont été évacuées vers l'UE. Nous voudrions donc voir la même volonté politique aujourd'hui de la part de l'Europe et du reste de la communauté internationale.

Qu'attendez-vous du sommet entre l'UE et la Turquie ?

Nous espérons que l'Europe va se réveiller et que nous allons pouvoir organiser une relocalisation massive depuis la Grèce où l'on est proche de la crise humanitaire. Si l'on avait déjà mis en œuvre ne serait-ce que la moitié des décisions prises l'an dernier, nous n'en serions pas là. Ce qui manque, c'est la volonté politique de certains leaders européens qui, jusqu'à maintenant, n'ont pas vraiment montré leur solidarité. L'Allemagne a pris ses responsabilités mais un seul pays ne peut pas faire face à cette crise. Pendant quatre ans, la Turquie a reçu des millions de réfugiés syriens, 2,5 millions de personnes se trouvant toujours sur son sol. Pendant quatre ans, cette situation a été ignorée par l'Europe et la Turquie n'a pas reçu l'aide nécessaire pour faire face, idem pour le Liban qui accueille un million de réfugiés pour quatre millions d'habitants. On peut évoquer le cas de la Jordanie, aussi. Lorsqu'on dit que l'Europe a déjà reçu un million de réfugiés en 2015… il faut rappeler qu'actuellement, ces trois pays assument des responsabilités beaucoup plus lourdes que l'UE, qui compte 28 états avec les économies les plus développées de la planète et une population de 540 millions de personnes. L'Europe n'a pas de raisons valables pour ne pas faire face et aider un million de personnes. Aujourd'hui, ce sont l'Allemagne, la Suède et l'Autriche qui reçoivent la plupart des réfugiés et il n'est plus supportable que ce ne soit pas partagé.

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