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L'Autrichienne menacée de prison après un viol a pu quitter Dubaï

De confession musulmane, cette jeune femme d'origine tunisienne se plaint d'avoir été agressée sexuellement par un jeune Yéménite dans le parking souterrain d'un hôtel.

Par  (Vienne, correspondante)

Publié le 30 janvier 2014 à 18h44, modifié le 04 février 2014 à 14h53

Temps de Lecture 3 min.

Une vue de Dubaï, aux Emirats arabes unis.

Après le cas d'une Norvégienne, qui avait porté plainte pour viol à Dubaï, avant de se voir condamner à 16 mois de prison pour « rapports sexuels en dehors du mariage » – un acte répréhensible, selon un code pénal inspiré de la charia –, c'est au tour d'une Autrichienne de confession musulmane d'être confrontée à une situation similaire, où Kafka se conjugue aux pesanteurs de la culture patriarcale.

Mais on est aussi à l'heure d'Internet : une pétition de soutien à la jeune femme, mise en ligne cette semaine par le réseau citoyen Avaaz, a déjà recueilli plus de 250 000 signatures en Autriche, en Allemagne et en Suisse. Les faits remontent à la nuit du 1er décembre 2013. D'origine tunisienne, cette jeune femme de 29 ans, qui séjournait à Dubaï, se plaint d'avoir été agressée sexuellement par un jeune Yéménite dans le parking souterrain d'un hôtel, où celui-ci avait garé sa voiture, en verrouillant les portières pour qu'elle ne puisse s'échapper. Fils d'un policier en poste dans l'émirat, le jeune homme qu'elle accuse nie le viol, et prétend, lui, avoir payé ses services sexuels.

Lorsqu'elle a dénoncé le viol à la police, elle a été placée en garde à vue, avant d'être remise en liberté après trois jours de détention. Dénouement inattendu, malgré la confiscation de son passeport, elle finalement pu regagner l'Autriche, jeudi 30 janvier, où elle a été accueillie par le ministre des affaires étrangères Sebastian Kurz.

LA VICTIME S'EST VUE CONSEILLER D'ÉPOUSER SON AGRESSEUR 

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Selon les médias autrichiens, la victime présumée s'était vu conseiller d'épouser son agresseur afin d'échapper à une éventuelle condamnation pour « rapports sexuels en dehors du mariage » (un délit qui peut valoir jusqu'à un an de prison ferme) au cas où le tribunal rejetterait sa plainte.

Pour l'instant, personne n'a été inculpé, précise un porte-parole du ministère autrichien des affaires étrangères, qui a envoyé à Dubaï une cellule de crise, sous la responsabilité d'une diplomate aguerrie, afin d'assister la jeune femme. Vienne avait déjà dû gérer le dossier délicat d'un médecin autrichien condamné à la prison à vie, en 2012, après le décès d'un de ses patients au centre de traumatologie d'un hôpital de Dubaï. Il n'avait pu récupérer son passeport et quitter l'émirat – avant son procès, qui s'est déroulé en son absence – que parce que son épouse, aujourd'hui décédée, était gravement malade en Autriche.

L'affaire de la jeune Autrichienne rappelle surtout le cas de la Norvégienne Marte Dalelv, largement relayé par la presse internationale. Alors qu'elle avait porté plainte pour viol contre un de ses collègues émiratis, qui avait abusé d'elle sous l'emprise de l'alcool dans un hôtel de Dubaï, la Scandinave avait été condamnée à 16 mois de prison (soit trois de plus que son agresseur) par un tribunal local, pour relations sexuelles illicites. Elle a ensuite été graciée et a pu regagner son pays, en juillet 2013.

SON MARI POURRAIT ALORS LA PRIVER DE SON PASSEPORT

Interrogée par le quotidien viennois Kurier, Mme Dalelv a déclaré que la victime ne devait surtout pas céder à l'offre qui lui est faite d'épouser son agresseur, dans l'espoir que le tribunal se montrera plus clément : son mari émirati aurait alors le droit de la priver de son passeport.

La coutume, inspirée de la charia mais aussi de textes bibliques, selon laquelle un violeur peut « réparer » sa faute en épousant sa victime, échappant ainsi à la prison, est désormais remise en cause au sein même du monde musulman. Le Maroc vient d'abroger cette disposition de son code pénal après la vague d'indignation suscitée par le suicide, en mars 2012, de la jeune Amina Filali, contrainte d'épouser l'homme qui avait abusé d'elle.

Le réseau citoyen sur Internet Avaaz (un mot qui signifie « voix » dans plusieurs langues d'Europe de l'Est, d'Asie et du Proche-Orient) avait alors lancé une pétition en ligne pour sensibiliser l'opinion internationale sur le drame d'Amina Filali, qui a recueilli plus d'un million de signatures, dans le royaume marocain et au-delà.

Avaaz attire maintenant l'attention sur l'affaire de la jeune Autrichienne. Pour Amer Albayati, de l'Initiative des musulmans libéraux en Autriche (ILMÖ), celle-ci risque en effet d'être traitée avec encore moins d'indulgence que Marte Dalelv, « parce qu'elle sera considérée avant tout comme une musulmane, et non comme une Européenne de culture chrétienne ».

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