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Cinquante ans de relations entre la Chine et la France célébrées à Pékin

La Chine a célébré le cinquantenaire de l'établissement des relations diplomatiques avec la France avec une visite de Claude Bartolone et une exposition de la fondation Charles de Gaulle.

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Publié le 28 janvier 2014 à 07h05, modifié le 28 janvier 2014 à 12h13

Temps de Lecture 6 min.

Le président de l'Assemblée nationale Claude Bartolone pendant une conférence de presse à l'ambassade de France à Pékin le 27 janvier.

La Chine a célébré, lundi 27 janvier, le cinquantenaire de l'établissement des relations diplomatiques avec la France par un fastueux banquet officiel, deux doubles pages dans le Quotidien du peuple, et l'inauguration d'une exposition de la fondation Charles de Gaulle au Musée national sur la place Tiananmen, dans laquelle figure la célèbre DS du général. Plus d'une centaine d'événements sont prévus en France et en Chine tout au long de cette année du cinquantenaire.

C'est Claude Bartolone, le président de l'Assemblée nationale, venu à la tête d'une délégation de parlementaires, qui représentait la France lors d'une visite commencée le 23 janvier par un entretien avec le président Xi Jinping, poursuivie par un déplacement de deux jours à Shenyang – mégapole industrielle du nord-est chinois en plein développement –, et entrecoupée de diverses rencontres à haut niveau. Elle s'est clôturée lundi soir par un concert de l'Orchestre symphonique de la Garde Républicaine au Musée national.

UNE AMITIÉ « AUSSI GRANDE QUE LES ALPES »

L'homologue chinois de M. Bartolone, Zhang Dejiang, numéro trois dans la hiérarchie de l'Etat communiste, a reçu lundi midi dans la salle dorée du grand Palais du Peuple la délégation française pour un banquet de haute cuisine chinoise : « L'amitié traditionnelle bâtie par nos dirigeants est aussi grande que les Alpes et durera comme l'eau du Yangzi qui coule éternellement », a lancé M. Zhang avant que les convives n'entament un « potage au cèpe de pin et bambou spongieux ».

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M. Bartolone a rappelé dans son allocution les trois objectifs du président Hollande pour l'avenir des relations franco-chinoises, c'est-à-dire « le dialogue politique, le rééquilibrage de l'économie et les échanges entre les sociétés civiles », notamment entre les jeunes. Zhou Enlai et Deng Xiaoping, a-t-il rappelé, s'étaient rencontrés à Paris, fait qui « reste présent dans nos mémoires ». Ces deux grands personnages du régime furent ouvriers en France dans les années 1920 et s'imprégnèrent alors d'idéaux de liberté et de justice sociale.

« LA CHINE DE CONSOMMATEURS QUI SE PRÉPARE »

Cinquante ans après le geste historique du général de Gaulle, les enjeux pour la France sont certes moins politiques qu'économiques. A l'époque, a rappelé dans un autre discours la vice-ministre Liu Yandong lundi soir au Musée national, « l'établissement de relations diplomatiques entre ces deux grandes civilisations a ébranlé l'échiquier de la guerre froide marquée par l'antagonisme bipolaire ».

Aujourd'hui, la Chine n'est déjà plus cet « atelier de montage » qui vient encore à l'esprit des Français quand on parle d'elle, a expliqué Claude Bartolone aux journalistes français : le quatrième personnage de l'Etat français admet avoir été impressionné par la préoccupation qu'avaient désormais les dirigeants chinois des besoins futurs de leur économie, en matière d'importations et de savoir-faire, notamment sur les questions liées à l'environnement, l'urbanisation, la santé ou l'agro-alimentaire.

« [Ils nous disent], par rapport aux besoins qui étaient ceux de la Chine exportatrice, nous n'avions pas les mêmes atouts que les Allemands. Dans le cadre de la Chine de consommateurs qui se prépare, nous avons certainement des atouts dont nous pourrons bénéficier. […] Je suis très surpris de voir comment le président de la République [populaire] a mis en avant ce changement qui va représenter dans les années qui viennent, à la fois des Chinois de plus en plus nombreux [à voyager] comme touristes, et un marché chinois de plus en plus importateur pour répondre à la demande intérieure. Et je crois qu'ils nous regardent d'une manière différente en fonction des besoins qu'ils identifient pour l'avenir », poursuit-il.

