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Autocensure

Au «Parisien», pas question de fâcher Bernard Arnault, le nouvel actionnaire

Les syndicats du quotidien racheté par le milliardaire s'inquiètent que le film «Merci Patron», sévère critique de LVMH, n'ait pas été chroniqué dans le journal.
par Jérôme Lefilliâtre
publié le 10 mars 2016 à 10h58

Il y a un nouveau propriétaire au Parisien-Aujourd'hui en France depuis l'an dernier, Bernard Arnault, et il n'est apparemment pas question pour la direction de la rédaction de se fâcher avec lui. Dans un communiqué envoyé mercredi, les syndicats du quotidien (SNJ, FO, SNJ-CGT) et la société des journalistes (SDJ) s'alarment de la censure du film Merci Patron, sévère critique de LVMH, l'entreprise du milliardaire (lire la critique de Libé). Le long métrage de François Ruffin, qui fait un joli parcours en salles, n'a pas été chroniqué dans le journal.

D'après l'intersyndicale et la SDJ, «ordre a été donné aux confrères du service culture-spectacle qui avaient visionné le long métrage de ne pas le chroniquer, fût-ce en dix lignes. De même a été repoussée plus tard une proposition de sujet du service politique sur le buzz suscité à gauche par le film sous prétexte qu'il s'agissait "d'un sujet militant", "et qu'il y avait d'autres sujets prioritaires ce jour-là".»

«Acte d’autocensure»

Les représentants du personnel et des journalistes ont été reçus lundi à leur demande par le directeur de la rédaction, Stéphane Albouy, qui leur a dit, selon eux, «assumer» cette décision. «C'est mon choix, un arbitrage comme j'en fais des dizaines d'autres», aurait-il justifié, invoquant son refus de «faire la promotion d'un procédé déloyal, malhonnête, qui a instrumentalisé les Klur» (la famille au centre du film). Contactée par Libération, la direction de la rédaction du Parisien n'était pas joignable dans l'immédiat.

Les syndicats et la SDJ s'inquiètent d'un «acte d'autocensure» plutôt que de censure, et ne mettent pas en doute la sincérité de Stéphane Albouy lorsqu'il assure ne pas avoir reçu de pressions venues d'en haut. Mais «le silence pour lequel a opté le directeur de la rédaction est un message dangereux envoyé à l'actionnaire LVMH», concluent-ils.

Aux dernières nouvelles, Merci Patron n'a pas été chroniqué non plus par Les Echos, racheté par Bernard Arnault en 2007.

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