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Lepage : "Pour punir les crimes contre l'environnement, il faut un juge mondial"

INTERVIEW - Corinne Lepage, eurodéputée et fondatrice du mouvement Ralliement Citoyen, appelle à la création d’un tribunal pénal européen de l’environnement et de la santé. Elle s’en explique.

Bruna Basini , Mis à jour le

Vous lancez aujourd’hui au Parlement européen un appel pour que soit créé un Tribunal pénal européen et une Cour pénale internationale de l’environnement et de la santé. Qu’est-ce qui motive votre démarche?
L’idée de confier à un juge international un pouvoir de sanction pour réprimer les comportements irresponsables en matière d’environnement n’est pas nouvelle. Plusieurs associations et mouvements le réclament depuis des années. Ce qui est nouveau c’est que nous avons décidé de travailler ensemble, de créer une plateforme commune. C’est l’objet de la Charte de Bruxelles que nous rendons publique parce qu’il y a urgence. Nous devons pouvoir juger, au moins sur le plan moral, les crimes et délits environnementaux qui mettent en péril les ressources de la planète et la santé humaine.

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Qui sont les signataires de cette charte?
Nous sommes huit membres fondateurs qui fédérons une quinzaine d’organisations comme la Croix Verte de Gorbachev, le réseau des procureurs européens pour l’environnement ou encore l’association End Ecocide in Europe. Et nous invitons plus largement les organisations intéressées et la société civile mondiale à nous soutenir.

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Quelle forme pourrait prendre ce tribunal?
Plusieurs pistes existent. Nous pourrions créer une chambre spécialisée au sein de la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE). Il suffirait de modifier les statuts de la CJUE, de reconnaître que les délits environnementaux doivent être punis et de créer un parquet pénal européen. L’autre piste, à plus longue échéance, serait de revoir les statuts de la Cour pénale internationale pour qu’elle puisse juger une catastrophe environnementale au même titre qu’un crime contre l’humanité.

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Que comptez-vous faire pour mener à bien ce projet?
Nous allons interpeller le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso. Nous allons demander au secrétaire général des Nations Unies, Ban Ki-moon, de répertorier les urgences environnementales et d’élaborer les actes nécessaires pour qu’une Cour pénale internationale de l’environnement et de la santé voit le jour.

Tout un corps de normes a émergé au fils des années, les Etats ne sont-ils pas à même de juger ces crimes et délits?
Pas lorsqu’une catastrophe écologique dépasse les frontières d’un pays ce qui est de plus en plus souvent le cas. A la globalisation économique doit répondre une globalisation judiciaire. On voit bien que la financiarisation de l’économie pousse les acteurs économiques à faire des choix à très court terme et donc à ignorer les principes de précaution. Et qu’elle met souvent en scène plusieurs acteurs économiques qui obligent à une chasse à l’homme planétaire pour établir la chaine des responsabilités. Pour pouvoir juger des faits graves de pollutions ou d’atteinte à l’environnement, il faut un juge à compétence mondiale. Nous sommes en train de basculer d’une société productiviste, celle de l’après-guerre, de la reconstruction qui avait foi dans le progrès à une société qui a pris conscience des ravages pour la santé et l’environnement que provoque ce modèle de développement. Tous les grands procès du 20e siècle en portent la marque : l’Amoco Cadiz et l’Erika, les boues rouges et le sel des mines de potasse déversés dans le Rhin, les procès OGM et amiante. Demain nous serons confrontés à d’autres risques induits par le changement climatique, les nanotechnologies, les pesticides ou les gaz de schiste.

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Source: JDD papier

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