PAS DE VEXATIONS SUR LES DROITS DE L'HOMME

La visite officielle de la délégation française menée par M. Bartolone a coïncidé avec une semaine exceptionnellement chargée en actualité des droits de l'homme, avec le jugement à Pékin le 22 janvier de Xu Zhiyong, chef de file du mouvement des Nouveaux Citoyens. Le verdict, annoncé le 26 janvier, est tombé la veille des festivités franco-chinoises, mais après la plupart des rencontres officielles entre la délégation française et les dirigeants chinois.

M. Bartolone dit avoir « parlé de tout » avec ses interlocuteurs, et même avec son homologue de l'émotion que suscitaient en France les immolations de Tibétains. Zhang Dejiang, a remarqué Claude Bartolone, a lui-même mis en avant le fait que la Chine avait aboli les camps de rééducation par le travail. Le député socialiste en a profité pour encourager la Chine à signer le Pacte international relatif aux droits civils et politiques de l'ONU – la Chine l'a bien signé mais jamais ratifié.

Il a aussi évoqué les textes de loi français relatifs à la transparence du patrimoine des élus – sujet brûlant, puisqu'il est au centre de la campagne des Nouveaux Citoyens – et note que « si on ne lui avait pas fait de grandes annonces là-dessus, j'ai l'impression que c'est un sujet sur lequel, au niveau du Parti communiste chinois, on réfléchit ». Sur les dossiers des droits de l'homme, signale M. Bartolone, « les dirigeants chinois ne se braquent pas » mais « semblent avoir un calendrier, qui n'est pas le même que nous ».

Pour la plupart des observateurs du régime, les dirigeants communistes chinois sont en fait passés maîtres dans l'art d'esquiver les jérémiades des Occidentaux au sujet des dissidents embastillés, qu'ils soient Prix Nobel de la paix ou avocats. L'ennui, c'est qu'ils en font bien moins cas que dans les années 1990 ou même 2000, lorsque la Chine utilisait les libérations anticipées comme monnaie d'échange pour des concessions commerciales.

Lire l'analyse (édition abonnés) : Article réservé à nos abonnés Pékin réforme l'économie, pas la politique

LA DS DE CHARLES DE GAULLE

Du côté des événements culturels, une exposition de la Fondation Charles de Gaulle, intitulée « Clairvoyance et sagesse des pionniers », retrace jusqu'au 6 février un cheminement chronologique et rétro à travers des textes et des photos marquant les grandes étapes des cinquante ans des relations diplomatiques avec la République populaire.

Outre la DS du général dont la carrosserie porte les impacts de balles de l'attentat du Petit Clamart, on peut écouter une partie du long discours prononcé par de Gaulle le 31 janvier 1964 pour expliquer son choix de reconnaître la Chine à plus haut niveau, ce que la France est alors la première à faire parmi les grands pays occidentaux.

Le reste de l'allocution, accessible toutefois en ligne dans sa version chinoise, mentionne deux fois le mot « dictature » au sujet de la Chine de Mao Zedong. Charles de Gaulle avait en outre justifié ainsi sa décision : « Est-il besoin de dire que, de notre part, il n'y a dans cette décision rien qui comporte la moindre approbation à l'égard du système politique qui domine actuellement la Chine ? En nouant à son tour, et après maintes nations libres, des relations officielles avec cet Etat, comme elle l'a fait avec d'autres qui subissent un régime analogue, la France reconnaît simplement le monde tel qu'il est. »

PHOTO RECADRÉE, ÉPISODES OUBLIÉS

C'est Edgar Faure qui fut discrètement envoyé en négociateur en Chine en 1963 pour préparer le basculement de la reconnaissance par la France de Formose (alors République de Chine) à la République populaire de Mao. Tchang Kaï-chek avait été prévenu par un autre émissaire. Quand aux photos, elles retracent les déplacements en Chine de Pompidou en 1973, puis de ses successeurs à l'Elysée, ainsi que ceux des dirigeants chinois en France.

Autant dire que l'épisode fâcheux de la torche olympique malmenée à Paris en 2008, puis des manifestations anti-français en Chine, qui ont donné lieu à d'intenses joutes diplomatiques, ne font pas partie de l'histoire commune qu'il est admissible de montrer.

En 1983, on reconnaît François Mitterrand qui passe en revue la garde chinoise, seul sur le tapis rouge à gauche du cadre : les Chinois ont souhaité que la photo soit recadrée, afin d'escamoter la silhouette de Zhao Ziyang, alors premier ministre. M. Zhao fut limogé en 1989 alors qu'il était secrétaire général pour son soutien aux manifestants lors des événements de Tiananmen. A Pékin, le cinquantenaire des relations avec la République populaire se devait d'être on ne peut plus diplomatique…

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